Le Collectif ultras Paris, lors de PSG-Bâle au Parc des Princes, en octobre 2016. / FRANCK FIFE / AFP

Habitué à œuvrer dans l’ombre, Michel Besnard goûte assez peu d’être en pleine lumière. Le voilà pourtant propulsé en première ligne avec la réception des Serbes de l’Etoile rouge de Belgrade, mercredi 3 octobre, au Parc des Princes, lors de la deuxième journée de la phase de poules de Ligue des champions. Nommé en avril, le nouveau directeur de la sécurité du Paris-Saint-Germain est attendu au tournant, alors que le contexte de la rencontre inquiète les pouvoirs publics depuis plusieurs semaines.

L’Union des associations européennes de football (UEFA) a interdit aux supporteurs serbes, dont la frange dite « ultras » est l’une des plus violentes du continent, de faire le déplacement dans la capitale. Et ce, après de graves débordements, en août, lors du barrage qualificatif retour entre les Autrichiens de Salzbourg et l’Etoile rouge.

Le « parcage » visiteurs sera donc vide au Parc, dont la capacité d’accueil a été réduite à 40 000 places (contre 48 000 habituellement) en raison de la fermeture, décrétée par l’UEFA, de la tribune Auteuil. Une décision qui fait suite à l’utilisation de fumigènes et autres engins pyrotechniques par les ultras parisiens, le 7 mars, lors de l’élimination du PSG par le Real Madrid, en huitièmes de finale du tournoi.

« Bon compromis »

Néanmoins, le dispositif de sécurité a été renforcé avec une hausse significative du nombre de stadiers (de 1 000 à 1 200) et d’unités de forces de l’ordre. Car, si la vente de billets a été limitée dans la mesure du possible au territoire français, près de 2 000 supporteurs de l’Etoile rouge, issus de la diaspora serbe de l’Hexagone mais aussi de l’Europe entière, seront disséminés en tribunes pour le premier déplacement en Ligue des champions de leur club depuis la saison 1991-1992. « Cela va être le bordel avec un flux de personnes à gérer dans des tribunes non réservées aux visiteurs », prévient-on pourtant au Collectif ultras Paris (CUP).

Dans ce climat anxiogène, le commandant Michel Besnard, 54 ans, qui passe pour un « grand flic » chevronné, rompu aux missions délicates, a un rôle central. Après avoir gravi les échelons de la police et de l’administration durant trois décennies, cet ancien préfet a succédé au PSG à Jean-Philippe d’Hallivillée (2006-2017), l’un des artisans du plan de sécurisation dit « Leproux », en 2010, et opposé au retour des ultras au Parc, acté, en 2016, par la direction du club.

M. Besnard n’était pas le premier choix des dirigeants parisiens. Ces derniers auraient préféré recruter un autre « grand flic », Laurent Simonin, chef d’état-major à la direction de l’ordre public et de la circulation à la Préfecture de police de Paris et dont le nom est apparu dans l’affaire Benalla cet été. Mais sa demande de mise en disponibilité a été rejetée, en novembre 2017, par la commission de déontologie de la fonction publique.

Directeur délégué à la cellule interministérielle de crise à l’occasion des attentats de Paris (novembre 2015) et de Nice (juillet 2016), M. Besnard avait intégré, en 2012, le cabinet du directeur général de la police nationale en tant que chef de l’unité de coordination des grands événements. C’est à ce titre qu’il a été chargé de la sécurité de l’Euro 2016 ou du Mondial de handball, en 2017.

« Michel Besnard est un grand professionnel de la sécurité. Il a le sens de l’Etat et a travaillé deux, trois ans sur l’Euro 2016, assure le préfet Ziad Khoury, ancien directeur de la sécurité de l’Euro. Il connaît le milieu footballistique, ses codes, le comportement des supporteurs. »

Un autre élément explique la nomination de M. Besnard à la tête de la sécurité du PSG : sa proximité depuis 2002 avec Nicolas Sarkozy, supporteur historique du club et ami de son président qatari, Nasser Al-Khelaïfi. De 2007 à 2012, sous le mandat de « Sarko », M. Besnard a occupé le poste de directeur du groupe de sécurité de la présidence de la République.

« Besnard a l’oreille de Nasser »

« Besnard est un “Sarkoboy”, il vient de ce réseau, confie un fin connaisseur du PSG. Il réorganise le service sécurité du club en prenant des membres de la garde rapprochée de Sarkozy. Besnard a aussi l’oreille de Nasser et a son bureau en face du sien. Sa nomination est un bon compromis pour la Préfecture de police. »

Le principal dossier de M. Besnard – qui « préfère rester en retrait et ne donne jamais d’interview », selon le PSG – est la gestion du Collectif ultras Paris, ostracisé avant le rachat du club par Qatar Sports Investments, en 2011, et autorisé, sous condition, cinq ans plus tard à regagner le Parc des Princes pour réchauffer l’ambiance. « Il est pragmatique, à l’écoute, et a une bonne image », estime-t-on chez les ultras parisiens. « Besnard applique la feuille de route de Nasser et doit composer avec les ultras, instables », observe un proche du club.

Besnard doit également travailler avec l’influent Jean-Martial Ribes, directeur de la communication du PSG, à la manœuvre lors du retour en grâce des ultras, et former un tandem avec un ancien policier des renseignements généraux, Malik Nait-Liman. Ce dernier a été nommé en août « référent supporteurs » par le club après avoir servi d’intermédiaire avec le CUP. « Besnard apprend, observe, résume-t-on aux portes du PSG. Il doit éviter les situations conflictuelles avec les ultras. Quitte à parfois fermer les yeux. »