Une enfant yéménite souffrant de malnutrition dans un centre de traitement d’un hôpital de la province d’Hajjah, tenue par les rebelles houthistes, le 25 octobre. / ESSA AHMED / AFP

La position exprimée par un membre du gouvernement français sur la guerre menée par l’Arabie saoudite au Yémen aura rarement été si forte vis-à-vis de Riyad. Invitée de l’émission de Jean-Louis Bourdin sur BFM-TV, la ministre des armées a estimé mardi 30 octobre que l’intervention de la coalition emmenée par le royaume saoudien contre les rebelles houthistes au Yémen était sans issue. « Il est plus que temps » qu’elle cesse, a-t-elle déclaré.

Mme Parly a rappelé que la guerre voulue par le tout-puissant prince héritier Mohammed Ben Salman est à l’origine d’une « crise humanitaire comme on n’en a jamais vu ». Ces propos contrastent dans une certaine mesure avec ceux exprimés vendredi par le président français Emmanuel Macron, qui s’était borné lors d’une conférence de presse à rappeler que Paris avait « demandé des gages et de la clarté sur le conflit au Yémen, où nous sommes très attachés aux règles humanitaires ».

Dans une note interne consultée par l’AFP le 18 octobre, Mark Lockwood, le secrétaire général adjoint de l’ONU pour les affaires humanitaires, indiquait que la crise humanitaire au Yémen, considérée par la Nations unies comme la plus grave du monde, était « directement liée au conflit », rappelant que « 75 % de la population, soit 22 millions de personnes, a besoin d’une aide et de protection, dont 8,4 millions sont en situation d’insécurité alimentaire grave et dépendent d’un apport en nourriture urgent. »

Embarras croissant

Dans le conflit qui l’oppose aux forces houthistes, appuyées de manière distante par l’Iran, l’Arabie saoudite jouit du soutien de ses partenaires occidentaux en général et des Etats-Unis en particulier. En avril 2018, le président français Emmanuel Macron avait résumé en ces termes la position de la France : « Plein soutien à la sécurité de l’Arabie saoudite, condamnation de l’activité balistique venant des houthistes [dont les missiles visent régulièrement le territoire saoudien], volonté de trouver une solution politique au conflit et grande exigence humanitaire à l’égard des populations civiles. »

La guerre au Yémen suscite cependant un embarras croissant dans les capitales des pays occidentaux qui fournissent des armes au royaume saoudien et dont la France fait partie. Cette gêne de plus en plus forte n’est pas seulement liée à la crise humanitaire dont l’intervention de Riyad est à l’origine mais aussi aux multiples bavures et accusations de crimes de guerre visant l’aviation saoudienne, qui mène des bombardements réguliers en territoire houthiste. Elle a atteint un pic avec le meurtre dans le consulat saoudien d’Istanbul du journaliste opposé au régime saoudien Jamal Khashoggi, qui pourrait indirectement avoir ouvert la voie à un regain de critiques contre l’intervention saoudienne au Yémen.