Agnès Buzyn a annoncé cette mesure à l’occasion de la Journée internationale des droits de l’enfant. / LUDOVIC MARIN / AFP

Le gouvernement veut mettre en place une prise en charge à 100 % des frais de santé des quelque 340 000 enfants et adolescents confiés aux services sociaux, a annoncé mardi 20 novembre la ministre des solidarités et de la santé Agnès Buzyn au quotidien La Croix.

« En termes de santé et d’éducation, les enfants protégés ne bénéficient pas des mêmes soins ni du même suivi que les autres. L’État pourrait par exemple s’engager à financer un parcours de santé axé sur les besoins de ces enfants, impliquant davantage les agences régionales de santé. »

Par cette mesure, annoncée à l’occasion de la Journée internationale des droits de l’enfant, les pouvoirs publics entendent remédier à un « gros déficit dans la prise en charge » des mineurs confiés à l’Aide sociale à l’enfance, sur le plan de la santé physique comme psychologique, a précisé à l’Agence France-Presse (AFP) l’entourage de la ministre.

Violences : une « campagne choc » de sensibilisation

Une telle prise en charge à 100 % par la Sécurité sociale d’un « parcours spécialisé » de soins répond à une demande de longue date des professionnels concernés, a commenté auprès de l’AFP Michèle Créoff, vice-présidente du Conseil national de la protection de l’enfance (CNPE). Les enfants et adolescents placés bénéficient d’un « suivi sanitaire très défaillant », alors que nombre d’entre eux présentent des « troubles liés aux phénomènes de violence » et des « pathologies associées à une vulnérabilité émotionnelle et psychique », ainsi qu’un risque important de suicide, a ajouté Mme Créoff.

Mme Buzyn a par ailleurs annoncé à La Croix la nomination prochaine d’un haut-commissaire à la protection de l’enfance, qui sera chargé de « proposer une nouvelle stratégie et organiser un meilleur pilotage de cette politique ».

Sur le sujet des violences faites aux enfants, qu’il dit vouloir « prendre à bras-le-corps », le ministère des solidarités lance mardi soir une « campagne choc » de sensibilisation, avec un spot qui sera diffusé juste avant le journal de 20 heures sur France 2 pour inciter le grand public à signaler les cas de maltraitance dont il pourrait avoir connaissance. « Pour arrêter ça, agissez (…). Enfants en danger : dans le doute, appelez le 119 », proclame cette vidéo, qui ne montre aucune violence, mais laisse entendre les cris et les pleurs des enfants maltraités.

Le Défenseur des droits s’inquiète des « violences » reçues par les enfants de 0 à 6 ans

Un homme donnant la fessée à son enfant. / Philippe Turpin / Photononstop / Philippe Turpin / Photononstop

Demander aux pouvoirs publics d’interdire la fessée, s’interroger sur les effets des écrans ou du placement en rétention : le Défenseur des droits appelle lundi 19 novembre à mieux garantir les droits des plus petits avec vingt-six recommandations. Dans son rapport annuel consacré aux droits de l’enfant, réalisé avec son adjointe Geneviève Avenard, Défenseure des enfants, Jacques Toubon s’intéresse aux 5,2 millions d’enfants de moins de 7 ans, estimant qu’il est nécessaire de se mobiliser pour la petite enfance, « en tout premier lieu, dans la protection contre toute forme de violence ».

« Il faut voter une disposition qui dit que la fessée, la correction, la gifle, c’est une violence et que c’est interdit, comme toutes les formes de violence », a plaidé M. Toubon lors de la présentation de ce rapport qui sera remis mardi à Emmanuel Macron. Il a apporté son soutien à la proposition de loi contre les « violences éducatives ordinaires » portée par la députée MoDem Maud Petit, qui sera examinée dans les prochains jours à l’Assemblée.

Le Défenseur des droits, qui s’est dit régulièrement saisi de situations de bambins en centres de rétention, a réitéré sa recommandation de « proscrire dans toutes circonstances » le placement de familles. « L’enfermement, même pour une brève période, entraîne chez eux des troubles anxieux, du sommeil, du langage et du développement, de l’alimentation… Ces effets dramatiques sont souvent ignorés par les préfectures », a-t-il pointé. En 2017, selon l’institution, quelque 275 mineurs ont été placés en rétention en métropole avec leurs parents.

Pour Geneviève Avenard, « les écrans et leur impact sur les enfants sont un sujet d’inquiétudes à partir de 6-7 ans. Avant, on considère que c’est pédagogique, ludique, et les parents ne se rendent pas compte du danger ». L’institution demande au gouvernement de « diligenter des recherches pour mieux appréhender les risques » et de faire prévaloir « le strict principe de précaution en interdisant les écrans aux enfants de moins de trois ans dans les lieux les accueillant », ou alors de « façon très limitée et dans une approche pédagogique ».