L’abattoir de Mauléon-Licharre, aussi appelé abattoir du pays de Soule, avait vu son agrément sanitaire suspendu pendant deux mois après les révélations de L214. / IROZ GAIZKA / AFP

Six mois de prison avec sursis ont été requis mardi 18 septembre au tribunal correctionnel de Pau contre l’ex-directeur de l’abattoir de Mauléon (Pyrénées-Atlantiques), deux ans et demi après la diffusion d’images chocs de mauvais traitements envers des animaux.

La peine requise correspond aux accusations de « tromperie sur la nature, la qualité, l’origine ou la quantité » de la viande, un délit passible de deux ans de prison et de 300 000 euros d’amende. La maltraitance animale, dont répondaient l’ex-directeur et trois employés, n’est punie que d’amendes, que le parquet a réclamées à des degrés divers pour « mauvais traitements » contre les quatre hommes.

Délit de tromperie

« Ce n’est pas le procès d’Alès, il ne s’agit pas d’actes de cruauté », a déclaré Orlane Yaouanq pour le ministère public, en référence au procès concernant les abattoirs d’Alès et du Vigan (Gard) ayant entraîné une condamnation à huit mois de prison avec sursis pour actes de cruauté. « Il n’y aurait pas le délit de tromperie, nous serions devant le tribunal de police. Il n’y a pas eu de volonté délibérée de causer des souffrances des animaux. Cela ne veut pas dire qu’ils n’ont pas souffert », a-t-elle encore dit.

Trois employés, l’ex-directeur et l’établissement en tant que personne morale, étaient jugés pour « mauvais traitements infligés sans nécessité à un animal domestique », une accusation qu’ils ont âprement contestée lors des deux jours d’audience.

L’affaire avait éclaté en mars 2016 avec la diffusion de vidéos prises en secret à l’abattoir de Mauléon, des images difficilement soutenables montrant des animaux mal étourdis, des moutons saignés encore conscients, voire un agneau écartelé vivant. Devant une salle comble, remplie d’amis, de famille et d’éleveurs, les employés ont plaidé un manque de personnel, du matériel défaillant et des consignes parfois peu strictes de leur direction. « La cadence, on la subissait », a déclaré lundi 17 septembre l’un d’eux, en évoquant les lourds horaires d’une période — avant Pâques — particulièrement chargée.

La direction avait contesté ces accusations, évoquant une situation de « petit » abattoir et la difficulté à trouver du personnel qualifié dans un pays où il n’existe pas de formation spécifique. Dix parties civiles, dont L214, la SPA ou la Fondation Brigitte-Bardot, ont demandé une condamnation et des amendes allant de 1 euro symbolique à 5 000 euros solidaires pour les quatre salariés prévenus.

Deux cents infractions constatées

L’abattoir de Mauléon traite 30 000 tonnes de viande par an et emploie trente-cinq salariés. Son agrément sanitaire avait été suspendu pendant deux mois après les révélations, le 29 mars 2016. Avec les vidéos de L214, « on a pu avoir un œil sur ce qui se passait dans les abattoirs », a plaidé Christophe Arcaute, pour l’association Animal Cross.

Une partie des vidéos de L214, d’une durée totale de deux heures et demie, a été projetée à l’audience. Durant le procès, les services vétérinaires, qui ne sont pas en cause dans l’affaire, ont été poussés dans leurs retranchements pour expliquer les quelque deux cents infractions constatées sans fermeture de l’abattoir.

« Oui, potentiellement on avait les moyens d’intervenir, mais je n’avais pas de documents officiels pour m’y appuyer », a justifié Philippe Barret, chef de service abattoirs et sous-produits de la direction vétérinaire départementale. « On aurait dû avoir plus de fermeté », a-t-il répété, sans donner plus d’explications précises. Le jugement devait être mis en délibéré.

Que se passerait-il si tout le monde était végan ?
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