La frustration des 3 200 migrants de la « caravane » bloqués à Tijuana, au Mexique, se mêle désormais avec un sentiment d’exclusion. Nombre d’entre eux ont déclaré samedi 17 novembre avoir été accueillis par des signes d’hostilité de la part des habitants et du maire de la ville de plus d’1,3 million d’habitants qui a demandé l’expulsion de ces migrants.

« Tijuana est une ville de migrants, mais nous ne les voulons pas de cette manière. Cela a été différent avec les Haïtiens [arrivés en 2016], eux avaient des papiers, ils étaient ordonnés, ce n’était pas une horde », s’est plaint le maire Juan Manuel Gastelum, du Parti action nationale (PAN, conservateur).

Les milliers de migrants font également face à l’hostilité des habitants, certains leur criant des insultes, lançant des pierres ou recourant à la violence contre les migrants, pour la plupart honduriens. Ainsi, Carlos Padilla, un Hondurien de 57 ans, s’est vu traité de « cochon » alors qu’il marchait. « Nous ne sommes pas venus ici pour causer des problèmes, nous sommes venus ici avec l’intention de demander l’asile », a-t-il déclaré à l’agence américaine AP. « Mais ils nous traitent comme des animaux ici. »

Mercredi soir, 300 habitants avaient protesté contre leur présence près de la plage de Tijuana, entonnant l’hymne mexicain et certains leur jetant des objets. Sur les réseaux sociaux, une manifestation contre les migrants a été convoquée pour dimanche et plusieurs pages Facebook « anti-caravane » ont été créées.

Des demandes d’asile qui devraient s’éterniser

En raison de la surpopulation dans les abris, les migrants sont nombreux à avoir campé au sein d’un complexe sportif de plein air, ce dernier pouvant accueillir jusqu’à 3 000 personnes. A partir de vendredi soir, ils étaient 2 397 à y « loger ». Les refuges privés de la ville ont, eux, une capacité maximale de 700 personnes.

Alden Rivera, ambassadeur du Honduras au Mexique, a visité samedi le campement improvisé. Il s’attend à ce que les migrants aient besoin d’être hébergés pendant huit mois ou plus et a déclaré qu’il collaborait avec le Mexique pour obtenir plus de financement pour les nourrir et les soigner. D’ores et déjà, les migrants reçoivent des dons d’habitants solidaires, et d’associations religieuses qui leur fournissent de quoi se nourrir et des douches portatives.

Une douche improvisée dans un abri provisoire à Tijuana, le 17 novembre. / Rodrigo Abd / AP

Après avoir parcouru 4 300 kilomètres, à pied, en camion ou en autobus, les migrants de cette caravane ont commencé à découvrir combien leur rêve américain leur serait difficile à atteindre. Des files d’attentes se sont formées dès vendredi au poste frontalier d’El Chaparral pour s’inscrire sur une liste de demandeurs d’asile, où figuraient déjà 1 400 noms, pour la plupart inscrit avant l’arrivée de la caravane. Saturés par les demandes, les autorités américaines n’ont pu traiter vendredi qu’une trentaine de cas.

Généralement, elles reçoivent entre « 30 et 90 migrants par jour », a signalé à l’Agence France-Presse (AFP) un volontaire auprès de l’Institut national de la migration, qui enregistrait l’identité des migrants. Pour traiter tous les dossiers de ceux de la caravane, « ça prendra des mois », lâchait-il, résigné.

Selon les autorités, plus de 3 200 migrants de la caravane se trouvent désormais à Tijuana, et environ 2 000 autres devraient y converger dans les prochains jours. Au total, environ 8 000 migrants se trouvent actuellement au Mexique pour atteindre les Etats-Unis, répartis dans différentes caravanes, dont la plupart se sont fragmentées au cours de leur périple.

Une partie de la « caravane » de migrants est arrivée à la frontière avec les Etats-Unis
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