Allemagne, Australie, Etats-Unis, Irlande, et bientôt la France ? A l’étranger, si des enquêtes ont conduit à lever le voile sur des scandales d’abus sexuels dans l’Eglise, ce fut bien souvent sous l’impulsion de l’Etat. Dans sa pétition, Témoignage chrétien appelle les politiques français à faire de même en demandant l’ouverture d’une commission d’enquête parlementaire consacrée aux « crimes de pédophilie dans l’Eglise catholique ». « Seule une commission parlementaire a le pouvoir de faire la lumière sur le passé (…) en exigeant la communication des archives diocésaines, en interrogeant les acteurs et en communiquant à la justice les faits dont celle-ci n’aurait pas eu connaissance », précise l’appel de Témoignage chrétien.

« Dépolluer le sujet »

Dès dimanche 30 septembre, des élus ont signifié leur intention de s’emparer de cet appel. Valérie Rabault, chef de file des socialistes à l’Assemblée nationale et signataire de la pétition, a annoncé qu’elle proposera à ses collègues, mardi, que son groupe prenne l’initiative de lancer cette commission d’enquête. « Il y a deux questions, déclare au Monde Valérie Rabault. Est-ce qu’il y a en France des abus sexuels d’une ampleur équivalente à ce qu’on observe à l’étranger ? Si c’est le cas, le pouvoir politique doit s’interroger sur des silences tenus aussi longtemps dans l’Eglise. » Son homologue au Sénat, Patrick Kanner, « favorable à titre personnel » à la démarche se donne la semaine pour l’évoquer avec ses collègues sénateurs et les autres patrons de groupe. Les socialistes ne sont toutefois pas les seuls à envisager de rebondir à l’appel de Témoignage chrétien. Selon nos informations, le groupe communiste à l’Assemblée en débattra également mardi, de même que le groupe centriste UDI, Agir et indépendants. En revanche, les chances sont faibles que Les Républicains utilisent leur droit de tirage annuel pour cette question qui risque de ne pas « faire l’unanimité », explique-t-on au sein du groupe de droite.

La rapidité de la réaction des parlementaires pose cependant une question : pourquoi avoir attendu l’appel de Témoignage chrétien pour prendre une telle initiative ? « Il est vrai que nous aurions pu le faire avant, mais je crois qu’il est important que les parlementaires montrent qu’ils sont capables de répondre aux initiatives citoyennes », concède Mme Rabault. « C’est la bonne façon de procéder », ajoute Jacques Maire, député La République en marche signataire la pétition. Pour qui le fait que l’appel vienne de catholiques peut contribuer à favoriser la mise en place de la commission d’enquête. « Il est important que cet appel vienne d’abord de personnes qui ne peuvent pas être taxées de faire de l’anticatholicisme, cela dépollue le sujet dès le départ », ajoute-t-il. Pour l’heure, la majorité n’a pas donné de signe qu’elle s’emparera du sujet. Mais Jacques Maire l’assure : « On ne va pas le laisser sans réponse. »