Editorial du « Monde ». Les signes de l’accélération du réchauffement climatique sont toujours plus alarmants. L’année 2017 vient d’être classée comme l’une des trois années les plus chaudes de l’histoire moderne, les banquises polaires fondent à vue d’œil et font inexorablement monter le niveau des océans, tempêtes et sécheresses dévastatrices se multiplient, avec des effets de plus en plus inquiétants sur la biodiversité.

Les cris d’alarme sont toujours plus insistants pour mettre en garde contre les conséquences de ce dérèglement dont plus personne – du moins plus personne de sérieux – ne conteste qu’il résulte de l’activité humaine, des émissions de gaz à effet de serre et de l’augmentation incontrôlée des surfaces cultivées. Le dernier en date, lundi 8 octobre, est celui du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), qui a rendu public un rapport dont on veut croire qu’il n’est pas celui de la dernière chance.

Cette organisation, placée sous la tutelle du Programme des Nations unies pour l’environnement et de l’Organisation météorologique mondiale, a été créée en 1988 pour éclairer les décideurs et la communauté internationale sur la question climatique, c’est-à-dire sur la réalité du réchauffement, ses causes premières, ses impacts multiples, ainsi que sur les voies et moyens qui permettraient de l’endiguer ou d’en atténuer les effets. En trente ans, le GIEC a rendu cinq rapports d’évaluation (1990, 1996, 2001, 2007 et 2013) et trois rapports spéciaux (2000, 2012, 2013) avant celui qui vient de paraître.

Deux messages

Ce dernier s’inscrit dans le prolongement de l’accord de Paris, scellé en décembre 2015 dans le cadre de la COP21, qui a prévu de contenir l’élévation de la température moyenne de la planète « nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels ». Les experts du GIEC adressent deux messages essentiels aux décideurs mondiaux.

Le premier est catégorique. Les émissions de gaz à effet de serre liées aux activités humaines sont la cause principale du réchauffement climatique et celui-ci s’accélère : au rythme actuel, on aura franchi le seuil de 1,5 °C d’augmentation de la température mondiale entre 2030 et 2052. Et le GIEC évalue précisément, pour la première fois, la différence d’impact d’un réchauffement de 1,5 °C ou de 2 °C, d’ici à la fin du siècle, sur la fonte de la banquise, la hausse du niveau de la mer, l’augmentation des pluies torrentielles, l’intensité des vagues de chaleur, la pêche, les cultures ou la biodiversité.

Le second message est volontariste. Non seulement, martèlent les experts, il est vital d’éviter un réchauffement à 2 °C – point de non-retour pour la planète –, mais il est encore possible de le limiter à 1,5 °C et d’endiguer en partie ses conséquences désastreuses. Cela suppose, précise le GIEC, des transitions très rapides et sans précédent dans tous les domaines (industrie, agriculture, habitat, transports, incitations financières…). Bref, d’une manière ou d’une autre, un changement profond de modèle de développement.

Or, c’est bien là que le bât blesse. En dépit des déclarations d’intention de l’accord de Paris, conclu en 2015 et entré en vigueur en novembre 2016, aucun pays n’a mis en œuvre les mesures nécessaires à un infléchissement de ses émissions de gaz à effet de serre. La France pas plus qu’un autre, sans parler des Etats-Unis ou de la Chine. Tous les Etats, en réalité, pratiquent la politique de l’autruche. Coupables irresponsabilités.

Comprendre le réchauffement climatique en 4 minutes
Durée : 03:53