« Les Survivantes de Boko Haram », un documentaire de Gemma Atwal et Karen Edwards (2018). / BLAKEWAY PRODUCTIONS

Arte, mardi 20 novembre à 20 h 50, documentaire

Comment peuvent-elles oublier cette journée-là ? Le 14 avril 2014, la secte djihadiste Boko Haram avait enlevé 276 lycéennes de l’école de Chibok, au Nigeria. Si 57 adolescentes avaient réussi à s’enfuir, les autres avaient été emmenées de force dans la forêt de Sambisa, refuge du groupe terroriste. Après une mobilisation planétaire, portée par le slogan très médiatique « Bring Back Our Girls » (« Ramenez-nous nos filles »), le gouvernement signa, en 2017, un cessez-le-feu avec les islamistes, qui acceptèrent de libérer 103 captives.

Depuis, ces anciennes prisonnières vivent dans un bâtiment ultra-sécurisé, situé à Abuja, la capitale : tout est fait pour qu’elles se reconstruisent et retrouvent goût à la vie. Exceptionnellement, des caméras ont été acceptées au sein de cet établissement pour les filmer ; mais à une seule condition, qui va nuire au documentaire Les Survivantes de Boko Haram.

Dès le début du film, la ministre nigériane chargée des droits des femmes, Aisha Alhassan, qui a démissionné cet été, a rappelé devant les jeunes filles :

« Cette équipe de tournage sera avec vous pendant une semaine afin de filmer votre quotidien dans ce bâtiment sécurisé. Nous leur avons demandé de ne pas vous poser de questions sur ce qui s’est passé dans la forêt. Si vous en parlez, Boko Haram va dire : “On vous a libérées et maintenant, vous trahissez nos secrets.” Ils ne libéreront plus d’autres filles et risquent de s’en prendre à vous. Soyez reconnaissantes d’avoir été libérées et d’être saines et sauves. Ne parlez pas de ce qu’il s’est passé dans la forêt. »

Creux et impudique

Ainsi, les jeunes filles ne donneront aucun détail de leur quotidien sous le joug des combattants de Boko Haram. Avec cette immense contrainte, Gemma Atwal et Karen Edwards ont tricoté un documentaire creux et impudique, mettant en scène des jeunes filles fondant en larmes lorsqu’elles retrouvent leur famille.

Pour autant, les auteures donnent la parole à deux rescapées de Boko Haram qui ne sont pas protégées par le gouvernement et qui survivent, désormais, dans une immense précarité. Surnommées « les filles oubliées », soupçonnées de liens avec les islamistes, elles racontent leur enlèvement, leur épouvantable captivité et leur évasion.

Les Survivantes de Boko Haram, de Gemma Atwal et Karen Edwards (GB-EU, 2018, 60 min). arte-magazine.arte.tv/article/2590