Giuseppe Conte, le premier ministre italien (à gauche) et Matteo Salvini, le ministre de l’intérieur, le 15 août, lors de la conférence de presse après l’effondrement du viaduc de Morandi, à Gênes. / Flavio Lo Scalzo / AP

C’est la curie pour Atlantia et Autostrade per l’Italia, sa filiale qui gère l’autoroute et le viaduc Morandi, qui s’est écroulé mardi 14 août. Jeudi, le gouvernement italien a déclaré la guerre à la société italienne. Après plusieurs attaques du premier ministre, Giuseppe Conte, et des poids lourds du gouvernement, le vice-ministre des transports, Edoardo Rixi, a précisé à Reuters que l’exécutif transalpin étudiait trois possibilités pour Autostrade : « La révocation totale de la concession, la révocation de la section A10 ou une pénalité, mais une pénalité de 150 millions d’euros [prévu par le contrat] est trop faible. »

Ces déclarations ont créé un vent de panique à la Bourse de Milan, où le concessionnaire est coté. L’action Atlantia s’est écroulée de 25 % en séance, jeudi. Alors que la capitalisation du groupe, qui gère des autoroutes en Italie, au Chili ou encore en Pologne et des aéroports, tutoyait fin 2017 les 22 milliards d’euros, il affichait en fin de journée une capitalisation de 16 milliards d’euros.

Dans un communiqué, ce groupe de 6 milliards d’euros de chiffre d’affaires, détenu pour 30 % par Edizione, la holding de la famille Benetton, a souhaité rassurer ses actionnaires. La société a dénoncé des annonces « faites en l’absence de toute contestation spécifique » et « de toute certitude sur les causes effectives » du drame. Et dans l’hypothèse d’une révocation de la concession, « il revient au concessionnaire d’évaluer la valeur résiduelle de la concession, une fois les éventuelles pénalités déduites », a prévenu Atlantia. Selon des médias italiens, le coût pour l’Etat de cette révocation se chiffre en milliards d’euros.

Une entreprise déployée à l’international

Pour Atlantia, cet accident pourrait marquer un coup d’arrêt pour son développement. Privatisée en 1998, Autostrade gérait 2 850 km de voies (soit 50 % du réseau italien). Depuis, la société dirigée par Giovanni Castellucci s’est déployée à l’international en acquérant quelque 2 000 km d’autoroutes concédées par le Brésil, le Chili ou encore l’Inde.

A l’image du français Vinci, le concessionnaire italien se tourne à partir de 2013 vers les aéroports. Il remporte la concession des deux aéroports romains, Fiumicino et Ciampino, avant de décrocher, en consortium avec EDF Invest, celle de l’aéroport de Nice-Côte d’Azur moyennant un chèque de 1,22 milliard d’euros. Dernièrement, Atlantia a racheté la part de 15,5 % de Goldman Sachs dans Getlink (nouveau nom d’Eurotunnel). Le groupe transalpin ne devrait pas s’arrêter là en France.

Alors qu’il souhaitait acquérir des autoroutes françaises lors de la privatisation de 2007, son offre avait été retoquée. Onze ans plus tard, il revient. En mettant la main, en consortium avec l’espagnol ACS, sur le groupe Abertis, il détient désormais la Société des autoroutes du nord et de l’est de la France (Sanef). La société pourrait également se positionner pour la privatisation de Groupe ADP (ex-Aéroports de Paris). Depuis l’accident de Gênes, l’Etat sera particulièrement vigilant sur cette candidature.