Le chef de la délégation sahraouie, Khatri Addouh, à Genève, le 5 décembre 2018. / FABRICE COFFRINI / AFP

Après leurs premières discussions en six ans, le Maroc et le Front Polisario ont prévu de se revoir début 2019 pour parler du statut du Sahara occidental sous les auspices de l’ONU, qui espère pouvoir relancer des négociations difficiles. La poursuite des discussions s’annonce d’ores et déjà compliquée alors que les parties, qui se disputent le dernier territoire du continent africain en attente d’un statut post-colonial, continuent de camper sur leurs positions.

Six ans après l’échec de négociations directes, le Maroc et le Front Polisario, qui se sont fait la guerre jusqu’au cessez-le-feu de 1991, ont participé pendant deux jours au Palais des nations, siège de l’ONU à Genève, à une table ronde en présence de représentants de l’Algérie et de la Mauritanie. L’envoyé de l’ONU, l’ex-président allemand Horst Kohler, s’est montré positif, assurant qu’une « solution pacifique à ce conflit est possible ». « D’après nos discussions, il est clair pour moi que personne ne gagne à maintenir le statu quo », a-t-il dit devant les médias.

Présentée par l’ONU comme un « premier pas vers un processus renouvelé de négociations en vue de parvenir à une solution juste, durable et mutuellement acceptable qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara occidental », la réunion à Genève s’est tenue dans « une atmosphère d’engagement sérieux et de respect mutuel », a relevé l’envoyé de l’ONU, chargé du dossier depuis 2017. Pour le ministère algérien des affaires étrangères, « la réunion de Genève relance le processus de négociations sur le Sahara occidental ».

« Négociations » ou « référendum »

Le Polisario, qui a proclamé en 1976 une République arabe sahraouie démocratique (RASD) avec le soutien de l’Algérie et de la Libye, milite pour l’organisation d’un référendum d’autodétermination, qui doit régler selon lui le conflit né au moment du départ des colons espagnols.

Le Maroc contrôle dans les faits 80 % de ce territoire désertique de 266 000 km2 et traite comme ses dix autres provinces cette région dotée d’un millier de kilomètres de littoral atlantique poissonneux, ainsi que d’un sous-sol riche en phosphates. Rabat, dont la délégation à Genève était conduite par le ministre des affaires étrangères, Nasser Bourita, rejette toute solution autre qu’une autonomie sous sa souveraineté, invoquant la nécessité de préserver la stabilité régionale.

« L’autodétermination est une chose, le référendum en est une autre. L’autodétermination se fait par les négociations. Le référendum n’est pas a l’ordre du jour », a déclaré M. Bourita devant les médias. Il a néanmoins relevé « la très bonne atmosphère » durant les discussions, tout en soulignant que son pays « n’est pas près à s’engager dans des réunions sans fin ».

De son côté, le président du « Parlement » sahraoui, Khatri Addouh, à la tête de la délégation du Polisario, a une nouvelle fois demandé le droit à l’autodétermination. Et « si les Marocains ont vraiment la réelle volonté d’en finir avec cela et de façon plus rapide qu’en organisant un référendum, ils doivent reconnaître la République sahraouie », a-t-il dit.

De 100 000 à 200 000 réfugiés

Le dernier cycle de négociations directes lancé par l’ONU en mars 2007 s’était enlisé en raison de désaccords entre le Maroc et le Polisario sur le statut du territoire et sur la composition du corps électoral pour un référendum d’autodétermination. Les observateurs soulignent que les parties impliquées sont mises sous pression avec la récente réduction à six mois, contre douze auparavant, du renouvellement du mandat des casques bleus de la mission de l’ONU, notamment chargés de surveiller le cessez-le-feu.

Dans l’attente d’un règlement, de 100 000 à 200 000 réfugiés selon les sources, en l’absence de recensement officiel, vivent dans des conditions précaires dans des camps près de la ville algérienne de Tindouf, à 1 800 km au sud-ouest d’Alger, non loin des frontières avec le Maroc et le Sahara occidental.