Emmanuel Maurel dans son bureau de la Commission européenne, boulevard Saint-Germain à Paris. / BRUNO FERT POUR "LE MONDE"

Adieu Solférino. Une page longue de trente-sept ans se tourne au Parti socialiste (PS). Le parti a quitté, vendredi 12 octobre, son siège historique du 7e arrondissement de Paris, pour emménager à Ivry-sur-Seine, dans le Val-de-Marne.

Au-delà du symbole, le PS est aujourd’hui un parti à l’agonie, où les départs se sont multipliés ces derniers mois. Dernier en date : celui du député européen Emmanuel Maurel qui en a fait l’annonce vendredi dans une interview au Monde.

Lire l’éditorial du « Monde » : Le Parti socialiste à l’agonie

M. Maurel s’inscrit dans une longue hémorragie, commencée voilà un an et demi, qui a vu de nombreux ténors du PS – ayant parfois exercé des responsabilités gouvernementales sous François Hollande ou à la tête du parti – claquer la porte. Que ce soit pour un ralliement à Emmanuel Macron, la création d’un nouveau mouvement ou encore un retrait de la vie politique. Retour sur ces principaux départs.

  • Maurel et Lienneman se rapprochent de Mélenchon

La sénatrice PS, Marie-Noëlle Lienemann, le 11 septembre 2016 à La Rochelle. / XAVIER LEOTY / AFP

C’était attendu depuis plusieurs semaines et c’est un nouveau coup dur pour le Parti socialiste. Le député européen et leader de l’aile gauche du PS, Emmanuel Maurel, qui avait obtenu 19 % au dernier congrès, a décidé de quitter le parti. Et son constat est accablant :

« Le PS ne correspond plus à l’idée que je me fais du socialisme. Son but, c’est la défense des intérêts des gens modestes. La stratégie pour répondre à cet objectif, c’est le rassemblement des forces de gauche. Le PS a perdu de vue et l’objectif, et la stratégie. »

« Je n’annonce pas un départ, mais une scission, prévient-il. Aujourd’hui, je ne pars pas seul, mais avec de très nombreux militants, des centaines de cadres et d’élus sur l’ensemble du territoire. »

La sénatrice PS Marie-Noëlle Lienemann, autre figure de l’aile gauche du parti, devrait aussi officialiser son départ samedi, selon les informations du Monde. Les deux élus socialistes pourront alors se rapprocher de La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon à l’approche des élections européennes de mai 2019.

« Je suis pragmatique, explique M. Maurel. Jean-Luc Mélenchon a fait près de 20 % des voix à la présidentielle de 2017, son mouvement est en dynamique, son programme attractif. Il faut faire avec eux ce travail de convergences. » En septembre, M. Mélenchon avait d’ailleurs lancé un appel à cette aile gauche du Parti socialiste à l’occasion de l’université d’été du Mouvement républicain et citoyen :

«J’ai le cœur plein d’enthousiasme si vos chemins viennent en jonction des nôtres. Que finisse cette longue solitude pour moi d’avoir été séparé de ma famille (…) Mes amis, vous me manquiez. »
  • Valls, Le Drian, Collomb… Ils ont rejoint Emmanuel Macron

Le président de la République, Emmanuel Macron, et le ministre des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, le 11 octobre à Erevan. / LUDOVIC MARIN / AFP

Si une partie de l’aile gauche du Parti est en train de prendre son envol, son aile droite avait déjà rejoint l’écurie d’Emmanuel Macron durant la campagne présidentielle. Dans la foulée de sa victoire aux élections législatives dans l’Essonne, Manuel Valls avait ainsi annoncé en juin 2017 son départ du PS pour rejoindre La République en marche. Il est aujourd’hui candidat à la mairie de Barcelone, soutenu par le parti libéral espagnol Ciudadanos.

Autre poids lourd à avoir quitté le PS en 2017, l’ancien ministre de la défense de François Hollande Jean-Yves Le Drian. Il est aujourd’hui ministre des affaires étrangères dans le gouvernement d’Edouard Philippe.

