Le déficit budgétaire américain au plus haut depuis 2012
Le déficit budgétaire américain au plus haut depuis 2012
Par Arnaud Leparmentier (New York, correspondant)
Pour l’exercice clos le 30 septembre 2018, le déficit s’est envolé à 3,9 % du produit intérieur brut aux Etats-Unis.
Le président américain Donald Trump, en meeting à Richmond (Kentucky), le 13 octobre. / NICHOLAS KAMM / AFP
Le déficit budgétaire annuel américain a atteint 779 milliards de dollars (672 milliards d’euros) pour l’exercice clos le 30 septembre 2018, soit 3,9 % du produit intérieur brut (PIB) contre 3,5 % l’année précédente (666 milliards de dollars). Ce chiffre est considérable, après dix ans de reprise économique. L’Amérique de Donald Trump devrait casser la barre des 1 000 milliards de déficits – 5 % du PIB actuel – avant la prochaine élection présidentielle de 2020, estime le New York Times.
En tout cas, même s’il est un peu moins pire qu’attendu, le déficit 2018 est le plus élevé depuis 2012 et s’explique par la hausse des dépenses et la stagnation des rentrées fiscales.
Ces dernières n’ont progressé que de 0,4 % en raison de la réforme fiscale de Donald Trump votée fin 2017 par le Congrès : elle a entraîné une hausse du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu des particuliers limitée à 1 % et surtout une baisse des taxes payées par les entreprises de 31 %. Celles-ci ont bénéficié de la baisse de leur taux nominal d’imposition, passé de 35 % à 21 %, et de la déductibilité totale de leurs investissements. En période de forte croissance et avec un retour au plein-emploi (3,7 % de la population active), les entrées fiscales auraient dû être beaucoup plus fortes.
Les dépenses, elles, ont crû de 3 %. Le service de la dette, qui atteint environ 20 000 milliards de dollars, a progressé de 14 % (370 milliards de dollars). S’ensuivent une hausse des dépenses militaires de 6 % (700 milliards de dollars) et de sécurité sociale et de santé publique (+ 4 %, 1 950 milliards) en raison notamment du vieillissement de la population.
Abandon de toute rigueur budgétaire
Au moins le président américain tient-il une promesse, celle d’avoir moins d’Etat. Le taux de dépenses de l’Etat fédéral est passé de 20,7 % à 20,3 % en un an tandis que les revenus fiscaux se réduisaient encore plus, passant de 17,2 % à 16,5 %.
Les chiffres confirment l’abandon par les républicains de toute rigueur budgétaire, alors qu’ils avaient combattu sans relâche la relance budgétaire voulue par Barack Obama après l’effondrement économique provoqué par la grande crise financière de 2008. La tendance est à une nouvelle dégradation l’an prochain, alors que les élections de mi-mandat ne devraient pas marquer un retour à l’orthodoxie : s’ils l’emportent, les démocrates risquent de demander un programme d’investissements – celui promis par Donald Trump dans sa campagne présidentielle est dans les limbes – tandis que s’ils conservent le contrôle du Congrès, les républicains pourraient vouloir rendre permanentes voire accentuer les baisses d’impôts décidées fin 2017.
Les droits de douane ont progressé de 6,7 milliards de dollars (20 % environ), pour atteindre 41,3 milliards. On le voit, l’impact rapporté au PIB n’est que de 0,034 % du PIB. Parce que les mesures sont entrées en vigueur tardivement mais aussi parce qu’elles restent macroéconomiques faibles. Leurs conséquences se feront sentir au bout de quelques années sur la productivité des entreprises, si ces barrières tarifaires affectent les investissements des entreprises.
En revanche, le résultat reste calamiteux en ce qui concerne le déficit commercial, qui s’aggrave en raison de la bonne santé de l’économie américaine et de la forte consommation des ménages. Sur les huit premiers mois de l’année, celui-ci est passé de 530 à 574 milliards de dollars (environ 4,3 % du PIB) tandis que le déficit de la balance des biens et des services s’aggravait légèrement passant de 360 à 391 milliards de dollars. Comme le notait récemment le Los Angeles Times, Donald Trump ne parle plus beaucoup des déficits commerciaux : « Peut-être est-ce parce qu’ils empirent. »