Julien Denormandie (au centre) le 10 septembre. / ERIC PIERMONT / AFP

L’élève modèle de la Macronie poursuit son ascension. Jusqu’ici secrétaire d’Etat à la cohésion des territoires, où il officiait dans l’ombre du radical Jacques Mézard, Julien Denormandie, 38 ans, a été nommé ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, Jacqueline Gourault, chargé de la ville et du logement. Un portefeuille qui vient récompenser une fidélité et un engagement jamais démentis auprès d’Emmanuel Macron.

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Très proche du chef de l’Etat, qu’il tutoie en privé, le haut fonctionnaire a fait toute sa carrière dans l’administration. Diplômé de l’Ecole nationale des eaux et forêts, l’ingénieur travaille au Trésor lorsqu’il est repéré en 2012 par Rémy Rioux, le directeur de cabinet de Pierre Moscovici à Bercy, qui cherche un conseiller pour le commerce extérieur. Bon connaisseur de l’Afrique – il a passé deux ans à l’ambassade de France au Caire et fait son stage de fin d’études à Niamey –, le trentenaire obtient facilement le poste.

« Feuille blanche »

Depuis l’Elysée, où il conseille François Hollande sur les affaires économiques, Emmanuel Macron repère vite le jeune homme, de deux ans son cadet. Les deux partagent une envie de « remuer la vase » et affichent la même défiance vis-à-vis des hommes politiques. « J’ai vu beaucoup de ministres qui ne travaillaient pas », dit Julien Denormandie. A l’été 2014, il envisage même de rejoindre le privé avec le futur chef de l’Etat, qui entreprend de monter une start-up d’enseignement à distance.

Finalement rattrapé par François Hollande, qui le nomme ministre de l’économie, Emmanuel Macron embarque naturellement à Bercy son conseiller, qui se rend très vite indispensable. « C’est un entrepreneur du public, vous lui donnez une feuille blanche, il se débrouille », expliquait Rémy Rioux, aujourd’hui patron de l’Agence française de développement, peu après l’entrée de M. Denormandie au gouvernement.

Surtout, le jeune haut fonctionnaire gagne la confiance du futur chef de l’Etat. Comme lui, et bien que père de quatre enfants – le dernier né durant la campagne –, il avale les dossiers au kilomètre, dîne tous les soirs au bureau, ne dort « jamais plus de cinq heures d’affilée ». « Il lui ressemble tellement qu’on a du mal à les distinguer », explique un ex-membre du cabinet de Bercy.

Signe de cette confiance, au printemps 2016, Julien Denormandie est le premier envoyé par Emmanuel Macron pour structurer En marche !, le parti qu’il vient de créer, au côté d’Ismaël Emelien, autre proche conseiller. « Julien a tenu le mouvement à bout de bras, félicite un ex-cadre. Après la victoire à la présidentielle, c’est aussi le seul qui est resté pour préparer les législatives, alors que tous les autres se battaient pour un poste à l’Elysée. »

Lors de son passage à l’hôtel de Castries, le trentenaire a laissé une impression mitigée, formant un tandem contrasté avec Jacques Mézard, que tout oppose. L’un a 70 ans, est rompu à la politique, proche des élus notamment ruraux, tandis que Julien Denormandie apparaît technocrate, loin du terrain, presqu’arrogant et peu familier avec le secteur sauf sur les questions numériques.

Homme de dossiers, il s’est néanmoins plongé dans les arcanes du logement et a acquis une réelle maîtrise des dossiers, et semble même aimer la matière. Il écoute et en tant que catholique montre une certaine sensibilité sur les questions de pauvreté et notamment la question des sans-abri.

Mais le bilan de dix-huit mois d’exercice du pouvoir est pour le moment décevant. Le fameux « choc d’offre » de construction censé faire baisser le prix des logements se fait attendre : le nombre de permis de construire est en recul de 5 % à fin août sur un an, tout comme la production de logements sociaux. Pourtant, les besoins sont aigus, avec près de 2 millions de demandeurs de HLM, un chiffre en hausse de 10 % sur un an. Les coupes budgétaires infligées aux organismes HLM bousculent aussi le secteur, en pleine restructuration. Pour autant, Julien Denormandie repète volontiers que son passage en politique est temporaire, et envisage toujours de rejoindre le privé voire de fonder une entreprise : « J’ai deux jambes, une publique, l’autre privée. Je veux continuer à marcher. »