La journée de manifestations contre la corruption et le manque de services publics en Irak, a fait une nouvelle victime vendredi, portant à neuf le nombre de morts depuis le début de ce mouvement il y a une dizaine de jours.

La colère, qui agite depuis le 8 juillet le sud du pays, tribal et agricole, a gagné vendredi Bagdad, où des centaines de manifestants ont été dispersés à coup de canons à eau et de gaz lacrymogènes alors qu’ils tentaient d’entrer dans la zone verte ultra-sécurisée où siègent les autorités. « On a cru que ces politiciens allaient améliorer la situation du pays, mais ils n’ont rien fait du tout », a déploré Yahya Hasnaoui, manifestant de 50 ans à Bagdad.

Depuis le début du mouvement, les manifestants concentrent leur colère sur les institutions. Ils accusent l’Etat de gabegie et les partis et leurs représentants de clientélisme et de prévarication. Plusieurs sièges de partis et bâtiments publics ont été incendiés et vendredi, les manifestants à Diwaniya se sont dirigés vers les sièges de plusieurs organisations, dont le puissant groupe armé Badr. Là, « un civil d’une vingtaine d’années a été mortellement touché par balles », a indiqué une source médicale. Ces balles ont été tirées par un garde du siège de Badr, a ajouté cette source sous le couvert de l’anonymat.

Ce décès porte à neuf le nombre de personnes tuées depuis le début du mouvement. L’une l’a été par les forces de l’ordre, selon des responsables locaux, les autres par des tireurs non identifiés. Rapidement, le gouvernement irakien a dénoncé des « vandales » infiltrés parmi les manifestants pour s’en prendre aux « biens publics ».

L’électricité est l’un des points de discorde majeurs

Tous les vendredis depuis 2015, la capitale est le théâtre de manifestations contre la corruption, notamment organisées par les partisans de l’alliance inédite entre le populiste chiite Moqtada Sadr et les communistes, qui ont remporté ensemble les législatives de mai. Ces défilés ne rassemblaient plus qu’une poignée de fidèles.

Cette fois-ci cependant, des centaines de personnes se sont massées sur la place Tahrir, comme Mortada Mohammed, Bagdadi de 19 ans, qui a dit manifester parce qu’il en a « marre de vivre dans les ténèbres ». « On n’a ni électricité, ni travail, l’eau est régulièrement coupée pendant des heures, et même internet, on ne l’a plus », s’est-il emporté alors que les réseaux sociaux sont inaccessibles depuis près d’une semaine.

L’électricité est l’un des points de discorde majeurs dans le pays où les températures estivales avoisinent les 50 degrés. A Nassiryia, des slogans réclament la « démission du ministre de l’électricité », alors que la plupart des foyers irakiens ne sont alimentés en courant que quelques heures par jour. A Bassora, ville pétrolière portuaire du sud d’où est partie la colère le 8 juillet, plusieurs milliers de manifestants se sont rassemblés devant le siège du gouvernorat dans le calme, a constaté un photographe de l’AFP.