Recourir à la « psychiatrie » lorsqu’un jeune enfant présente « des tendances homosexuelles » : cette suggestion faite par le pape François, dimanche 26 août au soir, lors de la conférence de presse donnée dans l’avion qui le ramenait d’une visite en Irlande, a fait vivement réagir.

Le chef de l’Eglise catholique répondait à un journaliste qui lui demandait ce que pouvait dire un père catholique à son fils lorsqu’il apprend qu’il est homosexuel. « Je lui dirais premièrement de prier, de ne pas condamner, dialoguer, comprendre, donner une place au fils ou à la fille, donner une place pour qu’il s’exprime. » Le pontife argentin a ensuite fait une distinction en fonction de l’âge de l’enfant.

« C’est une chose quand cela se manifeste dans l’enfance, il y a beaucoup de chose à faire par la psychiatrie, pour voir comment sont les choses. C’est autre chose quand cela se manifeste après 20 ans. Je ne dirai jamais que le silence est un remède. Ignorer son fils ou sa fille qui a des tendances homosexuelles est un défaut de paternité ou de maternité. Tu es mon fils, tu es ma fille, comme tu es. Je suis ton père ou ta mère : parlons. »

« Ne pas altérer la pensée du pape »

Dans la transcription officielle (en italien, consultable sur le site du Vatican) de cette conférence de presse publiée lundi matin par le service de presse du Vatican, le mot « psychiatrie » a été omis. Une de ses responsables a indiqué à l’Agence France-Presse que ce mot avait été laissé de côté « pour ne pas altérer la pensée du pape ». « Quand le pape se réfère à lapsychiatrie”, il est clair qu’il le fait comme un exemple qui rentre dans les différentes choses qui peuvent être faites, explique cette source. Mais avec ce mot, il n’avait pas l’intention de dire qu’il s’agissait d’une maladie psychiatrique, mais que peut-être il fallait voir comment sont les choses au niveau psychologique. »

Le fait est que l’emploi du mot « psychiatrie » a sans doute brouillé un message que, depuis le début de son pontificat, François veut plus ouvert pour les gays. « Qui suis-je pour juger ? » – une phrase dite au cours d’une conférence de presse, en 2013, à propos des personnes homosexuelles – est sans doute la plus connue de ce pape. Celui-ci n’a en rien fait évoluer la doctrine catholique en la matière. Elle continue de considérer l’homosexualité comme une conduite « intrinsèquement désordonnée » et non conforme au « plan de Dieu ».

« Juan Carlos, que tu sois gay ça m’est égal »

En revanche, depuis les deux synodes sur la famille, en 2014 et en 2015, le message diffusé par le Vatican insiste sur l’importance, pour l’Eglise catholique, « d’accueillir » et « d’accompagner » les gays et leurs familles, et non pas de les rejeter. Par rapport à celle qu’a connu la société dans son ensemble, on peut trouver cette évolution infinitésimale, mais elle existe.

En avril, à l’une des victimes chiliennes d’un prêtre condamné par l’Eglise pour abus sexuels, il avait dit, en tête à tête : « Juan Carlos, que tu sois gay ça m’est égal. Dieu t’a fait ainsi et t’aime ainsi et à moi ça m’est égal. Tu dois être heureux d’être comme tu es », selon des propos rapportés par la suite par le Chilien au quotidien espagnol El Pais.

Quant à la référence à la « psychiatrie », il ne faut sans doute pas l’entendre, dans sa bouche, comme une incitation à essayer de « soigner » son enfant dans le but d’en faire un hétérosexuel – comme certaines « thérapies » se réclamant du christianisme affirment pouvoir le faire. Le pape préconise sans doute cette option aux jeunes enfants comme un outil pour détecter un éventuel malaise.

Dans la bouche de Jorge Mario Bergoglio, l’état civil du pape François, les distinctions entre psychiatrie, psychologie et psychanalyse ne sont par ailleurs pas nécessairement très précises, ni connotées négativement. En bon Argentin, il a révélé avoir lui-même suivi « une psychanalyse » pendant six mois, autour de la quarantaine, en Argentine.