LES CHOIX DE LA MATINALE

Le créateur de Borgen revient avec une nouvelle série sur Arte, la saison 8 d’American Horror Story tient sa promesse de situations gore un peu abracadabrantes et la Room 104, lieu propice aux pulsions de mort et de sexe, garde l’esprit délétère de sa saison 1.

« Au nom du père » : nouvelle série du créateur de « Borgen », Adam Price

Die Wege des Herrn - Glaube, Familie, Macht | Neue Serie | ARTE
Durée : 00:31

Au nom du père nous introduit auprès d’un pasteur danois et de sa famille, alors que s’annonce, pour chacun, une crise existentielle. Issu de plusieurs générations d’hommes de foi, Johannes Krogh se montre un homme habité, brillant et politique en tant que représentant de l’Eglise luthérienne du Danemark, mais s’avère un pater familias toxique et tourmenté, en proie à la dépression, auprès des siens – il y est incarné par Lars Mikkelsen, qui vient d’être couronné de l’International Emmy Award du meilleur acteur pour ce rôle.

Johannes Krogh, qui aurait aspiré à dédier sa vie à la peinture et non au pastorat, semble avoir reproduit la même exigence à l’égard de ses deux fils, lorsque s’ouvre la série. L’aîné, Christian, vient de renoncer à une carrière ecclésiastique et, en révolte contre son père, continue de se chercher. Le cadet August, lui, qui est en passe de devenir un des pasteurs les plus populaires de Copenhague, va s’interroger sur sa place : rester confortablement au Danemark, ou s’engager en tant qu’aumônier militaire dans un camp au Moyen-Orient ?

Borgen creator Adam Price on series 3, episodes 1 & 2: 'Birgitte Nyborg was lonely...'
Durée : 03:10

Comment protéger nos enfants du poids de l’héritage que l’on a soi-même reçu, comment ne pas les détruire de trop d’amour ou d’attentes ? Telles sont les questions qu’Adam Price souhaitait (se) poser après avoir évoqué l’écartèlement d’une femme entre vie professionnelle et cocon familial dans Borgen. Martine Delahaye

« Au nom du père », saison 1, série créée par Adam Price. Avec Lars Mikkelsen, Ann Eleonora Jorgensen, Simon Sears, Morten Hee Andersen, Fanny Louise Bernth (Danemark, 2017, 10 x 58 minutes). La série est d’ores et déjà intégralement disponible sur le site d’Arte, jusqu’au 29 décembre. Sa diffusion télévisée aura lieu le jeudi à 20 h 55 à partir du 29 novembre (deux épisodes par soirée).

« American Horror Story » : une impression de déjà-vu

American Horror Story: Apocalypse Trailer VOSTFR - Saison 8 [HD]
Durée : 01:19

Assez politique (avec comme réalité horrifique première, l’élection de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis), le récit tortueux et plein de chausse-trapes de la saison 7 d’American Horror Story était un régal. La saison suivante, dont la totalité des épisodes a été diffusée par Canal+, laissait entrevoir quelques promesses dans un genre sataniste, apocalyptique, très gore, où des sorcières s’opposent aux sorciers, des cœurs sont arrachés et dévorés, le tout sur fond SM et homoérotique.

Mais après douze épisodes aux récits rhyzomatiques qui pratiquent des zig-zags temporels permanents, on avouera n’avoir pas compris grand-chose à ce fatras abracadabrantesque.

Les amateurs de la série auront retrouvé des personnages, des lieux et des situations rencontrés au cours de précédentes saisons tandis que les scénaristes justifient a posteriori et un peu laborieusement l’origine d’un personnage – celui joué par l’acteur australien Cody Fern, que Ryan Murphy avait dirigé dans American Crime Story : The Assassination of Gianni Versace, et qui témoigne d’un étonnant registre de jeu.

Le plus décevant, dans cette huitième saison, est probablement le côté toc de l’ensemble et l’impression de déjà-vu que l’univers très personnel de Ryan Murphy et Brad Falchuk savait jusqu’alors éviter. Le surnaturel n’a nul besoin d’avoir l’air vraisemblable, mais il n’y a rien de pire pour lui que de sonner faux et creux. Deux autres saisons sont annoncées. De quoi pour le très (trop ?) prolifique Ryan Murphy et son comparse retrouver le génie qu’ils atteignent parfois. Renaud Machart

« American Horror Story : Apocalypse », saison 8 de la série créée par Ryan Murphy et Brad Falchuk. Avec Sarah Paulson, Evan Peters, Kathy Bates, Cody Fern, (Etats-Unis, 2018, 13 × 52 minutes). Canal+ à la demande.

« Room 104 » : humour noir et mauvais rêve

ROOM 104 Trailer 2 SEASON 1 (2017) HBO Series
Durée : 01:03

On ne sait où se trouve cette chambre 104 d’un motel ordinaire aux Etats-Unis. Quand la porte d’entrée est ouverte, une cloison extérieure masque tout ce qui pourrait indiquer à quoi ressemblent les alentours. Mais on imagine un parking, un distributeur de boissons – un no man’s land. Autrement dit : un coin idéal pour venir s’y suicider.

En tout cas, le lieu inspire les pulsions de mort, de sexe que déclinent les deux auteurs, les frères Mark et Jay Duplass, au long d’épisodes de vingt à trente minutes.

On s’était parfois lassé en saison 1 de l’absurdité lunaire et surréalistes des situations, des numéros d’acteur auxquels se livrent quelques visages très connus de la télévision nord-américaine. La saison 2, que diffuse OCS, continue dans cet esprit souvent délétère. Mais, si la comédie et l’humour (noir) ne sont pas absents de Room 104, on s’extirpe cependant de chaque épisode avec la sensation poisseuse d’un mauvais rêve insinuant. Et pourtant, on y revient, pour goûter encore ce dérangeant entre-deux. R. Ma.

« Room 104 », saison 2, série créée par Mark et Jay Duplass (Etats-Unis, 2018, 12 x 22-30 minutes).