A Bercy, Novak Djokovic fait plier Roger Federer
A Bercy, Novak Djokovic fait plier Roger Federer
Par Elisabeth Pineau
Le Suisse n’a pu venir à bout du Serbe, vainqueur 7-6, 5-7, 7-6. Dimanche, le futur numéro un mondial affrontera en finale le Russe Karen Khachanov.
Novak Djokovic retrouvera lundi la première place du classement ATP, après le forfait de Rafael Nadal lors du Masters 1000 de Paris. / ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP
A 37 ans, Roger Federer n’était « pas venu à Bercy pour gagner ». Il voulait juste « jouer ce tournoi sans pression, voir ce qu’il se passe sans grandes attentes ». Même si on n’était pas obligé de le croire… Alors oui, le Suisse n’a pas gagné le tournoi, vaincu par Novak Djokovic en demi-finale, samedi 3 novembre. Mais comme en témoigne le score (6-7, 7-5, 6-7) et la durée de la recontre (3 h 03), il a livré sa meilleure prestation depuis l’Open d’Australie, qui plus est contre le meilleur joueur de la saison, et « c’est déjà pas mal », comme il dit.
On annonçait un match « pop-corn », le duel tint ses promesses dès le début. Un premier set aussi long que les deux premiers matchs de l’idole, de retour à Paris après trois ans : 1 h 11 d’échanges souvent accrochés, parfois frémissant, et quelques coups de génie comme cette volée réflexe à l’aveugle d’un Federer pas malchanceux à 4-3 dans le second set, sur un passing de Djokovic venu accrocher la bande du filet.
Les deux joueurs s’étaient délestés de toute pression avant cette demi-finale, mais on ne put que constater que l’un comme l’autre n’avaient pas la décontraction affichée fin septembre à Chicago lors de la Laver Cup, l’exhibition initiée par le Suisse. Cette demi-finale de Masters 1000, tous deux en faisaient une question d’honneur : l’un voulait montrer qu’il mérite sa place de meilleur joueur de la saison, l’autre lorgnait le 100e titre de sa carrière.
Moins aérien que face à Nishikori
Roger Federer being Roger Federer.https://t.co/dWyk6JrP3F
— gasparlanca (@Gaspar Ribeiro Lança)
Dans les tribunes, l’ambiance fut loin d’être aussi électrique que lors des deux premières apparitions du Suisse sur le court central parisien, face à Fabio Fognini puis Kei Nishikori. Se rendant coup pour coup, les deux hommes sont contraints d’être départagés au tie-break : d’abord aux commandes, réalisant par deux fois le minibreak, Roger Federer manque ensuite d’opportunisme, gâche une balle de set et se désunit dans le money-time, laissant son adversaire conclure le premier set à sa première occasion.
Novak Djokovic, plus appliqué que la veille face à Marin Cilic, ne connaît pas de sautes de concentration et se repose sur sa première balle. En face, Federer lâche quelques vilaines fautes directes, notamment en revers, et se montre moins aérien que la veille face à Nishikori. Dans le deuxième set, les deux joueurs ne sont pas loin de céder leur engagement d’entrée, puis les jeux défilent sans encombre jusqu’à 5-4.
Federer serre alors le poing, dans les tribunes, sa femme Mirka l’encourage, mais il ne parvient pas à prendre l’avantage au jeu suivant. Et c’est au tour du futur numéro un mondial (il le sera lundi) de lui mettre la pression. Djokovic a l’occasion de faire le break mais échoue, et Federer reprend l’avantage à 6-5. C’est finalement le Serbe qui finit par flancher et permet à son rival, après 2 h 09 de jeu, de recoller à une manche partout (7-5) sur un coup droit mitrailleur long de ligne. Le clan Federer se lève, les 14 000 spectateurs exultent et font trembler les tribunes de Bercy. Ils auront le droit à leur troisième set.
Ce samedi à Bercy, contrairement à ce qu’il montre depuis la saison sur gazon, Federer tient l’échange et parvient à exploiter les rares failles de Djokovic, qui lui résiste depuis le Masters de Londres, fin 2015. Depuis le 9 août, personne n’est parvenu à enrayer la machine serbe, vainqueur coup sur coup de Cincinatti, l’US Open et Shanghaï. Contrairement à Cincinnati, où le Suisse avait, selon lui, livré face à lui le « pire match de [sa] carrière en retour », il parvient à lire les services de Djokovic.
« Mon dernier match à Paris ? Aucune idée »
Le Suisse Roger Federer, à Paris, le 3 novembre. / Thibault Camus / AP
Malgré une alerte d’entrée de troisième set, Federer reste devant au score. Les deux joueurs ne sont ensuite plus inquiétés sur leurs mises en jeu jusqu’à 4-4, moment où le service du numéro 3 mondial se grippe. Frustré d’avoir loupé deux occasions de faire le break, Djokovic fracasse sa raquette de répit et se fait réprimander par le public et par l’arbitre. Fidèle à sa réputation de meilleur retourneur du circuit, il renvoie tout, mais finit par plier devant les accélérations du Suisse. L’image est rare pour être notée.
Comme au premier set, les deux joueurs en arrivent au tie-break. Rapidement, Djokovic mène 3-1, puis 4-1 après une double faute de Federer, et se procure bientôt cinq balles de match. La troisième sera la bonne. Federer a eu sa chance dans ce match, mais la constance de son adversaire, qui rencontrera dimanche en finale le jeune Russe Karen Khachanov, a fait la différence.
« On a eu des matchs épiques dans notre rivalité mais celui-ci fait assurément partie des meilleurs, dira le vainqueur. Avec la demi-finale que j’ai jouée face à Nadal à Wimbledon, c’était le match le plus excitant que j’ai joué cette année, et probablement celui avec la meilleure qualité de tennis. »
« J’ai quelques regrets certes, quand on fait un match aussi serré, on en a toujours. Notamment une balle de set, des points à 15A ou 30A. Mais c’était un bon tournoi, analysait de son côté à chaud le Suisse, la mine logiquement défaite. Novak est sur une dynamique, ça se sent. Il protège très bien son service. A la fin, ça se joue à des détails ici ou là. Quand je prends un peu de recul, je me dis que c’était une très bonne chose de venir à Paris. »
Et quand on lui demanda si ses admirateurs parisiens venaient de le voir pour la dernière fois de sa carrière à Paris, le Suisse eut cette réponse vague : « Aucune idée. Si c’était le dernier match, il était bon en tout cas. Pour Roland, je déciderai en fin d’année, il faut que je voie à quel point cela a un impact sur ma préparation physique. Bercy, l’année prochaine ? Comme chaque année, après Bâle, c’est toujours compliqué. Je ne peux pas trop me projeter. Je n’espère pas que c’était mon dernier match. »