Un embouteillage à Alger, en février 2017. / STRINGER / AFP

Des réformes sont urgentes en Algérie pour diversifier une économie dépendante aux hydrocarbures et éviter une crise économique dès 2019, a averti, lundi 19 novembre, le centre d’analyses International Crisis Group (ICG).

L’Algérie, qui tire l’essentiel de ses revenus du pétrole, a subi de plein fouet la dégringolade des cours entre 2014 et 2017. Or « les nouvelles réalités financières ne permettent plus de maintenir le niveau élevé de dépenses publiques des dix dernières années, qui vide rapidement les caisses de l’Etat », indique l’ICG dans un rapport intitulé « Surmonter la paralysie économique de l’Algérie ».

Un modèle « à bout de souffle »

« Malgré les promesses des gouvernements successifs de faire des réformes et de rééquilibrer les finances publiques, la paralysie politique a fait obstacle à toute mesure décisive », s’inquiète le centre. Cette paralysie est renforcée par l’incertitude autour d’une candidature du président Abdelaziz Bouteflika, 81 ans, à un cinquième mandat en avril prochain. En dépit du « rétablissement du cours du pétrole, la crise économique pourrait frapper le pays dès 2019 » et « se greffer aux tensions entourant la présidentielle », avertit l’ICG.

« Les autorités reconnaissent que le modèle actuel est à bout de souffle mais peinent à le corriger », souligne le rapport, regrettant que les réformes économiques « ont eu tendance à être reportées ». Selon l’ICG, deux facteurs paralysent celles-ci : « des groupes d’intérêt » influents qui « défendent le statu quo » et le souvenir de la guerre civile (1992-2002) née des troubles politico-sociaux ayant suivi les mesures d’austérité des années 1980 et 1990.

Le centre estime insuffisantes les coupes budgétaires et la « politique monétaire expansionniste, qui alimente l’inflation et permet seulement au gouvernement de gagner du temps sans s’attaquer aux problèmes de fond ». « A terme, l’Algérie ne pourra pas se contenter d’apporter de petits ajustements techniques à sa politique économique », ajoute-t-il, jugeant inévitable une renégociation du « contrat social implicite » dans le pays, « à savoir que l’Etat pourvoit aux besoins d’une population tenue de s’exécuter ».

Forte intervention étatique

Socialiste jusqu’au début des années 1990, l’économie algérienne reste marquée par une forte intervention étatique. La rente pétrolière subventionne notamment le carburant, l’eau, l’énergie, la santé, les logements et les produits de base. Mais « toute renégociation doit être envisagée avec prudence », souligne l’ICG. Les moins de 30 ans (55 % de la population selon les statistiques officielles) « entrent aujourd’hui sur le marché du travail avec de sombres perspectives d’avenir et une capacité considérablement réduite de l’Etat à les soutenir ».

L’Algérie peut néanmoins compter sur une dette extérieure inférieure à 2 % du PIB et sur des partenaires, européens notamment, « prêts à apporter leur soutien », argue le centre. Les analystes ont appelé Alger à plus de transparence sur l’état des finances publiques, les difficultés économiques, les réformes nécessaires et leurs résultats attendus, et à « mettre l’accent sur les jeunes dans l’élaboration du programme de réformes ». Il l’a aussi invité à élargir son « éventail » d’interlocuteurs, limités à l’ex-syndicat unique UGTA et au Forum des chefs d’entreprises, organisation patronale proche du pouvoir.