Manifestation contre l’homophobie, le 21 octobre à Paris. / BENOIT TESSIER / REUTERS

Le parquet de Rouen a ouvert une enquête pour agression homophobe, séquestration et extorsion a-t-on appris, lundi 29 octobre, de sources concordantes, à la suite d’une violente attaque survenue dans la nuit de mercredi à jeudi contre un homme de 34 ans.

Interrogé par BFM-TV et Gayviking, Romain, qui présente de nombreux hématomes raconte avoir rencontré avec ses amis deux hommes dans une boîte de nuit :

« Ce sont des gens avec qui on a un peu dragouillé qui nous ont dit qu’ils étaient hétéros mais après ils ont bu un verre avec nous et on a bien rigolé. »

Alors que ses amis rentrent, Romain part en voiture avec ces deux hommes. Il raconte la suite à BFM-TV :

« Au bout de 200 mètres, le passager détache sa ceinture et monte derrière et il commence à me frapper en me traitant de sale pédé, sale race, tafiole, tantouze. Ça n’arrête pas. Il n’arrête pas de me frapper, me frapper, me frapper. Ma tête tapait contre le carreau et mon corps aussi, c’est pour ça que j’ai de gros hématomes. »

« A force me taper, j’ai essayé de me débattre, de bouger et c’est là que mon portefeuille est tombé et qu’ils ont trouvé ma carte bleue, c’est à ce moment-là qu’ils ont pensé à l’argent », poursuit-il. Il est alors emmené devant un distributeur, où il leur donne trois faux codes. Mais ils parviennent toutefois à retirer 800 euros avec son autre carte bleue. Romain arrive toutefois à s’échapper après plus de deux heures de calvaire. « Ils m’ont dit que ce n’était pas la première fois qu’ils faisaient ça et que si je bougeais, ils me buteraient avec les flingues ou le couteau qu’ils ont dans le coffre, raconte-t-il à Gayviking. J’ai vraiment eu peur de mourir. »

A la suite de cette agression, dix jours d’incapacité temporaire de travail (ITT) lui ont été prescrits.

Manifestation contre l’homophobie

L’association nationale SOS homophobie a dénoncé lundi dans un tweet cette « effroyable agression homophobe » et exprimé « tout son soutien à la victime ». Le 21 octobre, près de 3 000 personnes, selon la police, s’étaient réunies à Paris pour protester contre l’homophobie et les différentes attaques qui avaient lieu ces dernières semaines. Pas une semaine ne se passe sans qu’une victime ne témoigne sur les réseaux sociaux d’une nouvelle agression homophobe, que ce soit à Poitiers, Besançon, Lyon ou encore Paris.

Le 19 octobre, deux hommes qui s’embrassaient dans un VTC ont été frappés par leur chauffeur, dans la capitale. Trois jours plus tôt, Guillaume Mélanie, président d’Urgences Homophobies, une association d’aide aux étrangers LGBT en danger dans leur pays, a été frappé à la sortie d’un restaurant du 2arrondissement à Paris. Enfin, le 6 octobre, deux hommes ont été agressés par deux personnes alors qu’ils échangeaient un baiser. L’un des auteurs a été condamné à un an de prison ferme.

Le phénomène reste, cependant, difficile à quantifier. Tous les acteurs de terrain s’accordent à évoquer un climat hostile aux homosexuels, avec une recrudescence de passages à l’acte violents. Mais les chiffres de la préfecture de police, obtenus par l’Agence France-Presse (AFP), font, eux, état d’une baisse de 37 % des actes homophobes, recensés à Paris au cours des neuf premiers mois de l’année par rapport à la même période en 2017 – 74 actes contre 118 l’an passé.

Pour le président de SOS Homophobie, « derrière quelques cas médiatisés, il reste énormément de personnes qui ne sont pas entendues et n’osent pas aller dans un commissariat ». Selon le dernier rapport de SOS Homophobie, qui s’appuie sur l’enquête annuelle « Cadre de vie et sécurité » de l’Insee, « seulement 4 % des victimes d’insultes LGBTphobes déposent effectivement plainte », rappelle-t-il.