Drone armé abattu par l’armée russe au-dessus de la base aérienne de Hmeimim, en Syrie, le 16 août. / ANDREY BORODULIN / AFP

L’été 2018 n’aura pas, c’est le moins que l’on puisse dire, contribué à rehausser l’image des drones dans l’opinion. Le 4 août, les autorités vénézuéliennes ont dénoncé un attentat perpétré par deux drones chargés d’explosifs visant le président Nicolas Maduro. Deux jours plus tard, un appareil non-identifié (qui, après avoir été neutralisé, a fini sa course en mer) a survolé le fort de Brégançon. En juillet, un cartel mexicain avait attaqué avec deux petits drones armés le domicile d’un responsable de la lutte contre le trafic de drogue, non loin de la frontière américaine. Un rapport des Nations unies vient de s’inquièter du « niveau élevé de sophistication » atteint par l’organisation Etat islamique en matière de détournement, à des fins terroristes, de drones civils pour en faire une redoutable « arme du pauvre », selon l’expression consacrée. Rien de très nouveau, en réalité.

Tous ces signaux confirment l’identité sulfureuse de cet objet insaisissable, complice des terroristes isolés, des malfaiteurs en quête d’évasion, des inquisiteurs oublieux du respect de la vie privée ... et des casse-pieds qui les font vrombir sur les lieux de vacances. Bref, toujours dans les mauvais coups.

Face à la menace, les pouvoirs publics sont mal armés. Certes, le drone qui folâtrait du côté de Brégançon a été « neutralisé », mais en réalité la panoplie des systèmes anti-drones est bien loin d’être infaillible. Quant à la législation adoptée dans la précipitation afin de réglementer l’usage des drones de loisirs de plus de 800 g (qui devront être déclarés et disposer d’une signature électronique), elle bute sur des difficultés techniques persistantes qui lui ont déja fait prendre un retard conséquent.

Utilisé par les secouristes

Face à cette mauvaise réputation, faire valoir que, cet été, les drones ont permis de retrouver des vacanciers égarés dans des parcs naturels, de larguer des gilets sauvetage à des nageurs en difficulté ou des produits de première nécessité aux sinistrés indiens du Kerala, contribué à la protection des dauphins en Amazonie ou la détection précoce de la bactérie « tueuse d’oliviers » n’y fera pas grand-chose. L’objet éveille la suspicion et, à intervalles réguliers, une certaine anxiété.

Cette identité commence à inquiéter les acteurs de la prometteuse mais encore balbutiante économie du drone. Equipé de capteurs, de caméras infra-rouges ou de lidars (radars laser), le drone est capable de modéliser son environnement et de détecter ce qui est invisible au ras du sol. Il commence à se rendre indispensable auprès de professionnels du bâtiment, des travaux publics, des médias voire de l’agriculture. Il a aussi entamé une perçée sur le marché de la sécurité, notamment la surveillance de zones sensibles, et équipe les pompiers, la police et la protection civile. En attendant la livraison par drone qui, n’en déplaise aux sceptiques, fait l’objet d’investissements croissants de la part des services postaux, des grandes entreprises de distribution, de l’aéronautique et même de constructeurs de véhicules utilitaires, tel Mercedes.

Conscients que l’avenir du drone est intimement liée à son acceptabilité sociale, ceux qui misent sur son développement vivent forcément mal les polémiques récurentes qu’il suscite. Il faut pourtant qu’ils s’y résignent. Gentil drone-vilain drone : cet objet est, par nature, sujet à controverses. Comme l’automobile, le smartphone ou les réseaux sociaux.