L’un des trois plateaux d’« Artifact ». / Valve

Attention, grands noms : Artifact, le jeu de cartes à collectionner sur PC, Mac et Linux sorti le 28 novembre, aligne un casting impressionnant. Edité par Valve, les concepteurs de Half-Life et de la plate-forme Steam, ce jeu vidéo en ligne a été conçu par le pape des jeux de cartes et inventeur de Magic, Richard Garfield.

Artifact combine des mécaniques classiques de jeu de cartes, et celle du jeu vidéo multijoueur Dota : le joueur dispose de trois champs de bataille séparés, dans lesquels il peut jouer des sorts et invoquer des créatures. Le but : détruire deux des trois tours de l’adversaire, ou l’« Ancien » − qui apparaît une fois la première tour détruite.

Derrière ces principes simples, Artifact se révèle rapidement d’une complexité et d’une richesse vertigineuses. En plus de ses cartes classiques, chaque joueur dispose de cinq héros, qui déterminent les types de sorts qu’il pourra lancer, et qui reviennent au tour suivant lorsqu’ils sont détruits. Leur placement est décisif pour déterminer les actions possibles, tout comme les équipements que l’on peut leur acheter avec des pièces d’or obtenues en tuant des monstres de bas niveau qui apparaissent au début de chaque tour.

Introducing Artifact
Durée : 01:26

Le jeu intègre aussi un élément de bluff bien maîtrisé : chaque joueur a l’opportunité de jouer une carte ou un pouvoir en réaction chacun à son tour, ou de passer. Il peut donc être très intéressant de laisser son adversaire dépenser toutes ses ressources avant de réagir, mais si les deux joueurs passent, le tour se finit instantanément.

Avec ses innombrables interactions, ses trois plateaux à gérer en même temps et les dizaines de choix à effectuer à chaque tour, Artifact ne recule pas devant la complexité. Heureusement, l’interface de jeu, particulièrement bien pensée, rend les situations relativement lisibles. Les ressources à disposition, les créatures sur le point de mourir, les bonus et malus divers… tout est indiqué clairement sur le plateau. Le jeu ne s’adresse cependant clairement pas aux joueuses et aux joueurs qui découvrent les jeux de cartes en ligne, tant sa complexité est apparente dès le premier tour de jeu.

Trop de place à l’aléatoire

La complexité n’est pas, en soi, un défaut, loin de là. Mais Artifact souffre d’une complexité étrangement conçue, qui laisse une place particulièrement étonnante au hasard. De très nombreuses cartes du jeu ont des effets aléatoires, parfois très puissants, qui viennent mettre un bazar assez malvenu dans les calculs complexes de chaque tour de jeu. La carte « Cheating Death » donne par exemple une chance sur deux à vos créatures de survivre à un combat qui aurait dû les tuer, et peut, à elle seule, retourner une partie dans un sens ou dans l’autre – particulièrement rageant après vingt minutes de jeu dans une partie serrée.

Là encore, une dose de hasard n’est pas forcément malvenue dans un jeu de cartes. Mais, dans Artifact, elle se marie très mal aux savants calculs à effectuer à chaque tour. Et ce rôle alloué à la chance est d’autant plus frustrant que de très nombreuses cartes ont des effets aléatoires, et que le hasard se glisse aussi jusque dans les mécaniques de base du jeu. Le placement des monstres de bas niveau qui apparaissent à chaque tour est tiré au sort, tout comme les équipements que l’on peut acheter en fin de tour, et qui oscillent entre le petit bonus et le surpuissant.

Qualités et défauts mis bout à bout, Artifact n’est donc pas à mettre entre les mains de tout le monde. Le jeu plaira à une niche de joueurs et de joueuses friands de calculs stratégiques à long terme, disposant du temps d’apprentissage et du self-control nécessaires face aux inévitables parties qui se joueront à pile ou face. Valve semble l’avoir bien compris : contrairement à la quasi-totalité de ses concurrents, Artifact ne se finance pas uniquement par la vente de paquets de cartes additionnelles. Avant d’acheter ses premiers boosters, il faudra payer environ 20 euros pour le jeu.

On a aimé :

  • Les mécaniques de jeu astucieuses ; le mode draft, dans lequel on sélectionne ses cartes l’une après l’autre
  • La richesse tactique offerte par les trois écrans
  • Le design clair pour un jeu de cette complexité

On a moins aimé :

  • L’omniprésence du hasard, incompréhensible dans ce type de jeu
  • La longueur des parties

C’est plutôt pour vous si :

  • Vous trouvez les échecs en 3D un peu trop simples
  • D’ailleurs, vous y jouez en mode Tempête sur l’échiquier
  • Vous avez soutenu une thèse en mathématiques appliquées consacrée aux probabilités

Ça n’est pas pour vous si :

  • Vous avez du mal à finir un tour de Hearthstone sans déclencher la limite de temps
  • Vous cherchez un jeu dont les parties sont simples et rapides
  • Vous détestez perdre sur un pile ou face