Patrick Strzoda, directeur de cabinet d'Emmanuel Macron, arrive pour son audition par la commission d’enquête parlementaire, à l'Assemblée nationale, à Paris, le 24 juillet. / Laurence Geai pour Le Monde

C’est au tour du directeur de cabinet du président de la République. Après le ministre de l’intérieur Gérard Collomb, le préfet de police de Paris Michel Delpuech et le directeur de l’ordre public à la préfecture de police de Paris, Alain Gibelin, Patrick Strzoda a été auditionné sur l’affaire Benalla devant la commission d’enquête de l’Assemblée, mardi 24 juillet.

M. Strzoda a dénoncé dans son propos liminaire le comportement « fautif » et « inacceptable » de l’adjoint du chef de cabinet de l’Elysée identitifé par Le Monde en train de frapper des manifestants le 1er mai à Paris. Ayant convoqué M. Benalla le 2 mai, il l’a « informé que sa participation à une opération de maintien de l’ordre ne faisait pas partie de sa mission d’observation » et qu’il ferait l’objet d’une sanction, dont a été informé le président de la République via le secrétaire général de l’Elysée.

« J’ai donné mon feu vert »

Sur le fait de savoir si M. Benalla était dûment autorisé à se trouver sur les lieux de la manifestation, le préfet a indiqué lui avoir donné son « feu vert », M. Benalla lui ayant dit avoir été invité à se rendre à la manifestation par le chef d’état-major de la direction de l’ordre public et de la circulation, Laurent Simonin. M. Simonin a depuis été mis en examen dans cette affaire.

« Je ne me suis pas opposé à ce qu’il participe en qualité d’observateur à cette journée du 1er-Mai, et je lui ai bien rappelé qu’il était hors de question de participer activement à des opérations sur le terrain », a-t-il dit, en précisant par la suite que c’était « la première fois » que M. Benalla lui demandait son accord pour aller sur une manifestation.

M. Strzoda a précisé que le rôle de M. Benalla avant d’être sanctionné était de coordonner « des services qui concourent aux déplacements officiels du président de la République », et qu’il n’avait jamais été question qu’il prenne la « direction d’un service amené à regrouper les services de sécurité de l’Elysée », comme l’ont avancé certains médias.

« C’est ma responsabilité et je l’assume »

La sanction, « je l’ai prise seul, en mon âme et conscience. Je n’ai jamais parlé de ce sujet avec le chef de l’Etat, qui était à 10 000 km », a dit M. Strzoda lors de son audition. Et d’ajouter :

« J’ai été recruté sur cette fonction pour m’occuper de la gestion interne de la présidence. C’est vraiment ma responsabilité et je l’assume. »

Selon la version qu’il en a donnée, Patrick Strzoda a cependant soumis sa proposition d’une sanction de quinze jours au secrétaire général de l’Elysée, Alexis Kohler, qui en a lui-même parlé avec Emmanuel Macron, alors en Australie.

« Dès que le président en a été informé, j’ai mis en œuvre cette mesure », a-t-il dit devant les députés.

Alexandre Benalla, ex-chargé de mission au cabinet du président, a reçu une mise à pied de quinze jours, avec suspension de traitement, suivie d’une rétrogradation pour avoir participé aux opérations des forces de l’ordre en marge des manifestations du 1er-Mai.

A la question « la sanction était-elle adaptée ? », il répond : « Je comprends qu’on puisse considérer qu’elle n’était pas adaptée. En ce qui me concerne, j’assume ma décision. »

« Pas assez d’éléments pour saisir la justice »

M. Strzoda a également dit ne pas avoir saisi la justice à propos des actes commis par Alexandre Benalla le 1er mai parce qu’il n’avait « pas assez d’éléments » pour le faire.

« J’ai considéré qu’à mon niveau je n’avais pas assez d’éléments pour justifier un recours à l’article 40 », a-t-il déclaré, soulignant qu’aucune plainte n’avait été déposée et que les « autorités d’emploi » de M. Benalla ne l’avaient « jamais évoqué ou suggéré ».

De plus, « cette scène a été signalée sur la plateforme de l’IGPN (inspection générale de la police nationale), elle a été analysée par des spécialistes et aucune information de cette analyse ne m’a été adressée allant dans le sens d’un article 40 », a-t-il poursuivi.

« Donc le 2 mai, avec le souci de prendre une sanction immédiate, et sur la base des informations dont je disposais, j’ai pris cette sanction de suspension et de rétrogradation, avec une lettre d’avertissement valant notification de licenciement en cas de nouveau comportement fautif (…). Je comprends parfaitement qu’on puisse considérer que (cette sanction) n’était pas adaptée, en tout cas en ce qui me concerne j’assume ma décision », a-t-il conclu.

« M. Benalla n’était pas à l’Elysée du 3 mai au 22 mai »

M. Strzoda a également démenti que M. Benalla ait pu participer à des réunions après sa mise à pied :

« Je suis formel, M. Benalla n’était pas à l’Elysée du 3 mai au 22 mai. »

Lors de son audition devant la commission d’enquête de l’Assemblée nationale, lundi, le directeur de l’ordre public à la préfecture de police de Paris, Alain Gibelin, avait reconnu que M. Benalla était présent à des réunions avec ses services entre le 4 et le 19 mai, période pendant laquelle la suspension de l’adjoint du chef de cabinet évoquée par l’Elysée était en vigueur. « L’information de cette sanction ne nous a jamais été transmise », avait-il déclaré. Il est depuis revenu sur ces déclarations.

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