Dans une antenne parisienne des Restos du cœur, le 27 novembre 2018. / PHILIPPE LOPEZ / AFP

Pour la 34e année d’affilée, Les Restos du cœur ouvrent, mardi 27 novembre et jusqu’à fin mars, leurs 2 027 centres de distribution alimentaire dans toute la France. Les 72 000 bénévoles s’apprêtent à accueillir au moins 860 000 bénéficiaires – leur nombre en 2017, plutôt stable d’une année à l’autre.

Cependant, « au fil des ans, il est frappant de constater la présence grandissante d’enfants, voire de bébés, dont certains à la rue, observe Patrice Blanc, président de l’association. Nous devons désormais répondre à une forte demande de lait maternisé, toujours cher, et de couches… Les moins de 18 ans comptent aujourd’hui pour 38 % des bénéficiaires, et les 18-25 ans pour 12 %, une proportion qui a doublé en cinq ans ».

Les étudiants, dont 19 % vivent en dessous du seuil de pauvreté, sont de plus en plus nombreux dans les files d’attente, mais aussi parmi les bénévoles, car la plupart des personnes accueillies ont à cœur de donner, à leur tour, un coup de main.

Personnes âgées, surtout des femmes, en milieu rural

La précarité n’épargne pas pour autant les personnes âgées, surtout des femmes, en milieu rural, qui perçoivent de modestes retraites, comme le détaille Patrice Blanc :

« Dans quinze départements, dont la Corse, tout le Massif central mais aussi la Gironde, l’Yonne, nous multiplions les tournées en camion car il faut aller vers ces personnes de plus en plus isolées, que nous signalent les centres communaux d’action sociale. »
4,8 millions de Français ont recours aux aides alimentaires

Selon l’Insee, 4,8 millions de Français ont recours aux aides alimentaires, qu’elles soient distribuées par Les Restos du cœur, la Croix-Rouge ou l’une des 5 400 autres associations qui, contrairement aux Restos du cœur, avec leur propre circuit de collecte, s’approvisionnent auprès des banques alimentaires. Les 130 000 bénévoles de ces organismes enfileront, du 30 novembre au 2 décembre, leurs traditionnels gilets orange – attention à ne pas les confondre avec les jaunes… – pour collecter des denrées directement auprès des consommateurs se rendant dans les grandes surfaces.

Moins de 799 euros par mois

Les banques alimentaires constatent, elles aussi, une précarisation croissante de leur public dont, selon ses chiffres de 2016, 84 % disposent de moins de 799 euros par mois, soit 15 euros de moins qu’en 2014 et 69 euros de moins qu’en 2012. Le recours à leur aide est, en outre, de plus en plus fréquent, au moins une fois par semaine, et sur une période plus longue, puisque 41 % d’entre eux y viennent depuis plus d’un an, alors qu’ils n’étaient que 27 % en 2014.

Les dons sont cruciaux pour rester indépendant sous la menace de la baisse, voire du retrait des fonds européens

Les dons des consommateurs ont beau ne représenter que 11 % des 113 000 tonnes de denrées récoltées par les banques alimentaires, ils sont cruciaux dans le dispositif, ne serait-ce que pour l’indispensable contact avec le grand public. Mais ils sont aussi un moyen de rester indépendant sous la menace de la baisse, voire du retrait des fonds européens dont toutes ces associations et organismes bénéficient encore cette année, comme l’explique Patrice Blanc :

« Nous sommes très inquiets. L’Union européenne s’apprête à diviser par deux son soutien financier par son fonds d’assistance aux démunis. Il passe de 4 à 2 milliards d’euros pour la période 2021-2027, alors que 36 millions d’Européens vivent sous le seuil de pauvreté. Pour nous, cela représente la perte d’un quart de nos recettes. »

La grande distribution reste, elle, fidèle à ses engagements, stimulée, ces dernières années, par la lutte contre le gaspillage alimentaire.