Opération escargot d’entreprises de travaux publics, lundi 5 novembre à Reims. / FRANCOIS NASCIMBENI / AFP

« Le prix du gasoil nous met à poil. Emplois menacés », clame le slogan. Plus d’une centaine de poids lourds menaient, lundi 5 novembre, des opérations escargot sur les principaux axes routiers de la Marne, la Haute-Marne, les Ardennes et l’Aube. Ils protestent contre la fin « brutale » du taux réduit sur le gazole non routier, utilisé pour les engins de chantier, qui a été annoncée sans concertation dans le projet de loi de finances 2019 du gouvernement.

Des opérations escargot sont en cours sur la N44 entre Vitry-le-François et Reims (Marne), sur l’A34 dans les Ardennes avec des passages par Sedan et Charleville-Mézières, ainsi qu’en Haute-Marne sur l’axe Langres-Chaumont. Des barrages filtrants ont aussi été instaurés autour de l’agglomération rémoise et sur la rocade de Troyes (Aube).

Augmentation de 50 % du prix en janvier

La levée du taux réduit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) sur le gazole non routier, à partir de janvier 2019, fait passer le prix du litre de 1 euro à 1,50 euro. « On ne s’y attendait pas du tout ! », s’agace Hervé Noël, président de la fédération des travaux publics de Champagne-Ardenne et vice-président de la fédération régionale des travaux publics Grand Est. Il explique :

« Pour faire 1 m3 de terrassement, il faut 1 l de GNR [gasoil non routier]. Ce sera donc 50 centimes de plus pour chaque m3 de terrassement ! Dans nos métiers, le poste carburant c’est jusqu’à 30 % du coût total, c’est énorme ! Sans compter que les appels d’offres se passent six à neuf mois avant le début du chantier, donc pour les chantiers des neuf premiers mois de l’année prochaine, les marchés sont déjà conclus, on ne pourra pas refacturer la hausse aux clients. »

Il redoute un effondrement du secteur. « Après dix ans de crise, notre secteur commençait juste à reprendre. Là on va se casser la figure : l’ensemble des marges des entreprises de BTP en moyenne, fin 2017, c’était 1,75 %. Là cette mesure pourrait nous coûter jusqu’à 2 % de notre chiffre d’affaires. »

Demande de mesures compensatoires

Quatre délégations de cette fédération ont été reçues en fin de matinée dans les préfectures et sous-préfectures de ces départements pour exposer leurs revendications. Hervé Noël espère rencontrer Emmanuel Macron mardi à Reims, où le président sera de passage, afin de « comprendre et discuter ensemble de mesures compensatoires, au moins pour les neuf premiers mois de l’année ».

Selon lui, la justification écologique est absurde : « Nos engins dépendent du marché mondial, aucun n’est fabriqué en France. Ce sont des engins de chantier de 50 ou 60 tonnes, et l’alternative électrique n’existe pas sur le marché. Cette mesure n’est pas incitative pour changer notre façon de travailler. » Elle représentera « une augmentation d’impôts de près de 700 millions d’euros » pour la filière, a précisé la Fédération nationale des travaux publics.

Cette contestation s’inscrit dans un mouvement plus global de protestation contre la hausse de la fiscalité sur les carburants, défendue par le gouvernement au nom de l’écologie, et qui devrait atteindre son apogée samedi 17 novembre.