Le « verrou de Bercy » pourrait sauter prochainement. Le gouvernement va soutenir un amendement parlementaire prévoyant de fixer dans la loi les critères de transmission à la justice des dossiers de fraude fiscale, ce qui mettra fin à ce dispositif mis en place dans les années 1920 et qui donne à l’administration fiscale le monopole des poursuites pénales. C’est ce qu’a annoncé, mardi 24 juillet, le ministre de l’action et des comptes publics, Gérald Darmanin.

« Le gouvernement va accepter l’amendement de la députée Emilie Cariou (LRM), qui consiste à supprimer le verrou de Bercy », a déclaré M. Darmanin au micro de France Inter, « ce ne sera plus le ministère du budget qui décidera quand on transmet ou non des plaintes au parquet ».

Mme Cariou avait remis, en mai, un rapport sur le sujet. Son amendement sera débattu dans le cadre de l’examen du projet de loi contre la fraude fiscale, prévu mardi soir et mercredi en commission des finances de l’Assemblée nationale.

Cet amendement prévoit un « mécanisme de transmission automatique » par l’administration fiscale des affaires les plus graves, le parquet décidant ensuite « librement » de « l’opportunité des poursuites sur les dossiers transmis ».

2 000 dossiers pourraient être transmis chaque année à la justice

Le « verrou de Bercy » était défendu par l’administration au nom de l’efficacité. Des magistrats et des associations accusaient le dispositif de favoriser une certaine forme d’opacité.

Dans le cadre de l’examen son projet de loi contre la fraude, M. Darmanin s’était dit hostile à sa suppression pure et simple, mais « ouvert » à des « aménagements ».

Plusieurs évolutions ont déjà été adoptées lors de l’examen du texte de loi au Sénat, à travers un amendement du rapporteur général de la commission des finances, Albéric de Montgolfier (LR).

Ce dernier a fixé trois critères « cumulatifs » pour la transmission des dossiers à la justice : l’application de pénalités d’au moins 80 %, un montant de droits fraudés élevé (fixé par décret en Conseil d’Etat) et la réitération des faits.

L’amendement de Mme Cariou prévoit d’élargir le nombre des dossiers concernés, en supprimant le caractère « cumulatif » de ces critères et l’avis de la commission des infractions fiscales pour les dossiers de présomptions caractérisées.

Si cet amendement est adopté, « nous allons certainement doubler le nombre de dossiers fiscaux que nous transmettrons à la justice de façon automatique », a prévenu M. Darmanin. Selon Bercy, quelque 2 000 dossiers pourraient ainsi être transmis chaque année à la justice, contre 900 actuellement.