Le Forum Alsace Tech-Unistra, jeudi 18 octobre, sera une première pour l’université de Strasbourg. / Unistra

Pas moins de 151 entreprises inscrites, quelque 4 000 étudiants et jeunes diplômés attendus. Le 11e Forum Alsace Tech-Unistra, organisé jeudi 18 octobre, est une première à l’université de Strasbourg (Unistra). Elle a pu s’appuyer sur l’expérience de dix ans du réseau Alsace Tech, qui compte 14 écoles d’ingénieurs, d’architecture et de management, comme le Centre d’études supérieures industrielles (CESI), l’Institut national des sciences appliquées (INSA), l’EM Strasbourg (école de management)… L’objectif ? Réunir le même jour, au même endroit, des entreprises et une grande diversité de profils d’étudiants et de diplômés, de bac +3 à bac +8, en quête d’emploi ou de stage.

Pour attirer l’attention des recruteurs, mieux vaut pouvoir évoquer une expérience en entreprise. Le curriculum vitae de Hida Tahboul, 25 ans, n’en manque pas. Après un DUT et une licence pro, tous deux en alternance, elle vient d’achever son master 2 en droit-économie-gestion, mention « management des projets et des organisations », spécialité qualité, en alternance également.

« Très à l’aise à l’oral », la jeune femme privilégie le contact direct – forum et job dating – pour sa recherche d’emploi. « Les entreprises misent de plus en plus sur les soft skills, plus faciles à révéler lors d’un échange qu’en déposant un CV », juge-t-elle. Confiante, elle pense que « Merck Millipore peut être intéressée par des projets que j’ai construits pendant mon master en alternance dans l’industrie pharmaceutique ».

« Depuis que nous sommes vraiment tournés vers le cognitif et le digital, nos recrutements ont beaucoup évolué »

Dans ce domaine, une dizaine de nouvelles entreprises ont réservé leur stand à l’INSA Strasbourg ou à la Halle des sports sur le campus de l’Esplanade. « Nous n’arrivions pas à les faire venir avant, lorsqu’il n’y avait que les profils de l’Ecole supérieure de biotechnologie, une petite école », commente Laure Keith, coordinatrice du forum. Nouvelles venues également pour cette onzième édition, une petite dizaine de start-up, invitées par l’Unistra. « Elles ont des besoins en recrutement, mais pas les moyens de payer une inscription », précise la coordinatrice. Parmi les offres que les entreprises proposent sur la plate-forme, les fonctions supports, comme la communication, les RH ou le juridique, sont présentes cette année.

Afin de mobiliser les étudiants sur ce forum, les composantes de l’université ont été incitées à les libérer au moins une demi-journée. Sur les 200 CV enregistrés sur la plate-forme, une dizaine de jours avant l’événement, 80 sont édités par des étudiants et de jeunes diplômés de l’Unistra. Les facultés de pharmacie, chimie, droit, langues, sciences économiques, sciences de la vie, physique et ingénierie, figurent parmi les plus représentées. Un ou deux CV concernent des étudiants en Staps, psychologie, sociologie et arts.

« Une approche des rapports humains »

« Même des chercheurs en sociologie sont devenus consultants en IA [intelligence artificielle], domaine où il est intéressant d’avoir une approche des rapports humains », réagit Claudine Queret, responsable du recrutement des stagiaires et des apprentis pour la branche conseil d’IBM, qui figure pour la première fois sur la liste des participants au forum. Outre les 1 800 recrutements prévus en 2018-2019, le géant de l’informatique recherche une vingtaine de personnes pour un gros projet impliquant la mise en place d’outils d’intelligence artificielle à Strasbourg. « Depuis que nous sommes vraiment tournés vers le cognitif et le digital, nos recrutements ont beaucoup évolué. Nous avons ainsi recruté des artistes designers ou graphistes, des linguistes, car l’une des difficultés de l’IA est de lui permettre d’interpréter le langage humain », illustre Claudine Queret.

L’entreprise Henkel, qui produit, par exemple, la colle servant à assembler les couches-culottes, sera aussi présente, pour la première fois, sur ce forum strasbourgeois. « Je voulais me rapprocher de l’Unistra, connue pour son expertise sur la partie chimique, lorsque j’ai appris qu’elle participerait au forum avec Alsace Tech », témoigne Lysella Guillot, directrice de recrutement France et Benelux chez Henkel. Passée par l’université, elle insiste sur l’intérêt des profils universitaires : « Des têtes bien faites, des jeunes plutôt livrés à eux-mêmes, dont la force et la capacité à sortir du cadre sont décuplées par rapport à ceux qui sont moulés et accompagnés dans les écoles de commerce. »

« Il y a eu beaucoup de progrès en matière d’insertion professionnelle » 

Celle qui est également chargée de cours en master 2 stratégies commerciales et politiques de négociations de l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne, se réjouit de « la tendance à ouvrir des formations en alternance à l’université ». En tant que responsable de recrutement, elle déplore toutefois « le peu de dialogue entre universités et entreprises ». Elle préconise de « caler le calendrier des stages de l’université sur celui des écoles de commerce, avec deux périodes allant de janvier à juin et juillet à décembre, puisque c’est sur ce rythme que fonctionnent les managers qui accueillent les jeunes » et « d’imposer des stages dès la licence ».

« Certaines licences les ont déjà intégrés dans leur maquette », commente Claire Piechowiak, conseillère d’orientation à l’Espace Avenir de l’Unistra. « De plus en plus de composantes proposent des unités d’enseignement dédiées à la découverte des métiers, la recherche de stages ou encore aux visites d’entreprises. Une personne travaille à temps plein sur le développement de l’alternance. Il y a eu beaucoup de progrès en matière d’insertion professionnelle des étudiants, depuis la loi LRU [loi relative aux libertés et responsabilités des universités] », note la conseillère d’orientation.

« Il reste toutefois difficile de toucher les 51 000 étudiants de l’université », reconnaît-elle. Lors de l’annonce que l’université s’associerait au forum Alsace Tech, en mai, le vice-président de l’Unistra chargé de la valorisation et des relations avec le monde socio-économique, Michel de Mathelin, disait observer « une forme de révolution copernicienne pour l’université ». Une révolution qui ne se fait pas en un seul jour.