Dans une rue de Rabat, au Maroc, en novembre 1999. / ABDELHAK SENNA / AFP

La convocation de plusieurs journalistes et patrons de presse marocains à Paris, dans le cadre d’une plainte pour « injures » déposée par un opposant marocain, a soulevé une polémique dans le royaume, avec des flots de commentaires, mercredi 5 septembre, dans la presse locale. Cette convocation vise plusieurs journalistes et patrons de presse, dont Habib El Malki, président de la chambre des députés et figure de la vie politique marocaine, en sa qualité de directeur de publication du groupe de presse de son parti politique (USFP, centre gauche), qui édite les quotidiens Libération et Al-Ittihad Al-Ichtiraki.

Le ministère marocain de la justice a officiellement protesté, lundi, auprès du magistrat de liaison de l’ambassade de France, dénonçant « le non-respect de l’accord judiciaire entre les deux pays », selon un responsable au ministère joint mercredi par l’AFP. Au cœur du débat, une lettre de convocation à des fins de mise en examen adressée par un juge d’instruction du tribunal de grande instance de Paris, qui a été envoyée directement aux intéressés au lieu de « passer par les canaux diplomatiques puis par le ministère marocain de la justice », selon la même source.

« Une humiliation pour la justice marocaine »

La convocation fait suite à une plainte pour « injures » avec constitution de partie civile déposée par Mustapha Adib, un ancien capitaine devenu un farouche opposant du roi Mohammed VI après avoir été condamné à deux ans et demi de prison, dans les années 1990, pour, selon lui, avoir dénoncé la corruption au sein de l’armée marocaine. Agé de 49 ans, il vit aujourd’hui en France.

En 2014, il avait fait parler de lui quand il avait remis une lettre vindicative au général marocain Abdelaziz Bennani (depuis décédé), qui était alors hospitalisé dans l’établissement militaire du Val-de-Grâce, à Paris. Les journalistes marocains visés par sa plainte pour injures avaient à l’époque dénoncé un « acte profondément indigne », une « agression immorale » qui « tend à la barbarie ».

La loi française sur la presse autorise les poursuites contre des médias étrangers dans la mesure où ils sont diffusés en France. « La justice française viole la souveraineté marocaine », titrait mercredi le quotidien Al-Ahdath Al-Maghribia, tandis que le journal Al-Akhbar évoquait « une humiliation pour la justice marocaine et une atteinte à la souveraineté du Maroc ».

« L’affaire Adib va-t-elle réveiller les vieux démons franco-marocains ? », s’interroge de son côté le site d’information Le Desk, en référence aux tensions ayant marqué les relations entre Paris et Rabat, en 2014, en lien avec différents dossiers judiciaires.