Andres Manuel Lopez Obrador, à Mexico, le 22 novembre. / Rebecca Blackwell / AP

L’arrivée au pouvoir, le 1er décembre, d’Andres Manuel Lopez Obrador (« AMLO ») annonce un tournant au Mexique. Il a multiplié les promesses séduisantes pour les électeurs, notamment ceux de condition modeste : en finir avec les privilèges des puissants, combattre la pauvreté, réduire la criminalité et instaurer une démocratie participative dans un Etat de droit.

Son principal cheval de bataille : la lutte contre la corruption. Le fléau coûterait entre 5 % et 10 % du PIB mexicain, selon l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE). « AMLO » promet une rupture avec « la mafia au pouvoir », en référence au système clientéliste du Parti révolutionnaire institutionnel (PRI, centre), hégémonique de 1929 à 2000.

Même le président sortant, Enrique Peña Nieto (2012-2018), issu du PRI, est impliqué dans des scandales. Son successeur veut mettre fin à l’immunité des élus, lui inclus. Sa cure d’« austérité républicaine » prévoit de réduire de moitié les salaires des hauts fonctionnaires, dont le sien. Les pensions colossales des anciens chefs d’Etat seront aussi supprimées.

Il assure que les sommes récoltées financeront des programmes sociaux pour réduire la pauvreté qui frappe 43 % des Mexicains : santé et éducation gratuites, hausse du salaire minimum (3,80 euros par jour), retraites universelles doublées, bourses scolaires et créations d’emplois pour les jeunes… Le tout sans hausse des impôts, ni de la dette. Il annonce des grands travaux pour doper la croissance à 4 %, contre 2 % environ depuis vingt ans. En tête, la construction de deux voies ferrées dans les régions marginalisées du sud du pays. Les économistes qui le critiquent dénoncent le flou quant au financement.

« Ravages du néolibéralisme »

Représentant d’un « nationalisme de gauche », M. Lopez Obrador fustige les « ravages du néolibéralisme » mais pas le capitalisme. Depuis son élection, il doit tenter de rassurer les patrons et les marchés financiers.

Face aux injures de Donald Trump contre les migrants illégaux, « AMLO » joue la carte de la conciliation. Un accord entre les deux voisins serait sur le point d’être conclu, prévoyant que les Centraméricains illégaux restent au Mexique le temps que la justice américaine traite leurs demandes d’asile. En échange, Washington s’impliquerait dans le développement du sud du Mexique et de l’Amérique centrale.

« Il faut s’attaquer aux causes de la migration et de la violence », répète M. Obrador. Il promet de « pacifier » le pays, en proie à la guerre sanguinaire des cartels de la drogue, entre eux et contre le gouvernement. Il prévoit notamment la légalisation de la marijuana, une amnistie pour les petits narcotrafiquants et la création d’une garde nationale, composée de militaires et de policiers. Mais le maintien de l’armée dans les rues provoque une levée de boucliers.

Même tollé envers le « pardon » proposé pour ses prédécesseurs, soupçonnés de corruption, au nom de la stabilité du pays. Son Mouvement de régénération nationale (Morena) a obtenu une majorité absolue au Congrès lors du scrutin du 1er juillet, mais « AMLO » annonce de prochaines consultations populaires sur ces sujets épineux – la marque de son populisme pour ses détracteurs. Cet adepte des référendums en prévoit un autre, dans trois ans, sur son maintien ou non au pouvoir à mi-mandat.