EssilorLuxottica sera pour le moment dirigé par un tandem composé de Leonardo Del Vecchio (à droite) au poste de PDG et d’Hubert Sagnières, PDG d’Essilor, comme vice-PDG délégué et avec les mêmes pouvoirs. Ici, le 16 janvier 2017. / THIERRY FOULON / AFP

Leonardo Del Vecchio n’est pas parvenu à ses fins. Le patron fondateur de Luxottica avait semé le trouble, début novembre, en annonçant qu’il proposerait « immédiatement » son bras droit, Francesco Milleri, pour la direction générale d’EssilorLuxottica ; le « golden papy » de 83 ans, deuxième fortune d’Italie, a adopté un profil plus modeste, jeudi 29 novembre, à Paris, lors de la première assemblée générale ordinaire du groupe franco-italien (150 000 salariés et 17 milliards d’euros de chiffre d’affaires) né le 1er octobre de la fusion d’Essilor, numéro un mondial des verres ophtalmiques, et de Luxottica, premier fabricant de montures de lunettes.

La nomination de M. Milleri « n’est pas à l’ordre du jour », a assuré le président du comité des nominations et des rémunérations d’EssilorLuxottica, Olivier Pécoux. Les accords conclus entre les deux sociétés prévoient, en effet, que la recherche d’un futur patron opérationnel est du ressort de ce comité, qui soumettra ses choix au conseil d’administration. Elle doit aboutir d’ici à la fin de 2020. M. Del Vecchio avait lui-même fait machine arrière, quelques jours avant, en assurant qu’il s’en remettrait à ces deux instances « dans le respect des accords signés ». En attendant, l’entreprise sera dirigée par un tandem composé de M. Del Vecchio au poste de PDG et d’Hubert Sagnières, PDG d’Essilor, comme vice-PDG délégué et avec les mêmes pouvoirs.

Des « malentendus »

La société de gestion Phitrust jugeait que la nomination de M. Milleri aurait entraîné « un déséquilibre encore plus marqué » entre les actionnaires respectifs des deux groupes et qu’il pouvait signifier « une prise de contrôle non déclarée d’EssilorLuxottica ». M. Sagnières a voulu couper court à cette interprétation. « Il n’y a pas de prise de contrôle rampante de Delfin [le holding personnel de M. Del Vecchio] sur EssilorLuxottica, a-t-il assuré. Les accords sont solides et vont être respectés. » Les propos offensifs du patriarche transalpin ne sont que des « malentendus ».

Fin mars 2019, terme prévu de cette offre publique d’échange, Delfin devrait détenir 31 % du capital d’EssilorLuxottica (contre 38 % au 1er octobre), et ses droits de vote seront plafonnés à 31 % quelle que soit sa part de capital. Le siège du nouvel ensemble est celui d’Essilor, à Charenton-le-Pont (Val-de-Marne), et le groupe est coté à Paris.

Une chose est sûre, pour de nombreux analystes : le mariage des verres Varilux avec les lunettes Ray Ban, Oakley ou Persol, sans compter les montures fabriquées sous licence des géants du luxe (Armani, Chanel, Prada, Versace…), a du sens industriel. Dans un monde de l’optique très morcelé, qui explique le feu vert donné par toutes les autorités de la concurrence dans le monde, le géant franco-italien aura une force d’innovation et de vente considérable pour écouler des « packages verres et montures » associés à des services. Et d’énormes atouts sur le marché très porteur des lunettes solaires, où il offrira des marques prestigieuses.