Manuel Valls, le 26 septembre à Barcelone. / JOSEP LAGO / AFP

L’annonce était attendue depuis plusieurs semaines, Manuel Valls l’a officialisée, mardi 25 septembre : il est candidat aux élections municipales de mai à Barcelone, ville où il est né il y a cinquante-six ans. « Venir à Barcelone n’est pas une rupture, c’est le prolongement d’un même chemin, celui de l’Europe », a notamment déclaré l’ancien premier ministre français au cours de son discours au Centre de culture contemporaine de la cité catalane.

Pour la presse espagnole, la tâche s’annonce toutefois compliquée pour Manuel Valls. Sur la forme d’abord, tous les journalistes présents ont critiqué « le chaos » de l’événement — des journalistes et des invités n’ont pas pu entrer à cause d’une salle trop petite —, alors que M. Valls se présente comme « le candidat de l’ordre ».

Elargir sa base électorale

Sur le fond ensuite. El Mundo note que l’ancien chef de gouvernement s’est attaché à ne pas se montrer comme le candidat d’un seul parti, pour élargir sa base électorale. « Manuel Valls a tenté de mettre en avant ses idées et de prendre de la distance vis-à-vis de Ciudadanos », parti libéral qui avait proposé à l’ancien socialiste, il y a quelques mois, d’être son candidat aux municipales. D’après le quotidien, M. Valls s’est « efforcé de se poser comme un candidat “indépendant” en allant aux élections avec une “plate-forme citoyenne” ». Une stratégie qui n’est pas sans rappeler celle d’un certain Emmanuel Macron lors de l’élection présidentielle française de 2017.

S’il s’est présenté comme le candidat qui s’engagera contre « les populismes, les nationalismes et la démagogie », sur l’exacte ligne de Ciudadanos, M. Valls s’est d’ailleurs, en même temps, posé en « homme de gauche ».

El Pais relève également qu’un seul élu de Ciudadanos, le député régional Ignacio Martin Blanco, était présent dans la salle pour cette annonce de candidature. « L’absence de dirigeants de Ciudadanos a permis d’attirer l’attention des médias exclusivement sur Manuel Valls », selon le quotidien catalan La Vanguardia.

Autre point relevé par la presse espagnole au lendemain de ce discours : la volonté de M. Valls de se présenter en adversaire du mouvement indépendantiste près d’un an après le référendum d’autodétermination qui s’est tenu en Catalogne. Dans sa chronique pour ABC, le journaliste et écrivain espagnol Ignacio Camacho estime que la candidature de M. Valls « est bonne, car elle donne à la lutte contre le nationalisme une dimension qui transcende les frontières ».

Héritier de Pasqual Maragall

La presse revient aussi sur la doctrine de Manuel Valls. El Mundo lui a consacré un long portrait rappelant les différentes étapes de sa vie politique en France, tandis que le journaliste Carles Cols, sur le site d’El Periodico, met en avant le fait que l’ancien premier ministre « veut être le nouveau Pasqual Maragall », l’emblématique maire socialiste qui, de 1982 à 1997, fut un des grands artisans de la rénovation de la capitale catalane.

Ce n’est d’ailleurs pas un hasard, selon lui, si M. Valls a fait son annonce au Centre de culture contemporaine, créé sous la mandature de M. Maragall à la fin des années 1980. L’ancien socialiste s’est d’ailleurs entouré de Xavier Roig, chef de cabinet à la mairie de M. Maragall. Pour Carles Cols, Manuel Valls a, ni plus ni moins, l’intention de « faire une OPA sur l’héritage du margallisme ».

Dans El Periodico également, Albert Saez, le directeur adjoint du journal catalan, estime toutefois que M. Valls est « un héritier indigne de Maragall ». « Les gens ne confondent pas la copie avec l’original », écrit-il, qualifiant la personnalité du candidat de « despotique et arrogante ».

« Certains qui ont suivi le parcours de Manuel Valls dans la politique française savent qu’il ressemble à Maragall sur trois aspects : il est socialiste, il est barcelonais et il a été maire. Mais c’est tout. »

L’ambition de M. Valls d’être l’héritier politique de M. Maragall s’annonce d’autant plus compromise que le parti indépendantiste Gauche républicaine de Catalogne a décidé d’investir pour le scrutin municipal de mai Ernest Maragall, frère de Pasqual Maragall.