L’ancienne présidente argentine Cristina Kirchner, après sa comparution devant un juge, à Buenos Aires, le 3 septembre. / STRINGER / Reuters

Cristina Kirchner à nouveau face au juge : l’ancienne présidente argentine a comparu lundi pour la deuxième fois en trois semaines et a nié tout lien avec les « cahiers de la corruption », un grand scandale de pots-de-vin qui implique l’administration Kirchner.

Comme à chacune de ses comparutions, elle a refusé de répondre aux questions du juge Claudio Bonadio, remettant à la place une déclaration écrite, comme la loi l’y autorise. Mme Kirchner, 65 ans, qui fut présidente de 2007 à 2015, a déclaré :

« Je nie catégoriquement avoir fait partie d’une association illicite, ou avoir commis un délit. L’enquête est délibérément dirigée contre moi, il n’y a pas la moindre preuve qui accrédite les délits qu’on m’attribue de manière calomnieuse. »

Le juge Claudio Bonadio la soupçonne d’avoir été la responsable, avec son mari Nestor Kirchner, président de 2003 à 2007, d’un système de corruption institutionnalisé dont le centre névralgique était le ministère de la planification, chargé des travaux publics.

Habituellement très médiatisée, la comparution de Mme Kirchner a été éclipsée lundi par des annonces économiques du chef de l’Etat, Mauricio Macri, qui lui a succédé fin 2015.

Immunité

Elue sénatrice en octobre 2017, Cristina Kirchner est protégée par une immunité parlementaire qui la met à l’abri d’un placement en détention. Elle peut toutefois être convoquée par la justice, mise en examen, jugée et condamnée. Dans ce dernier cas, il faudrait que la majorité des sénateurs vote la levée de son immunité pour qu’elle soit incarcérée.

Carlos Menem, président de 1989 à 1999, coule des jours heureux en Argentine après avoir été condamné à 7 ans de prison dans une affaire de contrebande d’armes. A 88 ans, il a été réélu sénateur l’an dernier.

Le juge Bonadio a déjà expédié en prison une dizaine de fonctionnaires du ministère de la planification. Parmi eux, le vice-ministre Roberto Baratta, dont le chauffeur Oscar Centeno a révélé les remises de sacs d’argent dans un cahier. Le juge Bonadio n’a pas eu besoin de signer un mandat d’arrêt contre le ministre de la planification Julio De Vido, ni contre le vice-ministre Julio Lopez. Tous deux se trouvaient déjà en prison dans le cadre d’autres affaires. L’arrestation de Julio Lopez, en juin 2016, avait été rocambolesque. Il avait été pris en flagrant délit alors qu’il tentait de dissimuler 9 millions de dollars en liquide dans un couvent près de Buenos Aires.

Lors de sa précédente convocation dans le cadre des « cahiers de la corruption », le 13 août, Mme Kirchner avait demandé la récusation du juge Bonadio. Elle dénonce une « persécution politique » et compare son cas à celui de son homologue brésilien Lula.

Sept fois chez le juge

Depuis qu’elle a quitté le pouvoir en décembre 2015, Mme Kirchner a été mise en cause dans six dossiers. Dans cinq affaires, Bonadio est le juge d’instruction. Elle a ironisé sur le fait que le juge Bonadio la convoquait « pour la septième fois ».

Le 26 février prochain, elle sera jugée pour une affaire d’irrégularités dans l’attribution de marché public pour la construction de routes dans la province de Santa Cruz, en Patagonie. Julio de Vido et José Lopez seront sur le banc des accusés avec elle.

Dans la perspective de l’élection présidentielle d’octobre 2019, Mme Kirchner, 65 ans, est la principale figure de l’opposition à Mauricio Macri, qui a annoncé qu’il briguerait un second mandat.

Dans le scandale des « cahiers de la corruption », outre des membres de l’administration Kirchner, la justice a pour la première fois épinglé une trentaine de chefs d’entreprises. La plupart ont reconnu avoir versé de l’argent en liquide à des fonctionnaires et accepté de collaborer avec la justice, en échange d’une remise en liberté.