Une quinzaine d’organes de presse, dont l’AFP, ont uni leurs forces, mercredi 28 novembre, pour lutter contre la désinformation en amont des élections générales de février 2019 au Nigeria, au moment où les principaux partis politiques du pays s’accusent mutuellement de propager de fausses nouvelles.

Mené en collaboration avec le Centre international du journalisme d’enquête (International Center for Investigative Reporting, ICIR) d’Abuja et First Draft, une ONG qui vise à lutter contre la désinformation dans le monde, le projet CrossCheck Nigeria ambitionne de faire travailler ensemble des médias habituellement concurrents pour contrer l’afflux de fausses informations sur les réseaux sociaux. Alertés par le grand public via un numéro WhatsApp ou le site Internet du groupe, les journalistes enquêteront et publieront les résultats de leurs recherches.

Campagne féroce

Les électeurs du Nigeria, pays fédéral, se rendront aux urnes en février pour choisir leur président, leurs députés et les gouverneurs des différents Etats. Le président Muhammadu Buhari, 75 ans, est candidat à sa propre succession. Il affrontera le richissime homme d’affaires et ancien vice-président Atiku Abubakar, 72 ans. La campagne entre ces vétérans de la politique nigériane devrait être féroce, et les résultats serrés.

La situation sécuritaire, très dégradée dans plusieurs régions, inquiète les observateurs, qui craignent de nombreuses violences en amont et lors des scrutins. Si la dernière, en 2015, avait été relativement calme, les élections au Nigeria sont souvent sanglantes.

Dans ce pays, le plus peuplé d’Afrique avec plus de 180 millions d’habitants, dont l’immense majorité vit dans la grande pauvreté, et où le taux d’alphabétisation est de 59 %, les fausses informations, souvent créées dans un but politique, se propagent comme une traînée de poudre sur les téléphones portables – la Nigerian Communications Commission en recensait 140 millions en 2017.

Le Nigeria est divisé entre un nord musulman et un sud chrétien, ainsi qu’en une multitude de communautés aux intérêts souvent divergents, ce qui amplifie le risque de propagation de rumeurs ou de fausses nouvelles.

Pour Dayo Aiyetan, directeur exécutif d’ICIR, les réseaux comme Facebook, Twitter et WhatsApp sont devenus « des moyens pour les politiciens de répandre des informations erronées, des rumeurs et des mensonges ». « Les médias ont la responsabilité de vérifier les informations diffusées sur les réseaux sociaux pour s’assurer de leur véracité », ajoute-t-il. Un projet similaire a été mené en France et au Brésil, avant l’élection présidentielle de ces pays.