Le logo d’Amazon sur son site de Boves (Somme), France, le 8 août. / Pascal Rossignol / REUTERS

Amazon s’affirme comme le principal rival de Google et de Facebook dans la publicité en ligne. Selon le cabinet eMarketer, le géant américain du e-commerce va devenir en 2018 le troisième acteur du marché aux Etats-Unis, dépassant Microsoft et Oath – la filiale médias de l’opérateur télécoms Verizon, qui a notamment racheté Yahoo! en 2017. Il reste cependant encore très loin des deux leaders, qui accaparent à eux seuls près de 60 % du gâteau.

« L’activité publicitaire d’Amazon continue d’augmenter à un rythme très élevé », souligne Nicole Perrin, analyste chez eMarketer. En 2018, son taux de croissance devrait atteindre 145 % aux Etats-Unis, d’après les dernières estimations du cabinet publiées mercredi 19 septembre. Ce taux doit cependant être relativisé car il s’explique en partie par un changement comptable. Pour 2019 et 2020, la croissance devrait donc être plus faible, mais tout de même au-delà des 50 %.

Amazon capte aujourd’hui 4,1 % de la publicité en ligne aux Etats-Unis, ce qui représente un chiffre d’affaires annuel de 4,6 milliards de dollars (3,9 milliards d’euros). En 2020, sa part de marché devrait atteindre 7 %, soit près de 11 milliards de dollars, à condition d’étendre son offre pour les annonceurs, estime Mme Perrin. Google et Facebook perdront un peu de terrain, avec 56 % du marché. « Si l’écart va se réduire, le duopole va perdurer », prédit l’analyste.

Amazon propose principalement des annonces sponsorisées

L’e-marchand de Seattle affiche des publicités depuis plusieurs années. Mais il est récemment passé à la vitesse supérieure, attiré par des marges très élevées. Amazon propose principalement des annonces sponsorisées, qui s’affichent en haut des résultats lorsqu’un internaute effectue une recherche pour acheter de la lessive, des couches, des écouteurs ou une perceuse. Comme chez Google, le système repose sur une mécanique d’enchères de mots-clés.

« La publicité est désormais une activité qui génère plusieurs milliards de dollars », se félicitait fin juillet Brian Olsavsky, le directeur financier d’Amazon. Sur les six premiers mois de l’année, dans les comptes d’Amazon, la division « autres », principalement composée des recettes publicitaires, a enregistré un bond de 135 % de son chiffre d’affaires, à 4,2 milliards de dollars. « L’activité est moins développée à l’international, mais elle progresse aussi à un rythme élevé », avait ajouté M. Olsavsky.

Pour les annonceurs, « Amazon permet de toucher des consommateurs prêts à passer à l’achat, à la différence de Google qui est davantage utilisé pour rechercher des informations sur un produit », note Pat Petriello, stratégiste au sein de l’agence marketing CPC Strategy. Cela se traduit par des taux de conversion et des retours sur investissements plus élevés. Le coût par clic, le prix payé à chaque fois d’un internaute clique sur une annonce sponsorisée, ne cesse ainsi de progresser.

Alors que le site marchand référence plusieurs millions d’articles, les publicités permettent de gagner en visibilité. « Il est crucial de figurer sur la première page de résultats, qui représente plus de 70 % des clics », assure M. Petriello. Mieux encore pour Amazon, plus il affiche d’annonces en haut de page, plus il devient important pour les marques de payer car les résultats non sponsorisés sont rétrogradés de plus en plus bas.

« Complexité de la plate-forme »

Dans la majorité des cas, ces résultats ne sont même plus visibles sans faire défiler la page vers le bas. Une situation potentiellement risquée mais qui ne suscite pas encore de révolte de la part des internautes. « Les dernières études montrent que la plupart des consommateurs ne font pas attention ou qu’ils n’ont pas conscience de cliquer sur une publicité », indique Todd Bowman, de l’agence Merkle.

Comme sur Google, l’achat de mots-clés est aussi utilisé par les annonceurs pour protéger leur marque. « Il est important de s’assurer que leurs rivaux n’apparaissent pas lorsqu’un internaute cherche leurs produits pour ne pas perdre des ventes », souligne M. Bowman. C’est ce que font L’Oréal, Kellogg’s, Pampers ou encore Gillette.

Malgré sa forte croissance, Amazon reste en retard dans certains domaines. « Beaucoup d’annonceurs se sont plaints de la complexité de la plate-forme, explique Mme Perrin. Amazon est en train de simplifier l’achat de publicités. » En outre, « ses outils pour les annonceurs doivent encore être améliorés et agrémentés de nouvelles options », estime M. Petriello.

La société est également peu présente sur le marché des bannières publicitaires. Elle ne dispose pas non plus d’un important réseau de sites Internet affichant ses publicités, l’une des forces de Google avec sa plate-forme Adsense. Selon l’agence Bloomberg, elle testerait un nouvel outil de reciblage publicitaire. « Les boîtiers de télévision, les enceintes connectées ou l’offre de streaming vidéo représentent d’autres opportunités pour afficher des publicités », estime par ailleurs M. Bowman.