La France a gelé mardi 2 octobre les avoirs de deux ressortissants iraniens et de la direction de la sécurité intérieure du ministère du renseignement iranien, attribuant à Téhéran la responsabilité d’un attentat déjoué à Villepinte (Seine-Saint-Denis) le 30 juin.

« Cet acte d’une extrême gravité envisagé sur notre territoire ne pouvait rester sans réponse », écrivent les ministres de l’intérieur, des affaires étrangères et de l’économie, respectivement Gérard Collomb, Jean-Yves Le Drian et Bruno Le Maire, dans un communiqué commun.

« La France a pris des mesures préventives ciblées et proportionnées sous la forme de l’adoption des mesures nationales de gels des avoirs de M. Assadollah Asadi et de M. Saeid Hashemi Moghadam, ressortissants iraniens, ainsi que de la direction de la sécurité intérieure du ministère du renseignement iranien », ajoutent-ils.

« Nécessité d’une approche exigeante avec l’Iran »

Cette mesure, valable pour une durée de six mois, s’est traduite par un arrêté publié mardi au Journal officiel.

Pour Jean-Yves Le Drian, cité dans le communiqué du gouvernement, « l’attentat déjoué à Villepinte confirme la nécessité d’une approche exigeante dans nos relations avec l’Iran ».

En juin, un « attentat terroriste » contre un rassemblement de l’opposition iranienne à Villepinte, près de Paris, a été déjoué grâce à l’arrestation à Bruxelles d’un couple d’origine iranienne en contact avec Assadollah Assadi, diplomate iranien interpellé en Allemagne. Il devrait être remis à la justice belge conformément à la décision rendue par un tribunal allemand lundi.

Téhéran a démenti toute implication et accusé le parti d’opposition présumé visé, les Moudjahidin du peuple, d’avoir monté toute l’affaire.

A la suite de ce projet d’attentat, les relations se sont tendues ces derniers mois entre Paris et Téhéran. Au début de septembre, la République islamique a, entre autres, accusé les autorités françaises d’avoir tardé à réagir après une manifestation de militants kurdes devant l’ambassade d’Iran à Paris dont des vitres ont été brisées par des jets de projectiles.

Durcissement des autorités iraniennes

Selon une note révélée à la fin d’août par Reuters, la France a par ailleurs recommandé à ses diplomates et représentants de reporter tout voyage en Iran en raison de risques sécuritaires et d’un « durcissement » des autorités iraniennes après le projet d’attentat déjoué de Villepinte.

Dans l’attente d’éclaircissements de la part de la République islamique, la nomination d’un ambassadeur de France à Téhéran – pour remplacer François Sénémaud nommé en juin représentant personnel d’Emmanuel Macron pour la Syrie – a quant à elle été mise en suspens.

« Je ne dirais pas qu’il y a un lien direct entre les deux, mais Téhéran nous a promis des éléments objectifs qui permettront de poursuivre nos relations diplomatiques telles qu’elles existent aujourd’hui dans les prochaines semaines », déclarait à la mi-septembre un conseiller d’Emmanuel Macron.

Sans faire l’objet d’« un » approfondissement véritable « la question de l’ambassadeur a été » mentionnée « lors de l’entretien entre Emmanuel Macron et le président Hassan Rohani la semaine dernière en marge de l’Assemblée générale de l’ONU ».

« Les éléments » factuels « promis par les autorités iraniennes n’ont pas » été transmis au président français lors de cet entretien, avait fait savoir l’Elysée. Le communiqué commun de mardi ne fait aucune mention de ces éléments.

Le projet d’attentat de Villepinte a également été abordé par le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, et son homologue iranien, Mohammed Javad Zarif, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies, l’occasion, selon un diplomate, d’« évoquer les soupçons très lourds qui pèsent sur les Iraniens et la gravité de ces soupçons. »

« Ce sont des soupçons très graves, mais on n’a jamais pensé que c’était un régime d’enfants de chœur », ajoute ce diplomate.

Onze personnes ont par ailleurs été interpellées mardi matin lors d’une opération antiterroriste visant une association musulmane chiite pro-iranienne siégeant à Grande-Synthe (Nord), dans la banlieue de Dunkerque. Mais, selon une source proche de l’enquête, il n’y a pas de lien avec le gel des avoirs.