Stanislas Guerini contre Pierre Person. Le match était annoncé. Les deux députés parisiens s’apprêtaient à s’affronter pour la direction du mouvement La République en marche (LRM) après le départ de Christophe Castaner devenu ministre de l’intérieur. Le premier avait présenté sa candidature le 30 octobre ; le second semblait également prêt à se lancer. Le duel s’annonçait serré entre ces deux purs macronistes. Mais contre toute attente, M. Person a finalement annoncé, mardi 13 novembre, qu’il ne sera pas candidat au poste de délégué général du parti présidentiel.

« J’ai beaucoup réfléchi à cette décision. De nombreux référents, parlementaires, adhérents et élus tirés au sort m’ont fait part de leur soutien et m’ont incité à candidater. Nous sommes à un moment charnière de notre majorité qui impose l’unité et le rassemblement. C’est pourquoi je ne serai pas candidat », a-t-il déclaré dans un entretien au Figaro.

Les petites phrases et les franches critiques

Le renoncement du cofondateur du mouvement Les Jeunes avec Macron, âgé de 29 ans, qui paraissait pourtant avoir de bonnes chances de l’emporter, ouvre donc la voie à Stanislas Guerini. Dorénavant seul candidat déclaré, le cofondateur du mouvement En marche ! se retrouve quasi assuré de devenir le nouveau patron de LRM.

Considéré comme un « bon organisateur », cet ancien soutien de Dominique Strauss-Kahn, âgé de 36 ans, a affiché près de 160 soutiens dans le mouvement, dont une centaine de parlementaires. Et il a disposé de renforts de poids dans cette précampagne. Ses amis issus de la « strauss-kahnie », qu’il a connus au sein du QG de l’ex-candidat, situé rue de la Planche à Paris, et aujourd’hui au cœur du pouvoir, ont poussé sa candidature en coulisses. Parmi eux, les conseillers de l’Elysée, Ismaël Emelien et Cédric O, ou le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux.

Ces dernières semaines, les petites phrases et les franches critiques sont apparues entre les entourages des deux candidats. Au point d’installer un climat de tension, en interne. « Des attaques ont fusé, c’était violent et incisif », assure un député LRM. Les soutiens de M. Person ont même fait état de « pressions » de la part de conseillers élyséens et de ministres, accusés d’avoir passé de nombreux coups de fil pour pousser le rival de M. Guerini à ne pas se présenter. Ou pour inciter des élus à ne pas le soutenir.

Des manœuvres qui ont semé le doute dans l’esprit de M. Person. Au point de le faire renoncer. « Les suspicions, la campagne de dénigrement et l’image négative renvoyée par ce duel interne l’ont poussé à se demander si sa candidature n’apportait pas plus de bordel que des solutions », explique un proche. D’après son entourage, le député de Paris ne s’est pas lancé pour éviter d’afficher les divisions et de « fracasser le mouvement » dans une guerre fratricide. « Pierre Person a fait le choix très courageux d’être responsable pour deux », loue un de ses fidèles.

Le député des Français de l’étranger, Joachim Son-Forget, a également marqué son intérêt pour cette élection, fixée au 1er décembre. Mais il doit encore parvenir à rassembler les parrainages nécessaires. Le délai de dépôt des candidatures expire mercredi 14 novembre, à 20 heures. Elles doivent ensuite être entérinées le lendemain après un bureau exécutif examinant la validité des parrainages.

« Cela donne une image d’élection verrouillée »

M. Guerini a toutes les chances d’être le seul candidat, comme cela avait déjà été le cas pour Christophe Castaner la première élection pour la tête du mouvement. « Cela donne une image d’élection verrouillée, sans véritable débat », regrette un député macroniste. « Ce qui compte, cela n’est pas le nombre de candidats alignés sur la ligne de départ mais d’avoir le bon patron pour le mouvement et la bonne équipe à ses côtés. C’est le cas avec Stanislas Guerini », soutient la porte-parole du groupe à l’Assemblée, Aurore Bergé.

Après le désistement de M. Person, le soulagement est plutôt de mise au sein du mouvement, où l’on voulait avant tout organiser une élection interne sans fracas. Philippe Grangeon, qui occupe par intérim le poste de délégué général depuis la promotion de M. Castaner au ministère de l’intérieur, avait multiplié les appels à la « vigilance » pour que ce scrutin ne vienne pas « abîmer l’image » du parti.

Et récemment, ce proche du chef de l’Etat laissait entendre avoir une préférence pour une candidature unique, de façon à éviter à tout prix une campagne, qui dégénère du 15 novembre au 1er décembre. Pas vraiment le moment, alors que la cote de popularité d’Emmanuel Macron est déjà au plus bas. « Notre mouvement est dans un moment clé de maturité politique, souligne Aurore Bergé. Lorsque l’on est dans la même famille politique, on évite les combats fratricides. »