Pour la première fois de sa carrière, Nikola Karabatic va manquer un rendez-vous international. / - / AFP

Comment remplace-t-on une clé de voûte sans que l’édifice s’effondre ? Voilà la périlleuse équation que le maître d’œuvre de l’équipe de France masculine de handball, Didier Dinart, doit résoudre. Pour la première fois depuis 2003, les Bleus devront disputer une grande compétition internationale sans leur totem, Nikola Karabatic. Le demi-centre du PSG Handball a annoncé, vendredi 19 octobre, avoir été opéré avec succès du pied gauche. Une intervention qui force la pierre angulaire du handball français à déclarer forfait pour le Mondial, qui se déroulera en janvier en Allemagne et au Danemark.

« C’est dur et très décevant. Ça va être la première compétition internationale que je vais manquer avec les Bleus et sur des terres de handball », déplore le joueur dans un entretien sur le site du club. Depuis ses débuts sous la tunique bleue en 2003, Nikola Karabatic a toujours répondu présent, hiver – Euros et Mondiaux – comme été – Jeux olympiques. Mais à 34 ans, dans une « décision concertée avec les staffs médicaux du club et de l’équipe de France », le joueur a dû se résoudre à l’opération. « Si j’avais continué à jouer, j’aurais très bien pu aggraver ma blessure et peut-être dû mettre un terme à ma carrière. »

« Il s’agit d’un hallux valgus au pied gauche et les problèmes ont commencé juste avant le Mondial 2017 en France », précise Karabatic. Cette déformation de l’avant-pied s’illustre par une inclinaison du gros orteil vers le deuxième et des « douleurs vives et intenses ». Préservé à l’entraînement, celui qui a été élu trois fois meilleur joueur du monde (2007, 2014 et 2016) a géré tant bien que mal la douleur au cours de la saison passée. « Mais elle s’est aggravée lors du Final Four [de Ligue des champions] de Cologne [en mai]. J’espérais que cela se calmerait avec la période de repos pendant les vacances. Mais non. »

Ne pas être « un poids pour l’équipe »

Dure au mal, la star du handball hexagonal a persisté, jouant « en boitant, avec des traitements anti-inflammatoires et des infiltrations ». Mais pour ne pas compromettre la fin de sa carrière, Nikola Karabatic a consenti à l’opération, qui l’éloignera du terrain de quatre à six mois. « Je suis très triste de rater [le Mondial], de ne pas pouvoir être aux côtés de mes amis et coéquipiers en janvier. Mais je n’aurais pas été en état de jouer, j’aurais été un poids pour l’équipe. »

Une absence que le sélectionneur des Bleus, Didier Dinart a apprise de la bouche du joueur en début de semaine. S’il « regrette énormément » l’absence de son meneur, l’entraîneur est loin de s’en accabler. « Lui-même me l’a dit, il faut regarder de l’avant. »

« Niko a fait les beaux jours de l’équipe de France, et il continuera à les faire, dit l’ancien “Roc” de la défense française au Monde, mais ce n’est plus un jeune joueur. Et ça fait des années qu’on s’y prépare. » Depuis le Mondial 2015, le successeur de Claude Onesta a injecté beaucoup de sang neuf dans son effectif. « Enormément de jeunes sont entrés, et désormais ce sont des cadres en clubs et en sélection. »

Inverser le jeu « classique » des Bleus

Ainsi Didier Dinart a-t-il déjà eu le temps de tester un système permettant de pallier l’absence de son ancien coéquipier. « On a toujours été dans cette recherche de penser à demain, ces dernières années, rappelle le sélectionneur. On a su le ménager, dans un souci de renouveler l’équipe. On l’utilisait dans les moments-clés et décisifs. »

Riche d’un contingent de haut vol au poste d’arrière-droit, le sélectionneur envisage d’inverser le jeu « classique » de l’équipe de France. « Avant, on avait Narcisse et Karabatic qui jouaient de la gauche vers la droite, explique-t-il. Aujourd’hui, avec autant de gauchers, on va tenter de changer la physionomie de notre jeu. Entre Valentin Porte, Adrien Dipanda, Nedim Remili ou Dika Mem, nous pouvons jouer dans l’autre sens. »

Une révolution – au sens propre – du jeu des Bleus qu’il a un peu plus de deux mois pour peaufiner. En pensant déjà aux Jeux olympiques de Tokyo, auxquels les sept premiers du Mondial seront qualifiés. « Il faut anticiper, martèle Dinart. Car l’équipe de France existera encore après Didier Dinart et après Nikola Karabatic. » Absent du Mondial 2019, le numéro 13 des Bleus entend bien toutefois être présent au Japon, voire au-delà.

Pas d’Euro en France pour la gardienne des Bleues

L’équipe de France masculine de handball n’est pas la seule à subir la loi des blessures. Son homologue féminine, sacrée championne du monde l’an passé, devra se passer de sa gardienne titulaire, Cléopâtre Darleux, pour l’Euro à domicile, qui se déroulera du 29 novembre au 16 décembre.

Blessée à un ligament du genou droit lors d’une rencontre de championnat samedi, la meilleure joueuse de la saison dernière sera éloignée des terrains au moins deux mois. Un coup dur pour les coéquipières de ‎la capitaine Siraba Dembélé.