Theresa May lors d’une conférence de presse au 10 Downing Street, à Londres le 15 novembre. / MATT DUNHAM / AFP

La semaine précédente a été « difficile », de son propre aveu. La suivante sera « cruciale », estime Theresa May qui va retourner à Bruxelles dans les prochains jours. La première ministre britannique, dont le projet d’accord sur le Brexit négocié avec l’Union européenne (UE) est très contesté dans son pays, a souligné dimanche 18 novembre auprès de la chaîne Sky news l’importance de la semaine à venir.

Elle a précisé qu’elle irait à Bruxelles et rencontrerait le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, avant le sommet européen prévu le 25 novembre et qui doit entériner le projet d’accord. Les discussions porteront en particulier sur la « relation future » entre le Royaume-Uni et l’UE après le Brexit, qui doit entrer en vigueur le 29 mars.

Le projet d’accord sur le Brexit a valu à Theresa May plusieurs départs de son gouvernement, motivés notamment par le sort particulier réservé à la province britannique d’Irlande du Nord après la sortie de l’UE.

Le point le plus controversé est le « backstop », ou filet de sécurité, solution de dernier recours prévoyant le maintien de l’ensemble du Royaume-Uni dans une union douanière avec l’UE. Il prévoit également un alignement réglementaire plus poussé pour l’Irlande du Nord si aucun accord sur la future relation entre Bruxelles et Londres n’était conclu à l’issue d’une période de transition de 21 mois après le Brexit.

Une première ministre toujours menacée

Theresa May a tenté de rassurer dimanche, comparant le backstop à une « police d’assurance ». Mais la cheffe du gouvernement est menacée d’être renversée par un vote de défiance. Celui-ci serait déclenché s’il est demandé par 15 % du groupe conservateur au Parlement, soit 48 députés. « De ce que j’en sais, [ce seuil] n’a pas été atteint », a affirmé dimanche la première ministre. Elle a prévenu qu’un changement de leader ne « faciliterait pas les négociations » et risquait de reporter le départ de l’UE.

C’est le député pro-Brexit Jacob Rees-Mogg, à la tête du puissant groupe parlementaire eurosceptique European Research Group (ERG), qui a lancé la manœuvre, l’accusant d’avoir trahi les promesses faites au peuple britannique. Avec ce projet d’accord, le Royaume-Uni deviendra un « état vassal » de l’UE, avec « beaucoup de lois conçues à l’étranger et sur lesquelles nous n’aurons aucune influence », fustige l’ERG, qui a disséqué le document de près de 600 pages et publié ses conclusions dimanche.

Selon les médias britanniques, un groupe de cinq ministres eurosceptiques tente de son côté de persuader Theresa May de modifier le projet d’accord. Le texte sera présenté en décembre au Parlement mais son destin semble incertain en raison de l’opposition affichée du parti travailliste, des libéraux démocrates et du petit parti unioniste nord-irlandais DUP, allié des conservateurs.

Le Parti national écossais (SNP) votera également contre le texte, a affirmé dimanche sa cheffe, la Première ministre écossaise Nicola Sturgeon. Cette europhile souhaite proposer un projet alternatif en s’unissant à d’autres partis.

Pour Jeremy Corbyn, le chef du Labour, le compromis trouvé par Theresa May ne « sert pas les intérêts du pays » et elle doit le renégocier rapidement. Le parti travailliste souhaite un « arrangement douanier permanent avec l’UE » et « une garantie des droits ». Le chef du principal parti d’opposition a par ailleurs estimé qu’un second référendum sur le Brexit, une idée qui a gagné du terrain ces derniers mois, est « une option pour l’avenir mais pas pour aujourd’hui ». Theresa May l’exclut pour sa part catégoriquement.

Carolyn Fairbairn, directrice générale de la principale organisation patronale, la CBI, a imploré les députés d’ « entendre la voix des entreprises », expliquant que celles-ci avaient assisté avec « horreur » aux divisions politiques.

Pour Dominic Raab, qui a démissionné de son poste de ministre du Brexit et a été remplacé par Stephen Barclay, un avocat eurosceptique de 46 ans, la première ministre a subi le « chantage » de Bruxelles. Toutefois, si « deux ou trois points étaient changés, un accord pourrait être conclu », a-t-il jugé dimanche, interviewé par la BBC. « Mais il est vraiment tard et nous devons changer de cap ».

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