Elon Musk, PDG de Tesla, en juin 2018. / Kiichiro Sato / AP

Buvant du whisky et fumant du cannabis lors d’une interview déjantée, Elon Musk, le charismatique PDG de Tesla, a provoqué la stupeur vendredi 7 septembre, renforçant les doutes sur sa capacité à diriger le constructeur de véhicules électriques à un moment crucial de son histoire.

Dans le même temps, l’exode des dirigeants se poursuit au sein de l’entreprise, avec le départ cette semaine du chef comptable, un mois seulement après son arrivée, et de la directrice des ressources humaines. A Wall Street, le titre a perdu 6,30 %, à 263,24 dollars, un plus bas en cinq mois.

Question sur le discernement

Dans la nuit de jeudi à vendredi, le milliardaire de 47 ans s’est confié pendant près de deux heures à l’animateur Joe Rogan lors d’une émission suivie par environ 90 000 personnes sur internet. « Je ne pense pas que vous voudriez être à ma place, vous n’aimeriez pas tellement », a-t-il lancé. « Cette interview soulève des questions supplémentaires sur le discernement d’Elon Musk », estime le site d’informations financières TheStreet.com.

En août, Elon Musk avait révélé son état d’intense fatigue et de stress lors d’un entretien au New York Times, qui le décrivait comme « passant du rire aux larmes » au cours de la conversation. « C’est peut-être mièvre mais, pour moi, l’amour est la réponse. Passez plus de temps avec vos amis et moins de temps sur les réseaux sociaux », a enjoint jeudi soir aux internautes ce grand adepte de Twitter.

Entre deux questions, le patron de Tesla sirotait un verre de whisky et a tiré sur un joint que l’animateur lui a proposé. « Je ne fume presque jamais d’herbe », a-t-il dit. « Je trouve que ce n’est pas bon pour la productivité, c’est un peu l’inverse d’une tasse de café ». La consommation de cannabis est légale en Californie.

« Ignorez le bruit »

Vendredi, au lendemain de cette interview, Elon Musk a publié un texte sur le site de Tesla pour faire part de son enthousiasme à ses salariés : « Nous sommes sur le point de connaître le trimestre le plus incroyable de notre histoire, en livrant plus de deux fois plus de voitures qu’au dernier trimestre ». « Pendant un moment, il y aura beaucoup de bruit et d’agitation dans les médias. Ignorez-les, simplement », leur dit-il aussi, promettant « la croissance la plus époustouflante de l’histoire de l’industrie automobile ».

Ces dernières semaines, des salariés ont raconté le trouver souvent endormi à leur arrivée à l’usine, où il passe des nuits pour veiller à ce que le groupe atteigne les objectifs de production du « Model 3 », le véhicule d’entrée de gamme – 35 000 dollars de base – censé transformer Tesla en constructeur de masse.

M. Musk a également relancé ces derniers jours la polémique avec le spéléologue britannique Vernon Unsworth, qu’il avait accusé de pédophile en juillet. Ce dernier l’avait menacé de poursuites judiciaires.

Les interrogations sur sa fragilité mentale sont venues s’ajouter aux doutes des investisseurs sur la capacité de Tesla à remplir ses objectifs de production, alors même que le groupe n’a jamais dégagé de bénéfice sur une année entière en quinze ans d’existence et brûle presque un milliard de dollars par trimestre.

Tempête boursière

La société a vu plus d’un cinquième de sa capitalisation boursière partir en fumée depuis un tweet du 7 août envoyé par Elon Musk, évoquant un retrait prochain de la cote de Tesla et assurant qu’il disposait du financement pour réaliser cette opération. Cela a engendré une tempête autour du groupe, le gendarme de la Bourse, la SEC, ouvrant une enquête. M. Musk avait annoncé le 24 août qu’il renonçait à son projet.

Des investisseurs et des financiers ayant parié sur l’effondrement du titre Tesla ont déposé plainte, accusant Elon Musk de manipulation de cours, tandis que l’enquête de la SEC se poursuit.

Tesla doit également composer avec des départs sans précédent de managers, près d’une cinquantaine lors des deux dernières années. Dave Morton, le chef comptable, a remis sa démission le 4 septembre, un mois seulement après son embauche. Gabrielle Toledano, la directrice des ressources humaines, a également quitté le groupe cette semaine.

Tesla a toutefois procédé à de nouvelles nominations vendredi, notamment celle de Jerome Guillen, déjà au sein du groupe depuis plusieurs années, nommé président des activités automobiles.