Depuis un an, la collecte des sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) ralentit. Elle est ressortie à 3,47 milliards d’euros en net sur les neuf premiers mois de l’année, selon un communiqué de l’Association française des sociétés de placement immobilier (Aspim), qui publie désormais des statistiques trimestrielles.

Après le record établi en 2017 à 6,3 milliards d’euros, l’année 2018 marquera donc un reflux significatif pour ces produits qui achètent des immeubles et des commerces (plus rarement des logements) afin de toucher des loyers qu’elles reversent à leurs porteurs de parts sous la forme de dividendes. Ce qui leur permet d’éviter les contraintes d’un investissement dans l’immobilier physique, d’où le terme de « pierre-papier ».

S’il est encore trop tôt pour parler de désamour, les performances s’érodent. Sur les douze derniers mois, les SCPI ont délivré un rendement moyen de 4,4 %, auquel il faut ajouter 0,7 % de revalorisation de leur patrimoine, ce qui porte donc la performance globale à 5,1 %. En 2017, le gain total des porteurs de parts avait été de 6,22 %.

Une collecte de 18 milliards d’euros

Le score reste néanmoins flatteur, surtout comparé avec celui des contrats en euros de l’assurance-vie, qui rapportent à peine 1,5 % par an. Ce qui n’a pas empêché les assureurs-vie de collecter 18 milliards d’euros au cours des neuf premiers mois de 2018, presque quatre fois plus que la pierre-papier !

Avec la remontée annoncée des taux à l’horizon 2019, les années de forte valorisation du patrimoine des SCPI appartiennent désormais au passé. Lorsque les taux d’intérêt augmentent, les investisseurs sont moins tentés de prendre des risques. Faut-il s’en inquiéter ? « Tant que l’écart de rendement entre les SCPI et les obligations sans risque restera élevé, il n’y aura pas de problème », assure Julien Vrignaud, fondateur de SCPI-8. Comme la rémunération de l’OAT 10 ans demeure actuellement inférieure à 0,8 % par an, la marge est importante.

« D’autant qu’avec le retour de l’inflation, qui a atteint 2,2 % en octobre selon l’Insee, les loyers vont mécaniquement augmenter », ajoute Jean-Marc Peter, président de Sofidy, qui gère notamment Immorente, la plus grosse SCPI du marché (2,9 milliards euros d’encours). En effet, les baux qui lient locataires et propriétaires prévoient une indexation du loyer, notamment en fonction de l’inflation. Cette caractéristique protège les bailleurs, même si l’habitude prise dans les périodes de crise de consentir d’importants avantages en nature aux locataires (franchises de loyers, travaux…) pour les fidéliser relativise cette protection.

Des moins-values en capital

Quels sont les produits les plus fragiles ? « Ceux qui investissent massivement en France, et en particulier dans le quartier central des affaires (QCA) à Paris », affirme Frédéric Puzin, président de Corum. Le rendement procuré par les immeubles acquis ces dernières années dans les quartiers les plus recherchés de la capitale dépasse rarement 3 %. Si jamais le taux de l’OAT 10 ans atteignait ce niveau dans les prochaines années, ces SCPI enregistreraient des moins-values en capital. « Ce sont les plus exposées à une remontée des taux d’intérêt », insiste M. Puzin, dont le produit phare, Corum Origin, est investi à 90 % à l’étranger.

Les épargnants qui ont été habitués au cours de la dernière décennie à des performances dopées par l’appréciation du patrimoine des SCPI dans un contexte de baisse des taux d’intérêt, vont devoir s’habituer à des rendements moins généreux. « Ce retour à la normale est dans l’ordre des choses, analyse M. Vrignaud. La SCPI n’est pas un produit de plus-value : le souscripteur veut des revenus réguliers, il achète de la tranquillité. L’objectif, c’est le rendement ! »