Le gouvernement actuel compte plusieurs anciens membres du Parti socialiste : Christophe Castaner (relations avec le Parlement), Benjamin Griveaux (porte-parole) ou encore Olivier Dussopt, élu député sous la bannière socialiste en juin 2017 avant d’être écarté du PS à la suite de sa nomination au poste de secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’action et comptes publics. Sans compter Richard Ferrand, député PS sous l’ancienne législature et actuel président de l’Assemblée nationale, ou encore Gérard Collomb, ministre de l’intérieur démissionnaire.

L’ancienne secrétaire chargée de l’aide aux victimes (2016-2017), Juliette Meadel, a de son côté été radiée du PS en avril pour avoir annoncé son soutien à Emmanuel Macron dès le premier tour de l’élection présidentielle. « J’ai décidé de ne pas faire de recours. C’est un divorce par consentement mutuel », avait-elle expliqué.

  • Benoît Hamon a fondé Génération.s

A gauche du PS, si M. Maurel et Mme Lienemman souhaitent se rapprocher de Jean-Luc Mélenchon, Benoît Hamon a pris une route différente. Après avoir annoncé qu’il quittait le parti en juillet 2017 – six mois seulement après sa victoire à la primaire socialiste –, l’ancien ministre de l’éducation a fondé son mouvement, Génération.s. Il a notamment été rejoint par l’ancienne ministre déléguée à la famille, Dominique Bertinotti, le député Régis Juanico et le député européen Guillaume Balas.

Quelques mois plus tard, c’est au tour du Mouvement des jeunes socialistes (MJS) « de prendre son indépendance vis-à-vis du PS ». Dans une interview au Monde, en mars, la présidente du MJS, Roxane Ludy, a annoncé son départ ainsi que celui de nombreux militants chez Génération.s après « un désaccord politique ».

  • Delphine Batho veut relancer Génération écologie

Elle aussi faisait partie de l’aile gauche du Parti socialiste. L’ancienne ministre de l’écologie de François Hollande et députée des Deux-Sèvres, Delphine Batho, a quitté en mai le PS après vingt-quatre ans passés à Solférino.

Mme Batho a rejoint dans la foulée le mouvement Génération écologie dont elle vient de prendre la présidence. Avec de hautes ambitions : construire « un projet de l’écologie intégrale démocratique » ayant vocation à exercer le pouvoir, a-t-elle expliqué au Monde.

  • Ayrault, Vallaud-Belkacem, Pellerin… Ils ont arrêté la politique

Cécile Duflot, Najat Vallaud-Belkacem et la journaliste Solenn de Royer lors de conférence du Monde Festival, au Palais Garnier le 7 octobre. / ODHRAN DUNNE POUR LE MONDE

Ils ont tous fait parti d’un gouvernement durant le quinquennat de François Hollande. Mais tous ces anciens ministres se sont éloignés du Parti socialiste et de la vie politique. C’est notamment le cas de l’ancien premier ministre (2012-2014), Jean-Marc Ayrault, qui avait annoncé dès février 2017 qu’il renoncerait à tout mandat politique après la présidentielle. Il a toutefois été choisi par le président de la République, Emmanuel Macron, pour diriger la Fondation pour la mémoire de l’esclavage.

Après sa défaite aux législatives de 2017 à Villeurbanne (Rhône), Najat Vallaud-Belkacem, ancienne ministre de l’éducation, est partie dans le privé et travaille désormais chez Ipsos. Elle a également lancé une collection d’essais baptisée « Raison de plus », chez Fayard. Un temps pressenti pour être candidate au poste de première secrétaire du PS, elle avait finalement décidé de renoncer en début d’année, assurant n’avoir « jamais voulu d’une vie réduite à la politique ».

De son côté, Aurélie Filippetti, ancienne ministre de la culture (2012-2014), avait quitté le PS en décembre 2017. Elle avait annoncé quelques semaines après son ralliement à Génération.s, de Benoît Hamon. Mais dans une interview à Ouest-France, le 10 octobre, l’ancienne députée de Moselle a finalement annoncé qu’elle aussi se retire complètement de la vie politique.