A lire leur argumentaire commercial, la Surface Go de Microsoft et l’iPad d’Apple ont l’ambition démesurée de nous accompagner du lever au coucher. Le stylet de ces tablettes ferait merveille dans nos instants créatifs, leur clavier azerty permettrait d’écluser rapidement une pile de travail de bureau. Et une fois détachées de leur clavier, ces petites tablettes 10 pouces seraient idéales pour se détendre dans un canapé. La nouvelle Surface Go 64 Go et l’iPad 128 Go millésime 2018 coûtent tous deux environ 450 euros, mais la facture grimpe à 650 euros lorsqu’on inclut stylet et clavier, précieux accessoires d’une machine à tout faire.

Si ces deux tablettes sont très ressemblantes, elles divergent en un point : le logiciel central qui leur prête vie est très différent. L’iPad s’appuie sur iOS, un logiciel uniquement destiné aux tablettes, alors que le Windows qui équipe la Surface a deux personnalités : côté pile, la tablette, côté face, l’ordinateur. Windows accepte, en effet, les applications tactiles conçues pour être pilotées au doigt comme les logiciels classiques contrôlés à la souris, accessoire banni de l’iPad. La Surface Go est disponible depuis le 28 août, l’iPad depuis avril. Ces produits tiennent-ils leurs promesses ? Lequel des deux est le plus adapté à vos besoins ?

Pour la bureautique ordinaire

Notre préférence : plutôt l’iPad

Le travail est globalement plus agréable sur iPad : ses menus sont nettement plus fluides et réactifs, ainsi que beaucoup plus clairs. Mais dans les deux cas, la Surface Go comme l’iPad font parfaitement ce qu’on attend d’eux, qu’il s’agisse de rédiger des documents simples, de gérer des e-mails ou de chercher des informations sur Internet. Encore faut-il éviter de leur en demander trop, par exemple en ouvrant vingt sites Web simultanément.

Ces deux appareils ont le même atout rare : un stylet. Ce serait une erreur de croire qu’il ne sert qu’à dessiner, car c’est une invitation à travailler différemment. Ce stylet permet de saisir des schémas, de surligner, d’entourer, d’écrire aux quatre coins de la page. Il transforme les notes et séances de brainstorming en documents plus vivants et plus lisibles le lendemain.

Le stylet permet de prendre des notes qui ne ressemblent pas du tout à celles qu’on prend sur clavier. / NICOLAS SIX / LE MONDE

L’iPad et la Surface ont toutefois le même défaut : leur taille nuit à leur confort. Leur écran est trop petit, leur clavier trop étroit. Au bout de quelques heures, les cervicales et les poignets risquent de souffrir. Privé de souris, l’iPad peut aussi endolorir l’épaule : il faut régulièrement lever le bras pour interagir avec l’écran. Le clavier de l’iPad – un Logitech Slim Folio conseillé sur la boutique américaine d’Apple – ne permet pas de choisir l’inclinaison de l’écran, ce qui nuit à son confort. La Surface, elle, permet de choisir n’importe quel angle, ce qui améliore le confort dans les espaces exigus comme les trains. Laquelle préférer ? Les besoins varient énormément d’un professionnel à l’autre et d’un étudiant à l’autre. Tout dépend de votre usage.

Pour les logiciels professionnels pointus

Notre préférence : plutôt la Surface

Beaucoup de professions utilisent des logiciels spécialisés – conception 3D, gestion comptable, etc. Le logiciel de référence est généralement disponible sur Windows, mais plus rarement sur iPad. Et lorsque ce logiciel est décliné sur iPad, il est parfois appauvri, à l’image de Word, moins riche sur iOS que sur Windows : seules les fonctions essentielles sont conservées.

Les professionnels sont loin de tous utiliser des logiciels pointus, mais au cours d’une carrière – ou d’un cursus universitaire –, on ignore souvent ce que l’avenir nous réserve. Voilà pourquoi la polyvalence de la Surface rassure.

Au second plan, Word sur iPad est appauvri par rapport à la version Windows, devant. / NICOLAS SIX / LE MONDE

La faiblesse du catalogue de logiciels professionnels dont souffre l’iPad risque de ne pas être corrigé de sitôt : convertir un logiciel PC pour tablette est difficile. Beaucoup de programmes professionnels affichent une forêt de boutons qu’une tablette peine à afficher, puisque ses boutons à elle sont élargis – nos doigts étant moins précis qu’un curseur de souris. La solution peut venir d’un grand écran externe. Malheureusement, s’il est possible de raccorder un iPad à un moniteur, ses menus tactiles sont alors impossibles à piloter faute de souris. La Surface, elle, peut parfaitement être raccordée à un grand écran grâce à un adaptateur facturé une centaine d’euros supplémentaires. C’est même un investissement intelligent, car l’écran 10 pouces de la Surface est trop petit pour être confortable lors de longues sessions de travail.

Malheureusement, le cœur de la Surface n’est guère vaillant. Dans la moyenne basse des PC, il est bien moins puissant que celui de l’iPad et peine à faire tourner fluidement les logiciels professionnels les plus gourmands, comme les outils de conception 3D par exemple. C’est dommage pour les professionnels qui utilisent ce type de logiciel de manière intensive : ils ne pourront pas faire de la Surface leur unique ordinateur.

