Dans la salle de l’Elysée-Montmartre, Gaspard Gantzer répond aux questions des journalistes après son premier meeting en vue des municipales de 2020. / MICHAEL ZUMSTEIN POUR « LE MONDE »

La facétie était dans l’adresse. Pour le lancement officiel de son mouvement Parisiennes, Parisiens, jeudi 11 octobre, Gaspard Gantzer a opté pour l’Elysée-Montmartre, une salle de concert dans le 18e arrondissement. Le choix du lieu était un clin d’œil de la part de celui qui a été chargé de la communication de François Hollande à l’Elysée, après avoir été le porte-parole de Bertrand Delanoë, élu de Montmartre avant de devenir maire de Paris.

Devant quelque 800 participants, M. Gantzer, qui codirige à 39 ans l’agence de communication 2017, s’est lancé dans la bataille de Paris. Tout en laissant planer le suspense sur sa décision d’être candidat, auquel il devrait mettre fin en mars.

Alors qu’Anne Hidalgo n’a pas encore appareillé son armada pour sa campagne, que les bataillons parisiens de La République en marche (LRM) sont suspendus au choix de l’Elysée pour la désignation de leur chef de file, que la droite n’a toujours pas de candidat, il veut profiter du trou d’air chez ses concurrents pour fédérer des troupes autour de lui.

Passer le Rubicon

A l’Elysée-Montmartre, l’ambiance était plutôt celle d’une fête entre amis que d’un meeting politique, avec un DJ à la platine, de la bière ou du vin au verre au bar. Mais sous couvert d’une réunion bon enfant, la soirée était aussi l’occasion pour certains convives politiques de passer le Rubicon. Parmi les participants figuraient ainsi plusieurs élus de gauche parisiens, prêts à soutenir M. Gantzer plutôt qu’Anne Hidalgo en 2020. Au premier rang desquels, Benjamin Djiane, ancienne « plume » de Manuel Valls au ministère de l’intérieur puis à Matignon. Adjoint à la sécurité et à la propreté auprès du maire (PS) du 3e arrondissement, Pierre Aidenbaum, M. Djiane a fait paraître, le 29 septembre, une tribune dans les colonnes du Parisien dans laquelle il critique l’« atmosphère de fin de règne » et la « succession de fiascos » à l’hôtel de ville de Paris.

Nommé depuis peu vice-président de Parisiennes, Parisiens, M. Djiane avait participé, à la fin d’août, à un dîner avec une quinzaine d’autres élus de la capitale autour de M. Gantzer dans le 13e arrondissement. Parmi eux figuraient des conseillers d’arrondissement membres de l’équipe municipale socialiste du 18e, dont Cédric Dawny, conseiller délégué à la jeunesse. Avant d’être élu en 2014, M. Dawny avait été directeur de cabinet de Myriam El Khomri, adjointe à la sécurité de Bertrand Delanoë. On pouvait également croiser José Baghdad, élu depuis 2008 sur la liste menée par Mme Hidalgo dans le 15arrondissement. Président du groupe PS à la mairie du 15e, M. Baghdad a démissionné de son mandat en mai pour « s’impliquer dans la campagne de Gaspard ».

M. Gantzer a également attiré dans son sillage des macronistes de la première heure. Parmi eux Zineb Mekouar, ancienne cheville ouvrière de l’équipe de campagne d’Emmanuel Macron. Cette jeune communicante avait notamment animé le premier meeting du candidat d’En marche ! à la Mutualité en juillet 2016. « J’ai avec Gaspard Gantzer une relation d’amitié qui s’est nouée lorsque j’ai été son élève à Sciences Po, confiait-elle jeudi. Je n’ai jamais cessé de discuter avec lui-même pendant la campagne d’Emmanuel Macron. »

Présent également Philippe Zaouati, ancien chef des « référents » parisiens de LRM jusqu’à sa démission en juin à la suite d’un différend avec Benjamin Griveaux. Ou le conseiller en communication Robert Zarader, visiteur du soir de François Hollande à l’Elysée, qui avait conseillé Emmanuel Macron pendant sa campagne. Jeudi, M. Zarader se montrait encourageant envers M. Gantzer. « C’est un pari difficile, mais il peut construire des ponts avec beaucoup de gens : Anne Hidalgo, Bertrand Delanoë, les équipes du président de la République… », confiait-il à quelques journalistes.

« Tout électrique d’ici à 2025 »

Lors de la soirée, M. Gantzer a présenté quelques-unes des propositions qui vont structurer son projet pour 2020. Il a évoqué notamment un « plan massif en direction des personnes âgées », le passage aux transports « tout électrique d’ici à 2025 », et insister sur sa mesure phare : la suppression du périphérique, « cette plaie ouverte dans Paris qui pollue la ville ». « Il nous faut une nouvelle frontière, il nous faut Paris en grand », a lancé M. Gantzer considérant que l’avenir du Grand Paris devait être « le premier débat des municipales ». 

Le jeune communicant a conclu son propos de manière sibylline : « Je ne sais pas où tout cela va nous conduire », a-t-il déclaré, « mais je sens qu’on a l’énergie pour reprendre les clés de la ville ». Dans la pénombre bruyante de la haute salle de l’Elysée-Montmartre, certains rêvaient à voix basse d’un scénario possible : « Macron pourrait très bien décider de ne pas investir de candidat LRM et labélliser ex post un rassemblement qui intégrerait les macronistes », entendait-on dans les rangs du mouvement.

Dans ce cas, M. Gantzer pourrait apparaître comme un candidat providentiel pour le chef de l’Etat. « On avance dans notre couloir. Sans nous soucier des autres. Il n’y aura ni marchandage ni ralliement », assurait en septembre le conseiller en communication. La course de fond ne fait que commencer.