Des policiers au Stade-Vélodrome, en avril 2018. / PASCAL GUYOT / AFP

Le club de Lille peut remercier les « gilets jaunes » : il restera au moins une semaine de plus à la deuxième place du championnat de France de Ligue 1, à la suite du report des matchs de ses poursuivants, en raison des manifestations prévues samedi dans toute la France. Après PSG-Montpellier et Toulouse-Lyon, la Ligue de football professionnel (LFP) a annoncé, jeudi 6 décembre, le report des rencontres Monaco-Nice, Saint-Etienne - Marseille et Angers-Bordeaux. Seules cinq affiches restent, pour le moment, maintenues, dont trois samedi. « A cette heure, il n’y a pas de décision d’annuler l’ensemble de la journée », déclare la LFP.

La Ligue a accédé aux requêtes des préfectures – et du gouvernement de Monaco –, soucieuses de mobiliser pleinement les forces de l’ordre pour les rassemblements annoncés samedi. Soixante-cinq mille représentants des forces de l’ordre seront déployés sur tout le territoire, a annoncé le gouvernement.

Si clubs et supporteurs de football ont parfois reproché à certaines préfectures d’user de motifs fallacieux pour annuler des déplacements de supporteurs (concomitance de la braderie de Lille, des soldes d’hiver ou de la Foire de Mars à Troyes, pour ne citer que les plus fameux), ces reports n’ont pas suscité de protestation particulière dans le milieu du football.

Selon la Division nationale de la lutte contre le hooliganisme (DNLH), 38 246 policiers et gendarmes ont été mobilisés sur l’ensemble des matchs de Ligue 1 et de Ligue 2 lors de la saison 2017-2018, soit un millier en moyenne par journée, avec de fortes disparités d’une rencontre à l’autre. Le derby Monaco-Nice ainsi que le choc entre Saint-Etienne et Marseille auraient nécessité une importante mobilisation policière.

Le casse-tête de la reprogrammation des matchs

Sportivement, l’inéquité sera relative : hormis Lille, six des sept premiers du championnat sont concernés par ce report. Mais la reprogrammation des matchs, dans un calendrier déjà tendu, va se révéler un véritable casse-tête pour les instances nationales et les clubs, en premier lieu ceux encore engagés en Coupe d’Europe. Paris et Lyon pourraient être potentiellement dans ce cas au début de l’année prochaine.

Le président de l’Olympique lyonnais, Jean-Michel Aulas, dont l’équipe peut se qualifier mercredi à Kiev pour les huitièmes de finale de Ligue des champions, a été le premier à demander le report total de la journée. « J’aime que les choses prévues se passent normalement, a-t-il protesté. Là, il y aura changement. Peut-être toute la journée sera-t-elle annulée, car il faut se poser la question de l’équité, des dates de rattrapage quand on joue les Coupes d’Europe et le calendrier est chargé»

Les 32es de finale de la Coupe de France, qui marquent l’entrée en lice des clubs de Ligue 1, sont, en effet, programmés les 5 et 6 janvier 2019, après la trêve hivernale qui débute le 22 décembre. Le Paris-Saint-Germain a également fait part de sa volonté de ne pas reporter sa tournée hivernale prévue au Qatar mi-janvier, et qui lui permet notamment de justifier son très décrié contrat avec QTA, l’office de tourisme de l’émirat. En conséquence, le club parisien pourrait disputer sa rencontre face à Montpellier en février.

Le report complet, un événement rarissime

Le groupe de supporteurs des South Winners à Marseille avait affiché sa solidarité envers les « gilets jaunes », le 2 décembre lors du match face à Reims. / GERARD JULIEN / AFP

La Ligue devrait se prononcer rapidement sur un éventuel report complet de la journée, ce qui serait rarissime. Il faut remonter au mois de novembre 2009 pour trouver pareil cas de figure. La 11e journée de Ligue 1 avait été intégralement reportée en raison de la participation des Bleus aux barrages qualificatifs pour la Coupe du monde 2010.

Le championnat de France avait jusqu’alors été peu touché par le mouvement des « gilets jaunes ». Seul événement notable, le bus du FC Nantes avait été immobilisé par des manifestants, dans la nuit de vendredi à samedi, alors que les joueurs et le staff des Canaris se dirigeaient vers l’aéroport après un match perdu à Saint-Etienne (3-0).

Dans les stades français, certains groupes de supporteurs, notamment les South Winners à Marseille, lors de la réception de Reims dimanche dernier, ont apporté leur soutien aux « gilets jaunes » en déployant des banderoles ou en arborant le désormais fameux signe de ralliement des contestataires.

Souvent imperméable aux mouvements sociaux, le football français avait, par exemple, organisé la finale de la Coupe de France le 12 mai 1968 à Paris, entre Saint-Etienne et Bordeaux. « Les Verts d’Aimé Jacquet avaient ramené le trophée à la mairie au milieu des manifs et des usines occupées », relate le site So Foot.