La commission électorale britannique rend ses conclusions quelques mois après les accusations du lanceur d’alerte Christopher Wylie. / MANDEL NGAN / AFP

La campagne officielle pour le vote en faveur du Brexit, Vote Leave, a reçu une amende pour avoir enfreint le code électoral, a annoncé mardi 17 juillet la Commission électorale britannique, quelques mois après les accusations d’un lanceur d’alerte.

La Commission électorale a « mené une enquête approfondie » sur les campagnes menées par Vote Leave, soutenue par des figures du parti conservateur, comme l’ex-ministre des affaires étrangères Boris Johnson, le ministre de l’environnement, Michael Gove, et BeLeave, un plus petit groupe militant également pour le Brexit lors du référendum sur le maintien dans l’Union européenne (UE) en juin 2016.

« Nous avons trouvé des preuves substantielles que les deux groupes travaillaient à un plan commun, ne déclaraient pas leur travail commun et ne respectaient pas les limites de dépenses (de campagne) légales », a indiqué la Commission.

Elle rend ses conclusions quelques mois après les accusations du lanceur d’alerte Christopher Wylie, selon lesquelles la société Cambridge Analytica, accusée d’avoir utilisé à des fins politiques les données privées de millions d’utilisateurs de Facebook, avait joué un « rôle crucial » dans le vote en faveur du Brexit.

Christopher Wylie avait affirmé qu’Aggregate IQ (AIQ), une entreprise canadienne liée à Cambridge Analytica, avait travaillé avec cette dernière afin d’aider la campagne en faveur de la sortie de l’UE, « Leave. EU », à contourner son plafond de dépenses. Dans un entretien avec plusieurs journaux européens, M. Wylie avait déclaré que « sans Aggregate IQ, le camp du Leaven’aurait pas pu gagner le référendum du 23 juin 2016, qui s’est joué à moins de 2 % des votes ». Les Britanniques avaient voté à 52 % pour la sortie de l’UE.

Un résultat « plus suspect que jamais »

Avec la publication des conclusions de la Commission, « Le résultat serré du référendum a l’air plus suspect que jamais », a tweeté le député travailliste et proeuropéen David Lammy :

Le groupe BeLeave, fondé par l’étudiant en mode Darren Grimes, a dépensé plus de 675 000 livres (761 000 euros) pour Aggregate IQ, spécialisée dans la publicité politique en ligne, « dans le cadre d’un plan commun avec Vote Leave », selon la Commission.

« Ces dépenses auraient dû être déclarées par Vote Leave », affirme-t-elle, calculant que le groupe a dépassé le plafond de dépenses, fixé à 7 millions de livres (7,9 millions d’euros), de presque 500 000 livres (565 000 euros).

Vote Leave devra payer 61 000 livres (69 000 euros) pour plusieurs infractions au code électoral, et le fondateur du groupe BeLeave, Darren Grimes, 20 000 livres, le maximum possible pour un particulier. La Commission a alerté la police et lui a transmis les résultats de son enquête.

Un autre mouvement pro-Brexit déjà sanctionné

Un porte-parole de Vote Leave a riposté en accusant le rapport de la commission de contenir « un certain nombre de fausses accusations et d’affirmations incorrectes ». Il a regretté que les enquêteurs aient écouté de « soi-disant lanceurs d’alertes » et « n’ait interviewé personne de Vote Leave ». « Nous étudions les options possibles mais sommes confiants [dans le fait] que ces conclusions seront rejetées », a ajouté ce porte-parole.

Mais selon la Commission, Vote Leave a « refusé de coopérer » à l’enquête, « a rejeté nos demandes d’entretien avec un représentant [du mouvement] et nous a forcés à utiliser nos pouvoirs légaux pour le contraindre à fournir des preuves ». « Néanmoins, nous avons trouvé des preuves claires et importantes », a-t-elle poursuivi.

De son côté, Darren Grimes s’est dit « choqué » et « déçu » par la décision de la Commission de le sanctionner « pour avoir coché la mauvaise case sur un formulaire ». « L’amende est totalement disproportionnée et injustifiée », a-t-il posté sur Twitter.

En mai, la Commission électorale britannique avait sanctionné un autre mouvement pro-Brexit, Leave. EU, qui avait reçu une amende de 70 000 livres (79 000 euros) à cause de multiples irrégularités dans le financement de sa campagne.

Créé en 2015 pour défendre une sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, Leave. EU était soutenu par l’ancien leader du parti europhobe Ukip, Nigel Farage, mais ne faisait pas partie de la campagne officielle du référendum. Très présent sur les réseaux sociaux et axant sa campagne sur un fort sentiment anti-establishment, Leave. EU avait toutefois été décisif quant au vote des Britanniques en faveur du Brexit.