Avant même que ne s’ouvre le 101e congrès des maires, lundi 19 novembre, pour les outre-mer au Sénat puis du 20 au 22 novembre au Parc des expositions de Paris, les échanges à distance entre l’exécutif et le président de l’Association des maires de France (AMF), François Baroin, ont commencé. Laissant présager un climat lourd d’incompréhensions réciproques.

Invité dimanche sur BFM, M. Baroin a dit « regretter » l’absence d’Emmanuel Macron au congrès de l’AMF. « Ce n’est pas parce qu’on a des désaccords sur le fond que l’accueil est indigne et ce n’est pas parce qu’on a des contre-propositions qu’on est irresponsables », a déploré le maire (LR) de Troyes. « Il y a des désaccords mais, ce qui importe, c’est qu’on puisse négocier », a-t-il poursuivi, fustigeant « l’addition de mauvaises manières et de mauvaises méthodes » qui, selon lui, caractérisent l’action du gouvernement depuis dix-huit mois.

« Artisans de la transformation »

En retour, plusieurs membres du gouvernement ont répondu. « Tenons moins de propos de tribune, faisons plus de pas concrets et faisons-les ensemble ! », a réagi Sébastien Lecornu, le ministre chargé des collectivités territoriales, dans un entretien au Journal du dimanche. De son côté, Jacqueline Gourault, la ministre de la cohésion des territoires, a affirmé que le chef de l’Etat n’avait « pas peur d’affronter les maires » mais avait « choisi de faire autrement ».

Le premier ministre, Edouard Philippe, devrait intervenir jeudi en clôture du congrès. M. Macron, lui, recevra plusieurs centaines de maires mercredi à l’Elysée, après avoir reçu au préalable le bureau de l’AMF. Il délivrera un discours à cette occasion. Avant cela, il a adressé à tous les maires de France une lettre de quatre pages, datée du 16 novembre, dans laquelle il revient sur les engagements pris lors du 100e congrès, le 23 novembre 2017.

« Décentralisation de projet »

Dans cette missive, le président de la République assure que, « face aux défis contemporains, notre pays ne peut réussir que par la mobilisation de toute la nation, c’est-à-dire le gouvernement, les élus locaux, les forces économiques et sociales et, bien sûr, les citoyens ». Il rend hommage aux élus, en particulier aux maires, sans lesquels « la France ne serait pas la même, parce que vous êtes des artisans de la transformation du pays ».

Il entend défendre l’action engagée depuis son élection, à rebours des reproches portés par l’AMF. « Ma première promesse était de préserver vos moyens financiers, elle est tenue », affirme M. Macron, rappelant la stabilisation de la dotation globale de fonctionnement – « après quatre années de baisse continue, c’est historique » – mais aussi des dotations d’investissement. Il défend le principe de la contractualisation sur la maîtrise des dépenses de fonctionnement avec les collectivités les plus importantes au nom de la « solidarité territoriale ». Le chef de l’Etat se dit « conscient des inquiétudes qui se sont fait jour à propos de la suppression annoncée de la taxe d’habitation ». Cependant, il réaffirme que la suppression sera « compensée à l’euro près » et que la réforme globale qui sera présentée au printemps 2019 « visera à donner à toutes les collectivités les moyens de porter leur développement ».

En matière de liberté de gestion, alors que les trois grandes associations d’élus (communes, départements et régions) dénoncent une « volonté de recentralisation », il rappelle les mesures visant à donner plus de souplesse aux collectivités, y compris dans la gestion des ressources humaines avec la réforme à venir de la fonction publique territoriale. Il s’engage à ce que les dysfonctionnements rencontrés dans l’application de la loi NOTRe adoptée sous le précédent quinquennat puissent faire l’objet de modifications législatives et réaffirme son souhait que « la différenciation territoriale soit inscrite dans la Constitution ». « Je crois à la décentralisation de projet », plaide le chef de l’Etat.

Enfin, il entend poursuivre la transformation de l’Etat pour mieux accompagner les collectivités, avec notamment la création de l’« Agence nationale de la cohésion des territoires », qui a été adoptée en première lecture au Sénat le 8 novembre, et la réforme de l’organisation territoriale de l’Etat, qui va être engagée. Sera-ce suffisant pour lever les incompréhensions ? « Pour dialoguer, il faut être deux », rappelle Mme Gourault, notant que la volonté n’est pas toujours au rendez-vous du côté de l’AMF.