Voix d’orientation. Le Monde Campus et La ZEP, média jeune et participatif, s’associent pour faire témoigner lycéens et étudiants sur leurs parcours d’orientation. Cette semaine, Inès, 18 ans, qui vit à Epinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis) et débute ses études à l’université de Nanterre.

Quelques jours avant la rentrée, j’ai enfin été acceptée dans l’université et la filière que je voulais. Merci Parcoursup ! Mais toute cette histoire d’orientation m’a beaucoup stressée et me stresse encore.

Cet été déjà, j’ai passé toutes mes matinées sur le site de Parcoursup à attendre d’avoir une réponse positive, et donc un avenir dans un domaine qui me plairait : j’avais fait des vœux en rapport avec l’informatique, l’économie et la gestion. Ces domaines étaient plus ou moins vastes, car je n’en avais jamais fait auparavant, mais après des recherches, c’étaient ceux qui m’intéressaient le plus.

Sans réponse favorable sur Parcoursup, j’aurais dû prendre une année sabbatique malgré moi. Je n’arrêtais pas de me répéter que je n’avais pas envie de me lancer dans le monde du travail, de peur ne plus jamais pouvoir me réinscrire à la fac à cause d’un système de m… Mais j’ai eu la chance d’être constamment rassurée par ma famille et mes amis. Je n’ose même pas imaginer mon état sans leur soutien : Parcoursup aurait pu gâcher ces vacances, les plus belles de ma vie.

Plus de contraintes pour les « oui si »

Mais le stress ne s’est pas terminé avec l’obtention d’une place à la fac : j’ai été acceptée en mathématiques et informatique appliquées aux sciences humaines et sociales (Miashs) à Nanterre, mais avec l’intitulé « oui si ». Je savais que cette catégorie existait, et cela ne me dérangeait pas plus que ça. Sachant que mon niveau était moyen, avoir un « oui » ou un « oui si » m’importait peu.

Donc, au début, je ne voyais pas ça comme un handicap, je me disais que c’était un « oui » et que j’étais ravie de pouvoir intégrer cette université. Maintenant que je suis dedans, je vois ça d’un tout autre œil. Sûrement parce que les étudiants acceptés en « oui, si » ont plus de contraintes que ceux qui sont entrés avec un « oui ».

Lors de la conférence de prérentrée, j’ai tout de suite remarqué la différence : on aura plus de cours, on sera plus encadrés. Tous les étudiants étaient mélangés mais, vingt minutes après, on a demandé aux « oui » de quitter la salle. Il ne restait que les « oui si », et un fossé avec ceux qui venaient de sortir. On nous a annoncé que, pendant cette semaine de prérentrée, nous aurions des cours que les « oui » n’auraient pas, en petits groupes, comme une classe à part entière. Le fait qu’on soit traités ainsi ajoute forcément un stress, j’ai maintenant peur de ne pas être à la hauteur.

Pour la plupart d’entre nous, ce « oui, si » est péjoratif. On comprend « oui, t’es acceptée, mais t’es un peu plus nulle que les autres étudiants. Donc tu auras des cours en plus et tu devras redoubler d’efforts pour réussir… ». Bien sûr, c’est aussi positif : on nous donne notre chance et on nous offre des clés pour réussir. Mais tout ça parce qu’on serait plus nuls ?

Mêmes cours mêmes amphis

Aujourd’hui, ça fait déjà quelques semaines que les cours ont repris. Malgré le fait qu’on ait des heures en plus je me sens beaucoup mieux intégrée dans le système. Les cours supplémentaires, ce sont des maths, donc ça ne peut être que bénéfique. Et puis, au final, on a tous les mêmes cours vu qu’on a les mêmes amphis. Les « oui » et les « oui si » y sont mélangés et personne ne sait qui est qui.

Et puis je trouve que, socialement parlant, la semaine qu’on a eu en supplément a été plutôt instructive. Le jour de la « vraie » rentrée, on se connaissait déjà. On a tous été dans le même groupe de travaux dirigés (TD), réservés aux « oui si ». Mais nous seuls sommes au courant de ça ! C’est plutôt une bonne chose, en se disant qu’on est tous un peu nuls on n’a pas peur de prendre la parole ou de donner de mauvaises réponses, il n’y a aucun jugement.

Je n’ai toujours pas compris pourquoi il y avait des « oui » et des « oui si ». Tout ce que je retiens, c’est que j’ai été acceptée dans cette fac et que j’ai sans doute autant de chances de réussir que certains « oui ». Etre acceptée en « oui si », ça n’avait rien d’inquiétant finalement, mais cet intitulé met quand même beaucoup de pression sur nos épaules. Ce n’est sûrement pas l’effet escompté, mais c’est l’effet ressenti.

La zone d’expression prioritaire (ZEP) accompagne la prise de parole des 15-25 ans

La zone d’expression prioritaire (ZEP) est un dispositif d’accompagnement à l’expression des jeunes de 15 à 25 ans par des journalistes professionnels. Par l’intermédiaire d’ateliers d’écriture dans des lycées, universités, associations étudiantes ou encore dans des structures d’insertion, ils témoignent de leur quotidien et de l’actualité qui les concernent.

Tous leurs récits sont à retrouver sur Le Monde Campus et sur la-zep.fr.

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