Emmanuel Macron lors de l’annonce de son plan santé, à Paris, le 18 septembre. / AFP

Editorial du « Monde ». Après le plan pauvreté, Emmanuel Macron a posé une nouvelle pierre à la construction de « l’Etat-providence du XXIe siècle », en présentant, mardi 18 septembre, sa stratégie de transformation du système de santé. De l’organisation de la médecine de ville à celle de l’hôpital, cette réforme, la plus ambitieuse depuis 1958, déclinée en 54 mesures, n’est pas, selon la formule du président, un « énième petit pas ». Elle entend restructurer le système de santé « pour les cinquante années à venir ». M. Macron a pris conscience du « mal-être » qui s’est manifesté ces derniers mois par l’accumulation des crises dans les services d’urgence et des grèves dans les hôpitaux psychiatriques. « L’hôpital, a reconnu le chef de l’Etat, est au bout de ce qu’il peut faire pour pallier notre désorganisation collective » et il « risque l’implosion ».

En faisant de l’accès aux soins « la priorité des priorités », en luttant contre les déserts médicaux, en plaçant le patient au centre du système, en supprimant le numerus clausus pour former plus de médecins, en privilégiant la prévention et la qualité des soins de proximité, le plan affiche des intentions salutaires. Dès 2019, 400 postes supplémentaires de médecin généraliste seront salariés par des centres hospitaliers de proximité ou des centres de santé situés dans des déserts médicaux. M. Macron a choisi une méthode incitative, récusant la contrainte qualifiée de « réponse fallacieuse ». D’ici au 1er juillet 2021, des communautés territoriales de santé, c’est-à-dire des réseaux de professionnels libéraux, devront couvrir tous les territoires pour répondre aux urgences non vitales afin de désengorger l’hôpital. Entre 20 000 et 100 000 patients devraient être concernés d’ici à 2022.

Une autre innovation majeure est la création d’assistants médicaux, des « aides-soignants de ville » qui épauleront les médecins généralistes ou spécialistes en les déchargeant d’actes simples concourant à la prise en charge du patient. Cela devrait permettre, en mettant en place ce dispositif dès 2019, de gagner entre 15 % et 20 % de temps médical. « L’objectif du quinquennat, a indiqué M. Macron, doit être d’en déployer 4 000. Ce qui représenterait un gain de temps médical équivalant à près de 2 000 médecins supplémentaires. » Quant aux activités hospitalières, elles seront réorganisées avec une répartition des établissements en trois catégories : soins de proximité, soins spécialisés, soins ultra-spécialisés. Le chef de l’Etat a aussi affiché sa volonté de « réinvestir le dialogue social sur les organisations du travail et le développement des compétences ».

Le « changement de paradigme » se veut plutôt consensuel. Il sera suivi d’une loi santé que la ministre, Agnès Buzyn, doit présenter dans quelques mois. Pour montrer sa volonté de passer des intentions aux actes, M. Macron l’a accompagné d’un geste positif. Il a décidé de relever l’objectif national des dépenses d’assurance-maladie (Ondam) de 0,2 point, à 2,5 % en 2019, soit 400 millions d’euros supplémentaires. D’ici à la fin du quinquennat, plus de 3,4 milliards seront consacrés au financement du plan. Pour la Fédération hospitalière de France, ce bonus représentera « à peine la moitié de l’effort d’économies demandé en 2018 aux hôpitaux ». Si la perspective d’une Sécurité sociale excédentaire se confirme, il sera sans doute opportun de desserrer davantage l’étau budgétaire.