L’affaire Michel Platini connaît un nouveau rebondissement. En mai, l’ex-président de l’Union des associations européennes de football (UEFA) avait été mis hors de cause par Cédric Remund, procureur au ministère public de la Confédération helvétique (MPC), dans l’affaire du paiement des deux millions de francs suisses (1,8 million d’euros) que lui a fait, en 2011, l’ex-patron de la Fédération internationale de football (FIFA) Sepp Blatter, pour des travaux effectués lorsque le Français était son conseiller (1999-2002). Dans un courrier envoyé à son avocat Vincent Solari, le parquet suisse précisait alors que l’ancien numéro 10 des Bleus, entendu comme témoin assisté en septembre 2015, n’était pas ciblé par la procédure pénale ouverte contre Sepp Blatter et « ne sera pas incriminé ».

Six mois plus tard, M. Platini a déposé plainte, via Me Solari, contre André Marty, porte-parole et chef de l’information du parquet auprès du conseil de surveillance du MPC (AS-MPC). En mai, après que Le Monde a révélé la mise hors de cause du Français, M. Marty avait tenu à nuancer la portée du courrier de Cédric Remund en affirmant que « dans le cadre de son statut de personne amenée à témoigner, si l’on trouve des éléments, le cas Platini n’est pas définitivement terminé ». « L’affaire Platini n’est pas définitivement terminée », avait-il assuré.

Liens troubles et amicaux

Dans sa plainte déposée le 15 novembre, que Le Monde a pu consulter, Me Solari pointe le « comportement pas acceptable » de M. Marty et des « déclarations clairement destinées à continuer à jeter l’opprobre sur [son] mandant. »

La plainte de Michel Platini, suspendu quatre ans par les instances disciplinaires de la FIFA et le Tribunal arbitral du sport (TAS), intervient alors que les Football Leaks ont révélé les liens amicaux et troubles entre le porte-parole du MPC, le président de la FIFA et ancien bras droit de M. Platini à l’UEFA, Gianni Infantino, et Rinaldo Arnold, premier procureur du Haut-Valais. Les trois hommes sont originaires de cette même région, le Haut-Valais.

Par le truchement de M. Arnold, qui a notamment été invité par la FIFA à des matchs du Mondial 2018, deux rencontres ont eu lieu, en mars et avril 2016, entre M. Infantino et le procureur Michael Lauber, patron du MPC.

Durant ces entrevues, les procédures en cours menées contre plusieurs hauts responsables de la FIFA, dont Sepp Blatter, ont été évoquées par les deux hommes. M. Marty a assisté à la première réunion.

Le parlement cantonal du Valais (Suisse) a voté, le 16 novembre, des résolutions afin que sa commission de justice enquête sur le « dossier Infantino-Arnold-Lauber ».

Enquête sur le procureur

Par ailleurs, selon L’Equipe, Michael Lauber fait l’objet d’une enquête du conseil de surveillance du parquet suisse. Le patron du MPC doit tenir une conférence de presse mercredi 21 novembre, à 10 h 30, à Berne, où est installé le siège du parquet.

Cette prise de parole du procureur Lauber intervient alors qu’Olivier Thormann, le chef de la division criminalité économique du MPC et en charge des procédures relatives à la FIFA, vient de quitter son poste « après une discussion bilatérale et une évaluation de la situation » avec le patron du parquet.

M. Thormann avait été suspendu de ses fonctions et blanchi par un procureur extraordinaire. Il avait assisté à la seconde réunion entre M. Infantino et M. Lauber et était soupçonné de violation du secret professionnel, d’entrave à l’action pénale, d’octroi d’un avantage et de corruption passive. Des griefs en lien avec « des propos et le comportement » à l’encontre d’un ancien employé de la FIFA.

Contacté par Le Monde, Sepp Blatter trouve « très étrange » la proximité entre M. Infantino et M. Lauber. L’ex-patron de la FIFA est en train d’analyser la situation avant une éventuelle riposte via son avocat. « J’y travaille aussi et reviendrai sur ce sujet très prochainement », prévient le roi déchu du ballon rond.