« Visage », de Myriam Mihindou. / COURTESY OF GALERIE MAÏA MULLER

Le cuivre est un métal conducteur. Les mots sont conducteurs d’émoi et de sens. Myriam Mihindou écrit en fils de cuivre tressés, d’une écriture tremblée, des mots très communs : visage, racine, menottes. Elle les trace également au crayon, les brode en fils de soie et découpe dans des dictionnaires leurs définitions et occurrences. Elle appelle cela la « langue secouée ». Ainsi remués, les mots se mettent en effet à vibrer et bruire, d’autant plus fort que Mihindou les associe en petites séries par assonances : visage, visa, vis-à-vis et voir, par exemple.

Ces litanies fragmentées ne valent pas seulement par leur poésie sonore : l’histoire et ses silences commodes, la politique et ses « éléments de langage » truqués passent à l’épreuve de ce tamis. Dans plusieurs compositions, certaines phrases sont ­illisibles, serrées en rouleaux noués d’un fil rouge, comme des vœux ou des invocations. On songe aux langues secrètes de bien des religions, aux prières qui ne seraient efficaces que si elles ne sont connues que de celle ou celui qui les adresse à une puissance divine. Le fil de cuivre enveloppe aussi des ­bâtons à fourche, de ceux dont se servent les sourciers, et se glisse dans d’autres fourches, de verre celles-ci, symboles d’une extrême pureté.

« Louve », de Myriam Mihindou. / COURTESY OF GALERIE MAÏA MULLER

« Ivresse », Myriam Mihindou. Galerie Maïa Muller, 19, rue Chapon, Paris 3e. Tél. : 09-83-56-66-60. Du mercredi au samedi, de 11 heures à 19 heures. Jusqu’au 16 janvier 2019.