L’ESPCI Paris. / Guilhem Vellut/Wiki Commons/CC by 2.0

Choisir la science plutôt que l’argent. Même si elle ne savait pas ce qu’elle voulait faire, Hanna Bendjador, alors élève de prépa, avait déjà cette idée solidement ancrée en elle. Une motivation qui l’a poussée à intégrer l’ESPCI (Ecole supérieure de physique et de chimie industrielles) de Paris. Cinq ans plus tard, la jeune femme de 24 ans, toujours avide d’apprendre, entame sa deuxième année de doctorat en physique dans un laboratoire de l’école et s’apprête à encadrer ses premiers travaux pratiques (TP). « Je n’étais pourtant pas du tout partie pour faire une thèse », confie-t-elle.

Comme Hanna Bendjador, 70 % des étudiants de l’ESPCI choisissent de poursuivre en doctorat, dans l’établissement ou ailleurs, une fois leur diplôme d’ingénieur en poche. Une exception. Ils ne sont que 7 % à l’échelle de l’ensemble des écoles d’ingénieurs françaises.

Un brevet chaque semaine

L’ESPCI, une des rares écoles sous tutelle de la Ville de Paris, cultive ce goût pour la science depuis sa création en 1882. Pas moins de six Prix Nobel, Pierre et Marie Curie, Frédéric Joliot-Curie, Paul Langevin, Pierre-Gilles de Gennes ou encore Georges Charpak, ont enseigné et/ou dirigé cette école d’ingénieurs. Une excellence scientifique qu’elle ne manque pas de mettre en avant et qui trouve des applications concrètes dans notre quotidien. Le sonar, la boîte noire ou la box Internet font partie des inventions que revendique l’ESPCI. Aujourd’hui encore, un brevet est déposé chaque semaine.

« Comprendre par l’expérience fait partie du quotidien des étudiants. Nous construisons ainsi une continuité entre enseignement, recherche et innovation. » Jean-François Joanny, directeur de l’ESPCI

Comment cette petite école, nichée dans le cœur historique de la capitale, entre la Sorbonne et Jussieu, arrive-t-elle à ce degré d’innovation ? Hanna Bendjador a un début de réponse : « Nous sommes plongés dans le grand bain de la science dès notre arrivée. Les deux premiers jours, nous sommes envoyés dans les labos pour voir comment ça se passe, et nous racontons ensuite notre expérience à nos camarades de promo. »

Ce contact direct avec les chercheurs se poursuit tout au long de la formation. Les TP représentent la moitié du cursus et concernent des disciplines aussi variées que la chimie, la biologie ou la physique. Ils sont supervisés par le corps professoral de l’école et se déroulent au sein même des labos. « Les enseignants nous laissent prendre des initiatives, essayer des “manips”, s’enthousiasme la jeune femme. Nous ne sommes pas du tout bridés, même si nous avons un cadre. Cette méthode développe notre esprit critique vis-à-vis de la science et nous rend certainement plus créatifs. »

Autre innovation, introduite par Pierre-Gilles de Gennes quand il était directeur : les séances de tutorat où des groupes de cinq ou six étudiants réfléchissent à un sujet proposé par un enseignant-chercheur et inspiré d’un travail de recherche récent. Une pédagogie qui laisse des traces. Hanna Bendjador a pris l’habitude de noter dans son smartphone les trouvailles qui lui traversent l’esprit en vue, pourquoi pas, de monter un jour sa start-up.

« Comprendre par l’expérience fait partie du quotidien des étudiants. Nous construisons ainsi une continuité entre enseignement, recherche et innovation », explique Jean-François Joanny, le directeur de l’ESPCI. A l’issue des trois ans du cursus ingénieur, les étudiants se voient proposer une quatrième année facultative pour approfondir leurs connaissances dans un domaine, avant une éventuelle poursuite en thèse.

Stages en laboratoire

Cette pédagogie fondée sur l’expérience et l’interdisciplinarité fait de l’ESPCI un modèle quasi unique en France, rendu possible par la petite taille des promotions, entre 80 et 90 étudiants chaque année. Jean-François Joanny en convient : « Nous pourrons monter à 100 étudiants par année avec notre nouveau campus, en 2023, mais nous ne formerons jamais 500 ingénieurs par an. Notre pédagogie requiert un niveau scientifique élevé de la part des étudiants qui nous rejoignent et un taux d’encadrement important. Un TP nécessite un enseignant pour huit étudiants. »

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La formation par la recherche irrigue malgré tout les écoles d’ingénieurs à des degrés divers. Notamment par le développement des stages en laboratoire. Emmanuel Duflos, directeur de Centrale Lille et vice-président de la Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs, l’affirme : « Selon nos dernières enquêtes, 56 % des chercheurs en entreprise sont des ingénieurs. » Et de toucher du doigt une particularité bien française qui met du temps à évoluer : le diplôme d’ingénieur est souvent plus valorisé en entreprise que le doctorat. Les diplômés de l’ESPCI, dont 80 % travaillent dans l’industrie, l’ont bien compris : un sur trois est basé à l’étranger cinq ans après l’obtention du diplôme. Une envie d’ailleurs qui trotte déjà dans la tête d’Hanna Bendjador. La soif de découverte n’a pas de frontières…

« Le Monde » organise son Salon des grandes écoles les 10 et 11 novembre

La 13e édition du Salon des grandes écoles (SaGE) aura lieu samedi 10 et dimanche 11 novembre à Paris, aux Docks, Cité de la mode et du design (13e arrondissement), de 10 heures à 18 heures.

Plus de cent cinquante écoles de commerce, d’ingénieurs, IAE, IEP, écoles spécialisées et prépas y seront représentées, permettant d’échanger sur les différents programmes et leur accessibilité (post-bac, post-prépa ou après un bac + 2, + 3 ou + 4). Lycéens, étudiants et parents pourront également assister à des conférences thématiques animées par des journalistes du Monde Campus. Une équipe de vingt « coachs » pourra également conseiller lycéens, étudiants et parents pour définir leur projet d’orientation, préparer les concours ou rédiger leur CV.

L’entrée en sera gratuite, la préinscription en ligne est conseillée pour accéder plus rapidement au Salon. Liste des exposants et informations pratiques sont à retrouver sur le site Internet du SaGE.