Pour la création numérique

Match nul

Que ce soit pour le graphisme, la photo, la vidéo ou d’autres métiers créatifs, l’iPad propose un immense catalogue d’applications. En cherchant bien, on trouve toujours une application d’excellente qualité qui permet d’ébaucher un projet, mais bien souvent, il faut le terminer sur ordinateur. Les applications professionnelles de référence comme Illustrator ou Photoshop sont rarement disponibles sur iPad. C’est gênant lorsque l’on présente un projet à un client : impossible de le modifier devant lui.

L’iPad souffre aussi d’un problème de mémoire. Nous avons refusé de sélectionner le modèle basique doté de 32 Go, tant le risque est grand de saturer rapidement cet espace. Mais même avec les 128 Go de l’iPad sélectionné, les professionnels de la création numérique risquent de manquer de mémoire. La Surface Go retenue n’offre, il est vrai, que 64 Go d’espace, mais contrairement à l’iPad, on peut facilement l’étendre grâce à une carte mémoire externe.

En outre, lorsqu’on branche l’iPad sur un ordinateur pour transférer des documents, le logiciel iTunes s’interpose et rend l’opération pénible. Le transfert de documents est beaucoup plus facile avec la Surface.

Ces défauts vieux comme l’iPad sont regrettables, car son potentiel créatif est remarquable. Son cœur rapide raccourcit les temps de calcul, son stylet est particulièrement agréable pour dessiner. On peut l’incliner pour obtenir un trait plus large et un grain moins dense, un peu comme avec un vrai crayon.

Le stylet de la Surface, lui, est parfaitement utilisable pour dessiner, mais il amoindrit les possibilités artistiques du dessinateur. Il est moins sensible à la pression, son trait est moins fin. On peut théoriquement l’incliner pour élargir ce trait, mais les applications qui détectent l’inclinaison sont très rares. En outre, sous Windows, le choix d’applications créatives est nettement moins riche que sur iPad, même s’il est loin d’être inexistant. En dessin par exemple, on trouve Bamboo Paper, Sketchable, Sketchbook d’Autodesk, Expresii, etc.

Pour se détendre

Notre préférence : plutôt l’iPad

Le catalogue d’applications tactiles Windows est très pauvre comparativement à celui de l’iPad. Mais pour se divertir, l’essentiel est là : Spotify, Netflix, VLC, Facebook, etc. La plupart des utilisateurs devraient s’en contenter, quitte à être frustrés de temps en temps par l’absence sur Windows d’une application prometteuse sur iPad.

Beaucoup de professionnels et d’étudiants patientent jusqu’à la fin de la journée pour se détendre. Voilà qui donne un clair avantage à l’iPad, dont la batterie tient dix heures en usage moyen. Pour se détendre avec la Surface, dont la batterie ne tient que sept heures en moyenne, il faut souvent trouver une prise de courant.

La Surface Go est presque aussi fine et légère qu’un iPad. / NICOLAS SIX / LE MONDE

Qui plus est, les menus de la Surface Go n’incitent pas à la détente, même lorsqu’on presse le bouton « mode tablette » et qu’on s’enfonce dans un canapé. La majorité des utilisateurs, même habitués à Windows, les trouveront inutilement compliqués. Aux quatre coins de l’écran, les boutons sont trop petits, trop nombreux. Quant aux raccourcis gestuels, ils sont abscons.

Enfin, la Surface est un peu plus lourde que l’iPad : elle accuse 50 grammes de plus. Mais avec 522 grammes sur la balance, hors clavier, elle reste confortable. Et côté jeux, tout le monde trouvera de quoi se détendre : l’iPad possède un grand catalogue de jeux tactiles, la Surface fait tourner beaucoup de petits jeux PC. Et malgré sa puce graphique modeste, quelques bons jeux 3D un peu âgés tournent fluidement également en réglages moyens, comme Battlefield, Overwatch ou Dota 2.

La nouvelle Surface Go 64 Go et l’iPad 128 Go millésime 2018 coûtent tous deux environ 450 euros, mais la facture grimpe à 650 euros lorsqu’on inclut stylet et clavier. / NICOLAS SIX / LE MONDE

En conclusion

La Surface est un meilleur ordinateur à tout faire, mais l’iPad s’avère bien plus agréable en bureautique légère et en loisir. Comme outil de travail, ces deux tablettes souffrent de faiblesses dissuasives, à commencer par leurs écrans, trop petits pour être vraiment confortables. Cela n’empêchera pas certains professionnels et certains étudiants d’y trouver un compromis satisfaisant.

L’iPad est peut-être pour vous si :

  • Vous travaillez rarement plus de deux heures d’affilée sur un bureau ;
  • Vos besoins en logiciels ne risquent pas d’évoluer ;
  • Vous êtes un as du dessin ;
  • La sérénité passe avant tout.

La Surface est peut-être pour vous si :

  • Vous êtes très nomade ;
  • Les menus façon « sapin de Noël » ne vous font pas peur ;
  • Vous avez besoin des mêmes logiciels pointus que vos pairs ;
  • Vous voulez pouvoir transformer votre tablette en ordinateur de bureau.