Dans la ville portuaire d’Hodeïda, au Yémen, le 2 novembre. / Mohamed Al-Sayaghi / REUTERS

Des signaux positifs mais fragiles laissent entrevoir la possibilité d’une amorce de sortie de crise après trois ans de guerre et plus de dix mille morts au Yémen. Le Royaume-Uni a distribué, lundi 19 novembre, un projet de résolution au Conseil de sécurité des Nations unies, le premier qui soutient un cessez-le-feu depuis le début du conflit en 2015. Londres était ouvertement critiqué pour sa lenteur à mener une action afin de mettre un terme au conflit qui ravage son ex-colonie. « Il existe aujourd’hui une fenêtre d’opportunité pour pousser à un texte que tout le monde attendait depuis longtemps », confirme un diplomate.

Selon le texte, consulté par Le Monde, l’ONU demande la mise en place d’un cessez-le-feu immédiat à Hodeïda, ville portuaire où transite une grande partie de l’aide humanitaire essentielle, dans un pays où près de quatorze millions de personnes sont en situation de famine. Le texte appelle aussi à la fin des bombardements sur les zones les plus densément peuplées – un message explicite à la coalition militaire soutenue par l’Arabie saoudite – et donne deux semaines aux belligérants pour lever les blocus. Le Koweït, qui participe à l’opération « Tempête décisive », a d’ores et déjà indiqué avoir des réserves.

« A portée de main »

Ce texte vient soutenir des gestes encourageants pris par les deux parties au conflit dans les heures qui précédaient. Les rebelles houthistes, soutenus par l’Iran, et le gouvernement du président Abd Rabbo Mansour Hadi ont indiqué être prêts à se rendre dans les prochaines semaines à des pourparlers de paix à Stockholm, en Suède, qui ouvriraient la voie à de nouvelles négociations pour un règlement politique du conflit après un échec en septembre à Genève. L’envoyé spécial de l’ONU dans la région, le Britannique Martin Griffiths, avait estimé vendredi 16 novembre « qu’une solution politique est à portée de mains ».

Les houthistes, par la voix de Mohammed Ali Al-Houthi, qui dirige le Conseil supérieur révolutionnaire, ont annoncé lundi, pour prouver leurs « bonnes intentions », le gel de « toutes les opérations militaires sur tous les fronts afin de parvenir à la paix » et ont indiqué mettre un terme « aux tirs de missiles et de drones » contre l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis, bien que des informations venues d’Hodeïda indiquent que les bombardements et tirs de missiles ont repris lundi soir.

Sous couvert d’anonymat, certains diplomates affirment vouloir profiter de l’affaiblissement du prince héritier saoudien Mohammed Ben Salman (« MBS »), pour pousser à une solution politique. « Il y a un effet Khashoggi », assure l’un deux, en référence au chroniqueur dont « MBS » est soupçonné d’avoir commandité l’assassinat en Turquie.

Difficilement acceptable

L’influence de Riyad reste néanmoins forte. Selon des responsables, « MBS » aurait personnellement demandé au secrétaire d’Etat aux affaires étrangères britannique Jeremy Hunt de revoir un premier projet de résolution qui exigeait la mise en place de cessez-le-feu locaux et dont Riyad jugeait qu’il affaiblissait sa position. Londres a accepté de revoir sa copie et de soutenir l’exigence saoudienne de faire de la résolution 2216 une des bases pour une solution politique.

Voté en 2015, ce texte demandait expressément aux houthistes de quitter la capitale Sanaa et de déposer toutes les armes saisies à l’armée et aux institutions chargées de la sécurité, notamment les systèmes de missiles. Une demande difficilement acceptable pour les houthistes, priés par ailleurs de venir à Stockholm « sans préconditions », et qui présage de difficiles négociations pour aboutir à une paix durable.

Comprendre les origines de la guerre et l’état catastrophique du Yémen
Durée : 09:10